Devenir adulte PDF

Title Devenir adulte
Author Romane Delaleu
Course Pratiques cliniques, processus thérapeutiques
Institution Université de Paris-Cité
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Devenir adulte Pratiques cliniques, processus thérapeutiques (ADO)

DEVENIR ADULTE Qu’est-ce que devenir adulte ? On a besoin d’avoir des repères pour comprendre quel va être le cheminement, l’aboutissement du processus adolescent qui amène au devenir adulte. Il n’y a pas de terme dédié à l’âge adulte comme l’enfance, l’adolescence… Il y a quelques néologismes qui amènent à l’inscription dans la vie sociale et dans sa propre vie psychique également. Philippe Gutton parle d’adultité, d’autres utilisent le terme d’adultisation. On parle plutôt de fonctionnement psychique adulte, d’état psychique adulte. Adulte en latin : adultus, qui est parvenu au terme de sa croissance physique et intellectuelle. Article : « Adolescence terminée, adolescence interminable » Les auteurs soulignent un début de 20 ème siècle, encore hanté par les épidémies, les famines, les guerres, les morts prématurées d’enfants et d’adultes jeunes. C’est l’allongement de la durée de vie qui a été modifié et qui a modifié en très peu de temps la manière dont tout un chacun peut envisager sa durée de vie. L’adolescence a alors pris toute son importance et aussi toute sa longueur. Il s’agit de repères psychiques et sociaux que l’on va pouvoir mettre en évidence. Il y a ce qu’on appelle maintenant le jeune adulte, entre 20 et 30 ans, qui commence à entrer dans la vie sociale, professionnelle, familiale, à se construire progressivement. On a ce temps de passage qui a commencé à être étudié vers le milieu du 19 ème siècle. Il a d’abord été employé pour les garçons, et, notamment, on a commencé à voir apparaître des différences entre enfant et adulte, qui marquaient la sortie de l’enfance par rapport à l’entrée dans un âge particulier (50 ans = vieillard). Pour Freud, l’homme mûr se distingue de l’enfant parce qu’il va passer du principe de plaisir au principe de réalité, principe de réalité qui s’acquiert dans un continuum qui va jusqu’à l’âge adulte. Il s’agissait d’acquérir la capacité « d’aimer et de travailler ». Ce qui correspond pour lui à une bonne santé psychique d’un sujet en maturité psychique. Ce qui permettait ce passage avec un peu plus de facilité c’étaient les rites de passage. Il y en a encore dans les sociétés traditionnelles. Les rites d’initiation existaient mais plus aujourd’hui dans les sociétés occidentales. On envoyait auparavant les jeunes adultes voyager. Ils partaient à l’étranger pour revenir avec plus de maturité dans leur famille afin de s’occuper du domaine, du patrimoine. Le voyage était une sorte de rite d’initiation dans les grandes familles. De nos jours, il y a quelque chose de ce côté-là qui revient avec les césures par exemple. Cela permet d’acquérir d’autres connaissances en dehors du cercle familial et social. Ces rites permettent ainsi d’aider ce passage de l’adolescent à l’âge adulte pour qu’il prenne la mesure de l’ailleurs, 1

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qu’il se dégage de l’environnement familial, parental. Cet environnement familial trop enveloppant nécessite parfois des séparations brutales. Il faut quitter le nid. Dans « L’interprétation des rêves », Freud parle de rêve de maturité ou de rêve de baccalauréat. Ce type de rêve remplace les rites et dévoile un sens inconscient. Les rêves de maturité font partie des rêves typiques. Le sujet rêve dans une grande angoisse qu’il échoue à un examen, très significatif pour lui. Ce type de rêve peut se reproduire lors de chaque étape de la vie, dans laquelle une grande pression est engagée. Il s’agit pour lui de l’équivalent d’un rite de passage vers une plus grande maturité, ce qui indique pour lui que l’accès à la maturité peut s’accompagner de fortes angoisses (castration, séparation, de mort). Le sujet se trouve dans une grande pression intrapsychique, dans la mesure où il est en train de franchir une étape importante de sa vie et ce rêve lui rappelle que c’est possible. Il y a un soulagement au réveil, qui veut dire « Je suis capable d’affronter une réalité avec de nouveaux enjeux. » C’est toujours chargé d’angoisse car les étapes maturatives de la vie psychique s’accompagnent nécessairement d’une charge d’angoisse : il faut quitter un état pour s’aventurer quelque chose d’inconnu. Le passage d’une étape de la vie à autre est toujours inquiétant, angoissant. On s’aperçoit quand on creuse la question du devenir adulte, en surplombant les différents auteurs, qu’être adulte correspond à la finalisation du processus d’adolescence, mais non pas à la finalisation du processus de maturation. Le processus adolescent comporte 3 axes :   

