4ème partie (Les marques de subjectivité dans le langage) PDF

Title 4ème partie (Les marques de subjectivité dans le langage)
Author Léa Pippinato
Course Linguistique textuelle - Analyse du discours de presse
Institution Université Paul-Valéry-Montpellier
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Summary

Il s'agit d'un cours portant sur les marques de subjectivité dans le langage....


Description

4ème partie : Les marques de subjectivité dans le langage

L’énonciation : quelques rappels

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Énonciation = acte de production d’un message oral ou écrit, énoncé = produit qui résulte de cet acte de production  étudier l’énonciation = réalisation vocale de la langue (phonétique et analyse de conversation) et mécanisme de production (conversion individuelle de la langue en discours avec sémantique, sémiologie, analyse du discours…)

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Selon BENVENISTE (premier linguiste français ayant vraiment étudié l’énonciation)  prise en charge du message transmis par le locuteur, il a une forme de responsabilité énonciative envers les allocutaires + le locuteur est en relation constante et nécessaire avec son énonciation

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Selon BENVENISTE  les indices de personne ne se produisent que dans et par l’énonciation  corrélation de personnalité (ex : « je », « tu » sont des personnes VS « il », « ça » qui sont des pronoms représentants utilisés pour désigner quelqu’un ou quelque chose d’extérieur) et corrélation de subjectivité (ex : « je » = première personne, = locuteur et « tu » = deuxième personne = allocutaire + possibilité d’inverser le rapport de force, le locuteur devient allocutaire et inversement)

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L’énonciation relie l’énoncé à des paramètres comme le cadre spatial (« l’ici ») et temporel (« le maintenant ») dans lequel le message est produit, les protagonistes de l’échange, les indices de l’ostension (=ce qui permet de montrer ou de se montrer) comme « ceci » ou « voici », qui sont appelés termes déictiques (servant à désigner)

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Dans le discours de presse, peu de marques explicites de la personne comme « je » ou « tu » (sauf dans les discours rapportés comme les interviews, les reportages…), beaucoup de marques du cadre spatial (« ici », « dans notre ville », « dans le pays ») et temporel (« maintenant », « aujourd’hui », « il y a trois jours »)

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L’énonciation donne les conditions nécessaires aux modalités de phrases  ex : l’interrogation = énonciation construite pour susciter une « réponse »  « je » demande et « tu » dois satisfaire à l’obligation de répondre  dans la presse écrite, les titres interrogatifs n’exigent pas une réponse des lecteurs, ils anticipent en fait une question du public, l’injonction = ordres impliquant un rapport vivant et immédiat du locuteur à l’allocutaire  dans la presse écrite, les titres injonctifs fonctionnent comme un conseil ou comme un pense-bête informatif, l’assertion = vise à communiquer une certitude

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À l’écrit, les termes déictiques (qui permettent de désigner) ne peuvent pas fonctionner de manière autonome  ex : effacement d’adverbes comme « ici » et préférence pour un centre déictique élargi commun à tous comme « dans tout le pays », « sur la côte » et plus objectives comme « à 2h d’avion de Paris »

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Modifications du centre déictique à l’écrit : décalage du centre déictique temporel  le rédacteur projette le centre déictique temporal au moment de lecture, l’éloignant ainsi du moment d’écriture de l’article (ex : « aujourd’hui » du point du vue du lecteur correspond parfois à ce qui devait se dérouler hier pour le rédacteur), extension du centre déictique temporel  en fonction de l’attention portée à un évènement (ex : « la semaine dernière », « ces deux derniers jours »), modification du centre déictique personnel (le « je » reste essentiel à l’écrit mais s’indexe sur la signature, non sur le corps d’un locuteur en chair et en os  très rare dans la presse écrite car souci d’objectivité et parfois remplacé par des tournures impersonnelles)

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« On » est un pronom nominal, toujours sujet, qui réfère directement à un être humain indéterminé, plusieurs significations  « On » = tout le monde, « on » = certaines personnes dont vous, lecteurs, faites partie, « on » = certaines personnes dont moi, énonciateur, fait partie sans le reconnaître, « on » = certaines personnes avec qui, moi, énonciateur, ne suit pas d’accord mais que je ne veux pas nommer

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Même si rare dans la presse écrite, « je » peut se maintenir dans les genres du commentaire où le scripteur doit construire son identité énonciative  « je » = marque d’engagement et de sincérité

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Dans la presse écrite qui prétend au sérieux, effacement du « vous »  le lecteur est représenté par de la non-personne à laquelle il est libre de s’identifier ou non (ex : le consommateur, les touristes…) + le « vous » est parfois implicite (ex : « À Stuttgart, impossible d’éviter… » = c’est une façon de ne pas écrire « Vous ne pourrez pas éviter… »)

