2. Pathologies limites de l’enfance - Leroy PDF

Title 2. Pathologies limites de l’enfance - Leroy
Course Psychopathologie 2
Institution Université de Lille
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Leroy...


Description

Pathologies limites de l’enfance Très schématiquement, c’est à peu près la même chose que les états limites de l’adulte, ce ne sont ni des psychoses ni des névroses mais entre les deux. Les cliniciens d’orientation analytiques ont manifesté un intérêt important pour des tableaux cliniques qui se situent entre névrose et psychose. Ces pathologies comportent à la fois des symptômes psychotiques et des symptômes névrotiques. On peut avoir une organisation de ces symptômes qui varie considérablement pour chaque enfant. On a une quarantaine de termes utilisés pour ces formes atypiques selon les auteurs et le type de pathologie comme pathologie limite, pathologie narcissique, pathologie anaclitique, personnalité en faux self ou personnalités schizoïdes. Certaines de ces dénominations posent la question des limites, souvent plus la limite avec la psychose. Quand on parle de pré-psychose, on ne dit pas juste qu’il est entre la psychose et la névrose, on pose une hypothèse d’évolution vers la psychose. On parle aussi de para-psychose. De l’autre côté, du côté des névroses, on retrouve des expressions comme pré-névroses ou états pseudo-névrotique. La difficulté est que si on reste à un niveau purement sémiologique, on aura du mal à classer tout ça d’où l’accent à porter sur les aspects communs. L’expression pathologie limite vise à recouvrir l’ensemble des formes repérables entre psychose et névrose. Sachant que ces formes sont variées et que l’intérêt pour les unifier se fait plus au niveau psychopathologie pour le faire.

I. Notion de pathologie limite chez l’enfant et état limite chez l’adulte Le terme état limite est bien individualisé, il est constitué à partir d’un adulte, de quelqu'un qui a une personnalité déjà structuré. La notion d’état est proche de quelque chose de statique. Le terme de pathologie limite a été retenu pour l’enfance afin de souligner et rappeler les potentialités évolutives qui sont beaucoup plus diversifiées chez l’enfant de jeune âge. Une autre raison est que le pronostic est plus favorable a priori à condition de pouvoir intervenir au bon moment d’om l’intérêt d’un repérage clinique précis et d’intervenir avec des moyens adaptés. Il y a aussi l’influence qu’exercera l’adolescence avec des risques de fixation ou de rupture. L’adolescence va particulariser le tableau clinique des pathologies limites. Les principes paraissent cohérents mais quand on essaye de fixer les frontières. Du côté des névroses, le tableau clinique est souvent trompeur, les symptômes et le mécanisme de type névrotique peuvent occuper une place importante alors que sur le plan de son développement psychoaffectif, l’enfant n’accède pas véritablement à une configuration œdipienne qui est normalement structurante, signe de la névrose. Sous des dehors d’allure névrotique, il y a une structuration psychique qui est en deçà de la névrose. Du côté de la psychose c’est aussi complexe. Il faut souligner la distinction entre le registre du psychotique et le registre de l’archaïque. Dans le registre archaïque, c’est beaucoup plus sur les questions de dépendance, d’autonomie qu’on a l’accent. On a aussi un accent prioritaire sur des mécanismes de défense archaïques comme le déni, la projection, le

retournement contre soi avec des comportements auto agressifs et le retournement en son contraire. Dans ce registre, il y a aussi des défaillances qui portent notamment sur l’intériorisation, des interdits, du bon objet mais aussi des défaillances de la représentation, de la pensée elle-même, défaillances aussi au niveau des liaisons intra-psychiques comme lors du clivage. Ces modalités archaïques protègent manifestement l’enfant contre des angoisses très fortes mais s’avèrent couteuses sur le plan psychique. Ça l’empêche de recourir à des aménagements plus évolués, plus souples, propres à la névrose. Dans la psychose, le rapport à l’autre est fusionnel, il y a donc parfois un processus antiobjectal : l’autre est annulé en tant qu’autre. Dans la pathologie limite, il n’y a pas de processus anti-objectal. Dans les pathologies limites, il y a une distinction entre la réalité interne et la réalité externe. Il y a donc une différenciation entre soi et non soi. On a aussi la possibilité de capacités adaptatives étendues avec une nuance que c’est un signe d’ouverture mais qui se développe plutôt en secteur : possibles dans certaines dimensions et beaucoup moins dans d’autres.