Axe pulsionnel Axe de la parte Axe narcissique

Devenir adulte c’est être capable de surmonter les pertes et les séparations. C’est être capable également de traiter sa pulsionnalité, utiliser donc sa force pulsionnelle au service de projets réactifs ou sublimatoires, qui vont permettre au sujet de construire son histoire. C’est également adapter son narcissisme à celui de l’autre, en s’offrant la possibilité de rencontre objectale satisfaisante. François Marty parle des transactions narcissiques à l’adolescence, il s’agit de transiger avec son propre narcissisme. Devenir adulte c’est être en mesure de faire des choix pour soi-même. La possibilité de choisir est importante. Il y a des choix d’investissement. Le choix d’orientation par exemple est un choix d’investissement. On aura tendance à voir des adolescents avec des tendances obsessionnelles par rapport à un choix qu’on leur demande de faire mais qu’ils n’ont pas la possibilité de faire. Cela va entraîner un conflit entre l’adolescent et ses parents, voire le système éducatif, mais aussi un

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conflit à l’intérieur d’eux-mêmes. Cette obsessionnalisation de la pensée est créée par le système éducatif. De nos jours, on sait que l’adolescence peut se prolonger, mais on ne tient pas compte de cet allongement et on a toujours les mêmes demandes vis-à-vis de l’adolescent au niveau social. On voit beaucoup de jeunes adultes qui choisissent une voie par défaut et se retrouvent à l’entrée de la vie active démunis. Chez certains la crise d’adolescence va dans le sens de l’autonomisation et de l’individuation. On se rend compte que certains arrivent à l’entrée de la vie active sans avoir connu ce temps d’autonomisation. On se rend compte qu’il y a beaucoup de jeunes adultes en souffrance. ADOLESCENCE ET DÉPRESSION Certains auteurs vont investir un champ plus spécifique. Pour Philippe Jeammet, « être adulte apparaît davantage comme une modalité de fonctionnement psychique, sujette à des fluctuations, que comme un état. Ce mode de fonctionnement ne réfère pas tant à un idéal absolu qu’aux potentialités d’un sujet donné dans un contexte donné. » Il poursuit : « L’être adulte réside dans la capacité du Moi d’accueillir et d’être en contact avec ce qui demeure en chacun d’infantile sans en être submergé et menacé. » Refuser de grandir chez certains c’est être parasité par l’angoisse de perdre l’enfance de façon définitive. Comme si devenir adulte impliquait de mettre à mort l’enfant qu’on a été. Faire le deuil de l’enfance ne signifie pas tuer l’enfant en soi. Les parents ont besoin aussi de s’identifier empathiquement à leur adolescent pour l’aider à traverser cette étape. Pour Philippe Jeammet, être adulte ça concerne également la capacité de faire une dépression. L’adolescence présenterait cette spécificité d’être le moment de passage d’une réponse à un vécu ou une situation dépressogène, par des équivalents dépressifs, à une réponse par une dépression proprement dite. Être en capacité de faire une dépression pour lui c’est une meilleure individuation, une organisation différenciée du Moi, du Surmoi, de l’idéal du Moi, et une séparation progressive et possible vis-à-vis des objets. Tout cela reste progressif. L’adolescent lui, n’est pas en mesure de faire une véritable dépression. Il y aura ce que Jeammet appelle des équivalents dépressifs, ce qui concerne les « à-côtés » de la dépression. L’adolescent ne peut pas dire qu’il est triste, il ne peut pas mentaliser les affects de tristesse et les représentations de la perte. Il y aura des agirs, des comportements d’acting, de recours à l’acte, des comportements addictifs, d’attaques du corps, psychosomatiques, des inhibitions psychiques. LA TEMPORALITÉ Piera Aulagnier a beaucoup travaillé sur la temporalité dans le développement de l’adolescent et elle va considérer qu’il y a un travail psychique à effectuer qui est un travail

