S3 - psychologie sociale - théories de l\'attribution causale (L1) PDF

Title S3 - psychologie sociale - théories de l\'attribution causale (L1)
Author Laura
Course Histoire de la psychologie et de ses idées
Institution Université Toulouse-Jean-Jaurès
Pages 8
File Size 517.5 KB
File Type PDF
Total Downloads 38
Total Views 125

Summary

Théories de l'attribution causale...


Description

THEORIES DE L’ATTRIBUTION CAUSALE Elles s’intéressent à l’explication donnée par les individus des causes de leurs comportements ou de ceux d’autrui. Elles reposent sur le présupposé que nous, comme autrui, avons besoin de rendre le monde prévisible et contrôlable afin d’adapter au mieux notre comportement. C’est ce besoin qui pousserait les individus à rechercher et comprendre les relations causales entre un fait X et un fait Y. 1. DÉFINITION « ... Les individus tentent régulièrement d’identifier les causes responsables d’événements physiques et de comportements sociaux. L’attribution causale concerne les processus psychologiques impliqués dans ce raisonnement. Elle peut également être entendue comme le produit de ce raisonnement (« si Jean a raté son examen, c’est parce qu’il est paresseux »). Suivant les circonstances, l’attribution causale correspondra à un processus largement automatisé ou, au contraire, très élaboré. » (Corneil, 202011). Pour Moscovici (1972, p.60), le processus d’attribution « consiste à émettre un jugement, à inférer « quelque chose », une intuition, une qualité, un sentiment sur son état ou sur l’état d’un autre individu à partir d’un objet, d’une disposition spatiale, d’un geste, d’une humeur ». En somme, l’attribution causale consiste à donner du sens à-, et trouver l’origine de-, ce que nous observons et vivons. 2. QUELQUES MODELES THEORIQUES DE L’ATTRIBUTION Note : le terme "acteur" renvoie à la personne à l’origine du comportement, alors que le terme "observateur" renvoie à la personne qui observe le comportement. 2.1. L’OBSERVATEUR SOCIALE, UN SCIENTIFIQUE NAÏF AYANT BESOIN DE CONTROLE 1 Olivier CORNEILLE, « ATTRIBUTION CAUSALE, psychologie sociale », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 2 novembre 2020. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/attribution-causalepsychologie-sociale/

Heider (1944, 1958) qualifie l’observateur social que nous sommes de scientifique naïf cherchant à trouver les causes du comportement qu’il a observé. Parmi elles, il différencie les causes interne et les causes externes. Les attributions internes renvoient à l’auteur du comportement ou à la personne à qui s’applique le comportement. Elles font donc référence à un trait de personnalité (on parle alors également de causes dispositionnelles) ou à une intention de la part de la personne. Par exemple : "Hier soir, j’ai accompagné un.e ami.e à faire du sport..." - "parce que je suis passionné.e par le sport" (disposition), - "parce que j’avais envie de me défouler et que je trouve que le sport est un bon moyen" (intention). Les attributions externes renvoient à toutes les autres explications. Elles peuvent donc faire référence à la situation et à ses contraintes, à l’action d’autres personnes, ou au hasard et à la chance (circonstances). Par exemple : "Hier soir, j’ai accompagné un.e ami.e à faire du sport..." - "parce que je n’avais pas les clés pour rentrer chez moi" (contrainte de la situation), - "parce que mes ami.e.s m’ont convaincu.e d’y aller" (actions d’autres personnes), - "parce que j’ai croisé d’autres ami.e.s qui y allaient aussi" (circonstances).