II. Motifs de consultation Il y a une grande diversité. On a souvent des troubles somatiques comme les troubles de l’alimentation, du sommeil, du contrôle sphinctérien mais aussi pour des retards de développement ou encore pour des dysharmonies dans le développement avec certains aspects normaux et d’autres plutôt en retard. Par la suite, avec l’enfant plus grand, on aura plutôt les troubles du comportement comme l’agitation avec des phénomènes de débordement qui se traduisent par l’instabilité, l’agitation, l’agressivité ou à l’inverse la tendance au repli, au retrait et à l’inhibition. Des auteurs mettent en avant la dépression. Chez l’enfant, cette dépression qui est une conséquence de la pathologie limite peut se traduire par le repli l’isolement et l’inhibition mais aussi par une instabilité. Ces phénomènes de débordement peuvent être la représentation de symptômes dépressifs. On peut voir l’émergence de conduites névrotiques avec des obsessions, des rituels, des phobies notamment les phobies scolaires assez graves ce qui peut traduire une certaine vulnérabilité par rapport à la perte d’objet. Dans la majorité des cas, ce sont les troubles des conduites qui constituent la première occasion de rencontre notamment lorsqu’ils s’expriment à l’école avec des enfants perturbateurs mais aussi des comportements qui les conduisent à l’échec scolaire. Les symptômes envisagés isolément ne sont pas en eux-mêmes évocateurs, on peut retrouver des motifs de consultation comparable dans d’autres troubles psychopathologiques d’autant plus que le mode d’expression des troubles et leur regroupement peut varier d’un enfant à l’autre. Il existe aussi des formes avec des symptômes peu manifestes au début mais où la souffrance de l’enfant est réelle et se manifeste par quelques signes et a fait l’objet de contre investissement assez massif de l’entourage mais plus dans la visée de réduire au silence cette souffrance de l’enfant ce qui masque les choses. Ça soulève la question de certaines pathologies limites de formes latentes mais à extériorisation tardive notamment dans les rapports à l’adolescence. Pour un sujet donné, les symptômes varient avec l’âge. Chez certains, l’instabilité du début va laisser place à un renfermement, un repli quand l’enfant va grandir. On a aussi l’inverse.

III. L’étude psychopathologique Seule l’étude psychopathologique peut relier les symptômes à l’organisation interne de la pathologie limite de l’enfant.

A. Les défauts de l’étayage Ces défauts sont la règle selon certains auteurs. On les retrouve par l’anamnèse. Tantôt ils sont manifestes avec des situations de ruptures, dissociation familiale, des placements, des hospitalisations. Parfois, c’est moins évident et plus subtile. Il se dégage plutôt de la personnalité des parents et de l’appréciation de la place faite à l’enfant dans la structure familiale. Ça relève de la personnalité des parents elle-même. On relève l’insuffisance des apports affectifs de la part des parents vis à vis de l’enfant et des défauts d’ajustements dans des périodes qui exigent une étroite adaptation auprès de l’enfant. L’enfant peut faire preuve de capacités d’adaptation, de rétablissement même si ces capacité se développent de façon dysharmonique, en secteur. Il ne faut pas forcément tout de suite parler de résilience. L’enfant développe un certain nombre de défenses, des protections qui sont contraignantes, développées très tôt et dans l’urgence. Ces protections agissent plutôt dans l sens du colmatage, de la réparation en urgence plutôt que de réparer ce qui a manqué. Ces protections font obstacle au développement harmonieux de l’enfant, le développement intégratif, en intégrant des capacités, des dimensions de son environnement pour en faire une unification. Il en découle des défaillances dans l’appropriation d’un certain nombre de mécanismes psychiques, notamment dans ce qui assure l’individuation et la maîtrise de la symbolisation et des difficultés dans l’accès à la vie fantasmatique, bref, l’imaginaire. Intérieurement, les choses sont difficiles à mettre en place

B. Les défauts d’élaboration de la fonction de contenance La mère (psychanalytique) assure ce qui est de l’ordre des apports affectifs, s’occupe de l’enfant et le préserve d’un certain nombre d’excitations qui seraient trop forte pour lui, elle a un rôle de pare-excitation. Dans le psychisme de l’adulte, ce système pare-excitation permet de ne pas être en prise directe, traumatisé par le réel. L’enfant quand il est tout petit n’a pas ce système, ce qui est fait office de protection, c’est la mère. La mère lui permet d’intégrer et digérer un certain nombre de choses que seul il ne pourrait pas assumer. Dans les pathologies limites, les auteurs font l’hypothèse que la mère n’aurait pas assumé pleinement ce rôle là ce qui aura pour conséquence que l’enfant va se trouver en prise directe avec ce qu’il ne peut pas intégrer et il ne parviendra pas à intégrer cette fonction de contenir. L’enfant ne parviendra pas à se protéger lui-même en grandissant. Il échoue donc partiellement dans l’intériorisation de cette fonction. L’enfant reste soumis au risque de débordement de l’extérieur et de l’intérieur. Il va être sensible à tout et n’importe quoi et ne pourra pas contenir ses pulsions. Il sera débordé par des excès de tension interne. Ces excès vont altérer l’organisation de sa vie psychique et de sa vie mentale.