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de détachement avec les objets parentaux. Cela signifie que l’adolescent va être en mesure de se séparer de ses objets parentaux, les objets œdipiens infantiles, pour progressivement se sentir concerné par eux et devenir capable de s’en préoccuper. Le passage de l’état d’enfant qui attend de la part des parents qu’ils s’occupent en permanence de lui, cet état doit pouvoir changer, et l’adolescent doit pouvoir aussi se préoccuper de ses parents. Pour ce faire, l’adolescent doit donc investir émotionnellement le temps de son passé pour investir le temps à venir. Piera Aulagnier explique cette dynamique par un mouvement qui nécessite un retrait de libido du temps passé (deuil de l’enfance) qui va permettre d’investir le temps à venir. C’est la raison pour laquelle elle va mettre l’accent sur cette co-existence de principes de permanence et de changement : une capacité de créer puis de maintenir une liaison entre présent et passé. Cette liaison entre présent et passé équivaut à changer tout en restant le même. Le présent relève d’un mouvement de déplacement libidinal entre deux temps, ce qui rend indissociable le mouvement temporel et le mouvement libidinal. Dans « Le poète et l’activité de fantaisie » de Freud, il dit : « Ainsi donc, du passé, du présent, du futur, comme enfilés sur le cordon du désir qui les traverse. » L’investissement du temps est aussi un investissement libidinal. Les adolescents qui ne parviennent pas à retrouver leur passé, ont tendance à désinvestir leur présent et sont dans l’incapacité de construire un futur. LA MORT  Article : « Stratégies d’immortalité » C’est une question qui traverse l’adolescent, la question de la mort, et ce qu l’adolescent peut vivre comme sentiment d’immortalité. Comme si la question de la mort ne le concernait pas. Il n’a pas accès à une représentation psychique de la mort. À partir de l’adolescence, concernant la prise en compte de la temporalité psychique, il y a un passage qui s’effectue entre le fantasme d’immortalité de l’adolescent et la conviction d’immortalité de l’adulte. Ces deux éléments présentent une différence essentielle : pour l’adolescent n’a pas de signification propre, la morte est inoffensive. Or, pour l’adulte, la mort est menaçante parce qu’elle est devenue possible, il y a eu une prise de conscience de la possibilité de la mort et qui confronte l’adulte au mortifère de la mort. L’adulte face à cette possibilité de la mort élabore des projets pour dénier l’idée de la mort. L’homme psychiquement sain élabore des projets, comme s’il ne devait jamais mourir. Et cela en déniant (déni ordinaire), inhibant cette possibilité de la mort. Il va mettre hors association la menace que constitue pour chacun le savoir de l’immanente possibilité de sa mort. L’élaboration de projets de vie nécessite la mise en œuvre d’un déni normatif et suppose l’instauration d’un clivage du Moi puisqu’il n’y a pas de déni sans clivage.

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Le déni est mis en place pour répondre à une attaque, selon Freud, qui provient de la réalité extérieure. Alors, cette entrevue avec la conscience de la mort, est vécue par l’adolescent comme une menace, qu’il s’agit de dénier par la mise en œuvre d’un projet d’adulte. L’adolescent désinvestit le fantasme d’immortalité au fur et à mesure qu’il entrevoit la mort comme un événement qui va prendre sens pour lui-même. C’est en opérant un déni de ce qu’il a perçu, qu’il va concrétiser un projet de vie, et qu’il va entrer dans la conviction d’immortalité de l’adulte. Les idées de mort sont fréquentes à l’adolescence. Ce qui doit alerter c’est la mise en place de modalités d’exécution d’un suicide. Les prises de risque peuvent être des tentatives de suicide déguisées. Ce sont des questions difficilement abordables par les adultes. Parler d’idées de mort, c’est en soi mortifère et qui n’a pas lieu d’être dans la communication avec un jeune. D’où l’impossibilité pour les adolescents de parler de leurs idées de mort à leurs proches. Les idées de morts sont relativement banales. Les idées suicidaires sont différentes. On peut ressentir des risques de passage à l’acte sans pour autant que le risque soit véritable, mais avec la possibilité que cela se passe. Ce ressenti peut être transmis sans aucune manifestation verbale qui lui soit associée. Avec les psychotiques, penser à tiercéiser la relation pour ne pas s’enfermer dans une bulle narcissique avec le patient. L’important c’est qu’on ressent le maintien du lien à l’autre. Le plus grave est le sentiment de rupture, de coupure chez un enfant, un adolescent, un adulte. François Marty parle de travail psychique du lien. C’est là toute l’importance du lien à l’adolescence, et notamment du lien au sens de liaison pulsionnelle. Dans le pubertaire, il y a de violence qui peut s’exprimer pulsionnellement puisque l’adolescent est aux prises avec des ressentis corporels, une excitation pulsionnelle qu’il ne connaît pas et qu’il va devoir apprendre à traiter progressivement et donc de canaliser cette pulsionnalité. Gutton parle de traumatisme du pubertaire. Le travail psychique du lien c’est transformer la violence pubertaire en énergie pulsionnelle créatrice. Il est nécessaire de prendre du temps pour la gestion de ce pulsionnel. On ne peut pas demander à l’adolescent d’être ce qu’il est en train de devenir. L’adolescent n’a pas conscience de sa violence, ce n’est qu’au fur et à mesure de son évolution qu’il pourra y avoir un décalage, d’une distance par rapport à sa pulsionnalité. Les objets vont être suffisamment intériorisés de façon que cette conflictualité soit internalisée. L’adolescent n’aura plus besoin de recourir à l’acte, avec la capacité de verbalisation qui va servir à secondariser les représentations et à symboliser ce qui doit être symbolisable. Il y a une tolérance à la discontinuité : accepter sa propre violence de façon à accepter les moments en soi de discontinuité pulsionnelle.