Dans la vie de tous les jours, les explications sont souvent complexes et mêlent à la fois des explications de type interne et externe. Il n’est d’ailleurs pas toujours évident de déterminer si une explication est interne ou externe. Par exemple : J’habite à la campagne parce que je souhaite habiter au calme (explication interne) vs. J’ai acheté cette maison parce qu’elle est loin de la ville (explication externe). 2.2. MODE LE DES I NFE RENCES CORRE SPONDANTES DE JONES ET DAVIS (196 5) Pour Jones et Davis (1965), le but du processus d’attribution est de réaliser une inférence correspondante : il s’agit pour l’observateur de vérifier une qualité stable, une disposition permanente, chez une personne à l’origine du comportement observé (i.e., l’acteur du comportement). Leur modèle se limite donc aux hétéro-attributions et ne traite pas des attributions réalisées par un acteur au sujet de son propre comportement (auto-attributions). Il se compose de trois étapes 1. La personne doit observer le comportement 2. Elle doit ensuite croire quel comportement était intentionnel 3. Elle doit enfin déterminer s’il a personne à l’origine du comportement était libre ou au contraire, contrainte à agir de la sorte Selon ces chercheurs, après avoir observé un comportement, la première question que se pose l’observateur concerne l’intention sous-jacente au comportement. Seul un comportement intentionnel est susceptible d’avoir pour cause une caractéristique stable de l’acteur. Un comportement est intentionnel si (1) l’acteur possède les capacités indispensables à l’action et (2) s’il a conscience des conséquences de son action. Si ces conditions sont réunies, l’observateur va rechercher ce que Jones et Davis appellent les "effets non communs". Il s’agit d’une comparaison entre les conséquences du comportement réalisé et celles d’autres comportements qui auraient été possibles dans la même situation. Par exemple, vous souhaitez comprendre pourquoi un.e étudiant.e s’est inscrit.e à l’Université A pour suivre un cursus de Psychologie, et non à l’Université B ou C. Vous notez que cette discipline est enseignée dans les 3 universités, lesquelles sont situées à égale distance de son domicile, que le nombre d’étudiant.e.s inscrit.e.s y est comparable, que les équipements sont identiques, mais que l’Université A possède un enseignement optionnel Cinéma absent dans les Universités B et C. Le choix de l’étudiant.e a peu de chances de s’expliquer par une des caractéristiques communes aux trois universités mais plus par celle qui distingue l’Université A des deux autres (caractéristique non commune). L’observateur que vous êtes attribuerait alors le choix de

l’étudiant.e par son intérêt pour le cinéma, que vous pourriez associer à un caractère curieux et à une ouverture d’esprit.

Aux effets non communs, Davis et Jones ajoutent un effet "communément désirable" : si tout le monde effectue le même comportement, il est évident que ce comportement ne peut être attribué à une disposition personnelle et stable de l’acteur (trait de personnalité par exemple). 2.3. LE PRINCIPE DE LA COVARIATION DES CAUSES ET DES EFFETS DE KELLEY (1967) Kelley (1967), qui s’est inscrit dans la position défendue par Heider, va plus loin que le modèle proposé par Jones et Davis. D’une part parce qu’il s’intéresse aux attributions concernant la personne, le stimulus, et les circonstances. D’autre part parce qu’il ne porte pas exclusivement sur les attributions du comportement d’autrui (hétéro-attributions), mais s’attache également aux attributions de nos propres comportements (auto- attributions). Ainsi, selon Kelley, la démarche de raisonnement scientifique reposerait sur le principe de la covariation des causes et des effets. En somme, un fait Y est attribué à une cause X si 2 conditions sont remplies 1. Lorsque X est présente, Y se produit 2. Lorsque X est absente,Y ne se produit pas Par exemple, si je remarque que je suis triste le dimanche soir, je pourrais faire le raisonnement suivant : c’est la perspective de reprendre le travail (X) qui me rend triste (Y). Ce raisonnement serait d’autant plus facile si je suis toujours triste les dimanches soir (consistance), sauf ceux précédents un lundi férié (cad. lorsque X est absente, Y ne se produit pas). A la consistance, Kelley ajoute donc deux autres critères importants sur lesquels reposerait le processus de l’attribution causale : la distinctivité et le consensus. Par exemple, un.e ami.e vous raconte avec enthousiasme le marathon auquel il.elle a participé le dimanche dernier. Selon le modèle de Kelley, l’explication de cet enthousiasme est simple s’il y a consistance : chaque fois que votre ami.e participe à ce marathon, il.elle en parle avec enthousiasme. Vous pourriez en effet en conclure que ce marathon est intéressant pour un.e sportif.ve (attribution causale externe), cela d’autant plus si votre ami.e se montre généralement assez critique à l’égard des marathons auquel il.elle participe (forte distinctivité) et que d’autres ami.e.s ayant également participé audit marathon en parlent avec le même enthousiasme (fort consensus). Maintenant, l’explication change si : chaque fois que votre ami.e participe à un marathon (quel qu’il soit donc), il.elle en parle avec enthousiasme (faible distinctivité) et que vos autres ami.e.s en parlent avec un

enthousiasme très modéré (faible consensus). Là, il y a des chances que vous expliquiez l’enthousiasme de votre ami.e par le fait qu’il.elle est simplement heureux.se dès qu’il.elle court pendant des heures ! (attribution causale interne). Limites au modèle de Kelley 1.TOUS LES CRITERES MOBILISES DANS LE MODELE DE KELLEY NE SONT PAS CONSIDERES PAR LES INDIVIDUS – EXPERIENCE DE MCARTHUR (1972) Les participants de cette recherche étaient invités à lire l’un des 8 scénarii crées par McArthur afin de déterminer quelle combinaison entre la distinctivité, la consistance et le consensus amenait les participants à attribuer les causes du comportement cible, soit à l’acteur, soit au stimulus, soit aux circonstances de la situation. Ces 8 scénarii permettaient ainsi de croiser une distinctivité forte (D+) ou faible (D-), une consistance forte (CT+) ou faible (CT-), et un consensus fort (CS+) ou faible (CS-). Les 8 scénarii commençaient tous avec la phrase suivante : "Le comédien fait rire John". Ils se poursuivaient avec l’une des phrases suivantes : •