C. Défaut de la transitionnalité L’enfant construit ses représentations de façon toute puissante dans une aire d’illusion dans laquelle peut se développer toute sa créativité. Ultérieurement, en grandissant, il est amené à reconnaître que l’objet de la réalité est déjà là, qu’il ne l’a pas produit par son imaginaire et qu’il n’obéit pas à sa volonté. Ça conduit à une certaine désillusion qui est nécessaire. Il va voir la réalité un peu telle qu’elle est. A partir de là, l’enfant aura recours à des objets subjectifs. L’enfant échappe à un double danger : le danger de l’intrusion de la réalité, des objets du monde réel en lui et le danger qui consisterait à une pure et simple négation de la réalité, de cet objet. Cette construction de l’objet lui permet de ne pas nier la réalité et de ne pas être écrasé par elle. Dans la pathologie limite, l’enfant reste pris dans un dilemme et reste soumis aux angoisses d’intrusion. Faute de pouvoir construire les objets subjectifs, il va être angoissé par les objets de la réalité, ce sont aussi les angoisses de vidange. Parallèlement, persiste la toute puissance première. D’un côté, on a les angoisses d’intrusion par la réalité qui risque d’écraser l’enfant et parallèlement le maintien de la toute puissance à laquelle il ne peut pas renoncer. L’objet transitionnel a une valeur affective, c’est ce qui tient lieu de la présence maternelle. C’est un objet qui a une valeur affective et symbolique. C’est un objet du monde réel qui est peu à peu intériorisé par l’enfant. Il pourra lui aussi se séparer de l’objet transitionnel. Il permet de se séparer progressivement de la dépendance à la mère. Ces objets subjectifs et transitionnels sont un peu la même chose. Chez des enfants limites, les objets font défaut. Dans d’autres situations, ils sont présents mais d’apparition retardée, dans d’autres, ce sont des objets moins investis qui sont plus changeants que l’enfant ne cherche pas à posséder. Du côté de l’entourage, l’entourage n’est pas sensible à la fonction de ces objets. La mère entretient souvent avec l’enfant des modes d’emprise, une relation exclusive à son enfant qui le détourne de la construction de l’objet transitionnel puisqu’au fond, elle en fait ce qu’elle veut, les fait apparaître, disparaître, les change. Il y a une toute puissance maternelle qui prend la place de la construction de l’objet transitionnel. L’aptitude à jouer seul est mise en défaut. Même quand il peut jouer, l’enfant ne prend pas véritablement plaisir à son jeu, il s’efforce de faire participer son entourage à son jeu pour capter l’entourage dans des jeux qui deviennent plus ou moins ritualisés. L’imaginaire n’est pas vraiment développé, utilisé. Le jeu est un moyen de projeter, de construire l’imaginaire. Les réponses de l’entourage, des parents apportent à l’enfant un mélange de satisfaction et de manque qui permet à l’enfant d’organiser des séquences relativement maîtrisables, qui lui permet des introjections durables, notamment de l’objet maternel qui permet d’être seul et de se sentir en sécurité psychiquement. Ces bases sont indispensables pour que la vie fantasmatique, la vie imaginaire de l’enfant puisse acquérir une fonction signifiante, pour qu’elle permette l’accès au plaisir (autonome). Ces distorsions dans la transitionnalité peuvent se relier aux difficultés que l’enfant éprouve pour sortir d’une dépendance anaclitique, qui prend appui sur quelque chose. C’est parfaitement normal et nécessaire à un âge précoce que l’enfant prenne appui sur la dépendance de la mère mais il doit en sortir à un moment. Un certain nombre de blessures

narcissiques dont l’enfant a du mal à se défaire et qui ont des effets dans la mesure où l’enfant a un retrait libidinal, qu’il va se replier sur lui-même et maintenir la relation avec la mère sur le mode d’une relation de dépendance et d’emprise. La fonction du jeu est aussi d’assimiler l’absence, de se rendre maître psychiquement parlant de cette absence, c’est en lien avec le jeu de la bobine ou du « Fort-Da ». Ces défauts laissent des traces durables dans la construction. Il va en résulter la problématique de l’absence qui occupe une place centrale dans la psychopathologie des organisations limites de l’enfant.