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L’adolescent doit s’extraire de la dépendance de l’environnement pour compter sur ses propres ressources de façon à s’accepter lui-même. Il s’agit d’installer un Surmoi bienveillant. Le sujet doit faire l’expérience des ses propres limites en lui. Il pourra alors reconnaître qu’il a des failles. Cette idée de Surmoi n’est pas évidente, même chez l’adulte. Le Surmoi parental est souvent blessé, on doit pouvoir aider à ce qu’il devienne également bienveillant. On a besoin que des parents se sentent suffisamment bons pour contribuer à aider leur adolescent dans un processus thérapeutiques. Il y a un accompagnement parental qui est nécessaire. L’installation en soi-même : installation dans un chez soi, un peu comme dans une maison. On s’occupe de son intérieur, mais aussi des autres, ce qu’il se passe à l’extérieur de notre maison. QUESTION DE LA SEXUALITÉ ET DES RELATIONS D’OBJET Freud considère que la sexualité adulte est le passage du prégénital au génital. On peut considérer que c’est le passage de la recherche de l’appropriation, de la possession de l’objet à l’échange avec l’objet, dans un rapport de complémentarité des sexes et non plus d’un rapport de force. C’est le passage d’un objet d’amour œdipien à un objet trouvé dans la réalité externe et reconnue dans sa différence. 3 différences fondamentales qui structurent les relations d’objet :   

Différence des générations Différence des sexes Différence culturelle

C’est à partir de l’intégration de la différence des sexes et des générations que peut se mettre en place l’ensemble des autres différences qui existent entre les êtres humains, c’est dire l’importance de la question de la complémentarité. La différence doit pouvoir passer l’idée de la complémentarité entre les sexes, entre les générations et, plus généralement, entre les êtres humains. RAYMOND CAHN ET LA SUBJECTIVATION Au départ, ce processus de subjectivation a à voir avec la cure psychanalytique, dont l’aboutissement est l’appropriation de sa propre histoire et la capacité à devenir sujet de son histoire. C’est dans ce processus-là, dans la perspective de l’adolescence, que survient la mise en place de l’achèvement d’une appropriation de soi. Il s’agit de s’approprier subjectivement sa propre histoire et de devenir le sujet de sa propre histoire. Ce processus est défini « à partir de l’exigence interne d’une pensée propre permettant l’appropriation du corps sexué et l’utilisation des capacités créatrices du sujet dans une démarche de désengagement, de désaliénation du pouvoir de l’autre ou de sa jouissance ».

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« Une partie des acquisitions culturelles a certainement laissé derrière elle son précipité dans le Ça, bien des choses que le Surmoi apporte éveilleront un écho dans le Ça. Maintes choses que l’enfant vit à nouveau connaîtront un effet renforcé, parce qu’elles répètent une expérience de vie phylogénétique très ancienne (ce que tu as hérité de tes pères, acquiers-le afin de le posséder). CONCLUSION Dans nos sociétés contemporaines, un certain nombre de syndromes ont été décrits pour rendre compte de la difficulté de grandir, d’avancer. Syndrome de Peter Pan Syndrome du hikikomori : retrait de jeunes adultes en restant chez eux, venu du Japon Adulescent : ces adolescents qui ne deviennent jamais adultes, trop complices

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