Presque aucun autre comédien ne fait rire John (D+)



Presque tous les comédiens font rire John (D-)



Dans le passé, ce comédien a presque toujours fait rire John (CT+)



Dans le passé, ce comédien n’a presque jamais fait rire John (CT-)



Presque tous ceux qui ont entendu ce comédien ont ri (CS+)



Presque personne d’autre ayant entendu ce comédien n’a ri (CS-) Cela permit à McArthur d’avoir, par exemple, un scénario qualifié "D-, CT+, CS-" : "Le comédien fait

rire John. Presque personne ayant entendu ce comédien n’a ri. Presque tous les comédiens font rire John. Dans le passé, ce comédien a presque toujours fait rire John". Résultats : un scénario alliant une faible distinctivité, une forte consistance et un faible consensus (D-, CT+, CS-) amenait les participants à attribuer les rires de John à des caractéristiques personnelles de John (le sujet cible appelé "l’acteur"). Le scénario alliant une forte distinctivité, une forte consistance, et un fort consensus (D+, CT+, CS+) amenait les participants à attribuer les rires de John aux caractéristiques du comédien (au stimulus). En revanche, ils attribuaient les causes aux circonstances de la situation en cas de faible consistance (CT-). Enfin, McArthur observa que la distinctivité était le critère le plus important sur lequel se basaient les participants pour expliquer la situation décrite, suivi de la consistance de l’évènement. Le consensus semblait être le critère le moins important dans l’analyse des participants pour attribuer une cause au comportement observé. 2.LE MODELE DE KELLEY SOUS-TEND UN PROCESSUS COUTEUX EN TERMES DE RESSOURCES ATTENTIONNELLES Or, nous n’avons pas toujours ni le temps, ni l’attention nécessaire à un tel traitement. Pourtant, attribuer des causes à des effets observés est une activité très fréquente. Il est alors probable que les explications à des évènements ou comportements observés soient faites de façon moins réfléchie (plus automatique) que ne l’ont formulé Heider et Kelley. Récemment, une thèse défendant un processus automatique de l’attribution causale a, par exemple, été défendue par Hassin, Bargh, et Ulemann (2002). Par processus automatique, les auteurs font référence à un processus effectué sans le vouloir, inconscient, et sans effort. Cette thèse s’éloigne donc fortement de celle développée par Kelley, qui présente l’attribution causale cause le résultat d’une réflexion mobilisant de l’effort et de l’attention. 2.4. LE MODELE DE WEINER ET SES COLLEGUES (1972, 1983, 1985, 1986)

Pour catégoriser l’ensemble des explications possibles à un comportement, Weiner et ses collaborateurs vont non seulement considérer



le caractère interne ou externe d’une attribution



son caractère stable vs. instable,



son caractère contrôlé vs. incontrôlé. Les deux derniers critères s’inscrivent chacun dans un continuum allant respectivement : de la stabilité à l’instabilité ; et du contrôlable (intentionnelle) à l’incontrôlable (non intentionnelle). Appliquées à une situation de réussite à u n exam en un iversi ta ire, les explications pourraient alors être reparties comme ci-après :

3.LES BIAIS ATTRIBUTIFS

3.1. ERREUR FONDAMENTALE D’ATTRIBUTION (ROSS, 1977) Il s’agit de la tendance générale des observateurs à sous-estimer le rôle des causes situationnelles (externes) dans leur explication des comportements, cela au profit des causes dispositionnelles (internes). Expérience de Ross, Amabile et Steinmetz (1977) Dans cette expérience, les participants étaient aléatoirement répartis dans trois rôles différents : •

Un participant était désigné comme le "questionneur" : il posait donc des questions qu’il construisait lui-même en fonction de ses propres connaissances, compétences et centres d’intérêt



Un participant était désigné comme le "questionné" : il répondait aux questions du questionneur – questions pour lesquelles il ne connaissait de fait pas toujours la bonne réponse



Les autres participants constituaient le public L’expérience débutait par la répartition au hasard des rôles. Quelques minutes étaient données au questionneur pour la préparation des questions. Puis, débutait la séance de questions-réponses. Le questionneur notait les bonnes réponses du questionné et le corrigeait en cas de mauvaise réponse. A la fin de cette phase de l’expérience, le public était invité à répondre à la question suivante : "Quel est, selon vous, le plus cultivé des deux : le questionneur ou le questionné ?" Les deux participants ayant occupé l’un de ces rôles étaient également amenés à évaluer leur propre culture générale, ainsi que celle de l’autre participant.