D. Défaut d’élaboration de la position dépressive La position dépressive est une notion qui a été abordée par Mélanie Klein. Cette position dépressive est normale pour le développement de l’enfant. C’est un moment structurant. Avant cette position dépressive, l’enfant (de 0 à 6 mois) vit dans un monde marqué par une sorte de morcellement, d’éclatement avec un clivage entre ce qui est bon et pas bon, il n’y a pas de nuance. Ça vaut aussi pour le même objet. Par exemple, il y a la bonne mère qui satisfait ses besoins rapidement, au bon moment et d’un autre côté, il y a la mauvaise mère qui ne répond pas assez vite, qui le frustre. Pour l’enfant, l’hypothèse c’est qu’il y a une séparation très nette entre le bon objet et le mauvais objet. Il arrive un moment où ces deux objets vont se rassembler. L’enfant va devoir se réorganiser. L’enfant va accéder à une certaine forme de culpabilité, qui va donner lieu à des conduites de réparation. Dans les pathologies limites, du fait des défaillances de l’étayage qui s’accentuent au moment de la phase dépressive car l’accès de l’enfant à une autonomie propre ferait peser une sorte de menace sur le narcissisme de la mère. On a alors la vulnérabilité à la perte d’objet qui devient problématique chez l’enfant mais aussi chez la mère. L’enfant ne parvient pas intégrer les angoisses dépressives et les angoisses de séparation, il ne parvient pas à dépasser l’ambivalence. L’écart entre la réalité psychique et la réalité externe reste fluctuant et précaire. Cet écart s’établit souvent plutôt en secteur. Ces écarts ne lui permettent pas d’acquérir la résolution de ses conflits internes et l’intégration de sa propre agressivité. Il pourra y avoir des mesures de répression très fortes donnant un enfant plutôt inhibé. L’enfant est toujours la proie de débordements. La mère est tout de même reconnue comme objet total. La différenciation entre soi et non soi est acquise dans la pathologie limite contrairement à la psychose. On a la prédominance des angoisses dépressives, de séparations de perte d’objet contre morcellement, néantisation et vide dans la psychose. La dépression occupe une place centrale dans ce tableau clinique au sens profond de la psychopathologie même si du point de vue clinique, cette souffrance dépressive est rarement perçue comme telle au sein de l’entourage. L’enfant lui-même ne va pas le manifester ou l’exprimer comme ça. On est donc amené à rechercher les expressions habituelles de la dépression dans tout ce qui est affects terribles, absences d’idées et les expressions somatiques. Dans certaines formes, c’est plutôt le retrait qui peut être accentué.

C’est aussi un échec des investissements libidinaux et affectifs de l’enfant. Tout ça peut aboutir à un ralentissement majeur. On a ainsi le syndrome du comportement vide qui a été décrit. C’est un syndrome qui inclut une forme de désaffectisation, de désinvestissement de l’autre, de l’objet. Il y a une certaine fixation aux aspects les plus factuels, concrets de l’ambiance, un certain renfermement dans les relations qui sont assez dévitalisées et des activités de ruminations stéréotypées qui ont pour fonction de combler le vide interne. Chez d’autres enfants, la confrontation à ce vide, c’est aussi une confrontation à un sentiment d’inutilité. On aura des idées de préjudice, d’injustice qui vont se traduire par des réactions agressives. L’enfant n’est pas dans une relation purement duelle comme avec la psychose. Il est possible d’ouvrir à une relation triangulaire œdipienne avec certaines limites tout de même. Elle se manifeste surtout en secteur et de manière partielle. Le père a une place mais il est surtout utilisé dans une visée défensive contre une relation maternelle que l’enfant perçoit comme une relation dominante avec des angoisses et menaces d’engloutissement et d’intrusion. André Green a souligné les effets de cette configuration dans le domaine de la pensée dans la mesure où l’absence est impossible à constituer. D’une part, parce que l’objet maternel ne peut pas être introjecté de manière suffisamment durable par l’enfant, ou encore parce que l’objet maternel entre de manière intrusive dans l’espace psychique de l’enfant. Ça mobilise des contre investissements de l’enfant pour se protéger ce qui nécessite une énergie considérable. C’est dans l’absence de l’objet que se forme la représentation de l’objet. Ce qi arrive dans ce cas, c’est la menace d’une confrontation au vide, ce qui est intolérable pour l’enfant qui va maintenir une relation à l’autre particulière pour s’en défendre qui prend la teinte d’une relation au mauvais objet....


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