Résultats: les participants, quel que soit le rôle qu’ils occupaient, estimaient majoritairement que le questionneur avait une meilleure culture générale que le questionné. Conclusion: Ross et ses collègues en ont ainsi conclu que pour expliquer un comportement, les personnes, qu’elles soient observatrices ou même actrices de la situation, ne prenaient pas toujours en

com p t e l es fa ct eu rs ex p l i ca ti f s l i és à l’environnement (la situation), ici incarnés par les rôles occupés du questionneur et du questionné. Ils ont qualifié ce biais : l’erreur fondamentale d’attribution. Supports complémentaires Voir vidéo Erreur fondamentale d’attribution 3.2. BIAIS DE CORRESPONDANCE (JONES & HARRIS, 1967) Tendance des gens à attribuer le comportement d’autrui à des caractéristiques personnelles (internes, dispositionnelles), et cela même lorsque le comportement découle plus probablement d’une contrainte situationnelle (cause externe). 3.3. EFFET ACTEUR-OBSERVATEUR (JONES & NISBETT, 1972) Tendance de l’auteur d’un comportement a attribué son comportement à une cause externe (la situation par exemple), mais à attribuer un même comportement émis par autrui aux caractéristiques de cette personne (attribution interne).

3.4. ERREUR ULTIME D’ATTRIBUTION (PETTIGREW, 1979) Un comportement négatif (e.g., un acte violent) fait davantage l’objet d’une attribution interne (dispositionnelle) s’il est commis par un membre d’un exogroupe (e.g., ils ont la violence dans le sang), alors qu’il sera davantage expliqué par des causes externes (situationnelles) s’il est commis par un membre de l’endogroupe (e.g., il a été provoqué, il a été obligé de se défendre). A l’inverse, un comportement positif fait davantage l’objet d’une attribution externe s’il est commis par un membre de l’exogroupe, alors qu’il sera davantage expliqué par des causes internes s’il est commis par un membre de l’endogroupe. 3.5. BIAIS CONFIRMATOIRE DE SOI (KULIK, SLEDGE, & MAHLER, 1986) Les acteurs d’un comportement ont tendance à attribuer le comportement à des causes externes si ce comportement n’est pas en accord avec l’image qu’ils ont d’eux-mêmes. Si le comportement correspond à cette image, alors l’attribution sera davantage interne.

4. LE POIDS DE LA SOCIETE ET DE LA CULTURE Pour certains auteurs, les biais décrits précédemment qu’ils soient motivés ou non, pourraient trouver leur origine dans une préférence véhiculée socialement. C’est ainsi que Beauvois (1984) a suggéré l’existence d’une norme appelée la norme d’internalité sous-tendant l’explication causale des évènements et des comportements observés. L’existence de cette norme aurait pour conséquence l’erreur fondamentale d’attribution (Beauvois & Dubois, 1988, 1991). Derrière elle se dégage l’idée d’une valorisation socialement apprise des explications internes au détriment des explications externes. La société nous apprendrait donc très jeune à accentuer le poids de l’acteur comme facteur causal. Certaines recherches ont suggéré que les explications internes des comportements sont davantage socialement désirables, qu’elles font l’objet d’un apprentissage et qu’elles sont plus souvent sélectionnées par les groupes favorisés sur le plan socio-économique. Notons que si des différences sont possibles au sein d’une même culture, de grandes différences s’observent également entre des cultures différentes. Par exemple, Miller (1984) a montré qu’en Occident, plus les personnes avancent en âge, plus elles sont internes. En Inde, en revanche, l’inverse est observé : plus les personnes vieillissent, plus elles fournissent des explications externes. L’auteur interprète cette différence d’attribution comme le résultat de facteurs culturels ou religieux encourageants les personnes âgées, en Inde, à devenir de plus en plus fataliste et les occidentaux à se montrer de plus en plus confiants dans leur sentiment de contrôle. Dans un autre domaine, des chercheurs ont montré que deux journaux New-Yorkais (l’un en langue anglaise, l’autre en langue chinoise) rendaient compte différemment de deux crimes. Les explications avancées dans le journal de langue anglaise étaient essentiellement de type interne, alors qu’elles renvoyaient plutôt à des explications situationnelles dans le journal de langue chinoise. Ces résultats tendent à confirmer l’hypothèse selon laquelle, par exemple, l’erreur fondamentale d’attribution reflèterait une théorie implicite du comportement social qui est plus répandue dans les cultures individualistes que dans les cultures collectivistes....


Similar Free PDFs