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Dans la presse de proximité, forte injection du « vous »  ex : titres de rubriques comme « votre santé », « vos vacances » ou bien impératif comme « Apprenez à sauver des vies ! » + possibilité de travestir le « vous » en 1ère personne (ex : « Couple : J’évite les pièges »)

Conclusion étape

Dans la presse écrite, les modifications de la deixis (personnelle, temporelle, spatiale) n’affectent pas le sens même des déictiques dans la langue, mais leurs conditions d’emploi en discours. L’énonciation écrite s’appuie donc généralement sur des informations où le cotexte (c’est-à-dire le contexte verbal) doit coopérer avec le contexte (terme qui désigne la situation de communication). À l’articulation des deux, le péritexte joue un rôle essentiel : les photos peuvent servir de contexte situationnel, tandis que les éléments verbaux du péritexte servent tantôt à définir la situation de référence, tantôt à fonder les informations que reprendra l’article (effet de cotexte).

Les termes axiologiques

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L’acte d’énonciation comporte le choix de certaines unités lexicales que propose la langue  l’énonciateur choisit entre deux types de formulation : le discours objectif (essaie d’effacer les traces de l’existence d’un énonciateur individuel) et le discours subjectif (l’énonciateur s’auto-désigne en énonçant « je » ou porte un jugement en exprimant implicitement sa subjectivité : ex : « c’est moche »)

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Un axiologique = un mot qui exprime un jugement de valeur, soit appréciatif, soit dépréciatif  vient du grec « axio » = estimer, juger et « logos » = mot, parole

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Un terme est axiologique s’il contient un trait positif ou négatif + possibilité de le mettre en balance avec d’autres termes désignant le même objet de manière neutre  ex : « un taudis » = trait négatif + mise en balance avec « un logement » (terme neutre)

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Les axiologiques sont : des adjectifs (ex : moche), des noms (ex : un taudis), des adverbes (ex : magnifiquement) ou des verbes (ex : cafter)  le vocabulaire axiologique apparaît dans tous les types de textes, mais il abonde dans les textes argumentatifs

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L’opposition n’est pas binaire mais graduelle (selon une échelle)  ex : les termes « célibataire », « jaune », « petit » et « bon »  l’adjectif « bon » implique l’énonciateur plus fortement que « petit » (« petit » répond davantage à une norme communément admise), « jaune » est plus objectif que « petit » tandis que « célibataire » ne fait pas du tout appel à la subjectivité

Insérer schéma ici -

Le degré de subjectivité varie d’un énoncé à un autre, en fonction de l’environnement dans lequel le discours a été produit  ex : les petites annonces pour trouver un partenaire lorsqu’on est célibataire implique

une forte dose de subjectivité tandis que d’autres styles, comme les analyses économiques, en comportent moins (mais il y en a tout de même : ex : « développement durable », « redressement productif »  les termes « durable » et « productif » ne sont pas axiologiques en euxmêmes, c’est le contexte dans lequel ils sont employés = celui de l’analyse économique qui les rend subjectives)

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Certains noms sont axiologiques car dérivés d’adjectifs axiologiques  ex : « la bonté » est dérivée de « bon », « la laideur » est dérivée de « laid » …  certains noms sont axiologiques sans dérivation  ex : « un génie », « un imbécile » …

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Les noms axiologiques apportent deux informations  catégorisation de l’individu désigné + jugement émis par l’énonciateur  ces noms disent deux choses : ils disent quelque chose sur l’individu désigné (qui est vrai ou faux) + ils disent quelque chose sur l’énonciateur (s’il apprécie ou déprécie ce dont il parle)

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Plusieurs cas pour les noms axiologiques : le trait axiologique se situe dans la forme du mot (ex : un suffixe comme « ard » avec chauffard, trouillard…), le trait axiologique se situe dans le terme lui-même (ex : « tacot » ajoute au terme « voiture » un trait de mauvaise qualité, vieux…) ou le trait axiologique provient d’un marqueur (marqueurs d’injure, de mépris, comme « espèce de »)

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Les adjectifs axiologiques reposent sur une évaluation basée sur une norme  système de valeurs assez largement partagé  ex : « grand pour un enfant de 4 ans », « chaud pour la saison » ou le cas des adjectifs affectifs  expriment une propriété de l’objet et une réaction émotionnelle du locuteur  ex : « un terrible accident » = indique que l’accident est meurtrier mais aussi l’émotion du locuteur face à l’évènement

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Les verbes peuvent être occasionnellement subjectifs ou constamment subjectifs  si occasionnellement subjectifs, ne sont subjectifs qu’à la 1ère personne (ex : « je souhaite… » = c’est « je » qui exprime sa subjectivité) et si constamment subjectifs, le sont à toutes les personnes (ex : « prétendre » … = quelle que soit la personne, l’énonciateur porte un jugement de fausseté sur l’énonciation)

Remarque : Dans la grammaire moderne, avec par exemple Laurent GOSSELIN, l’axiologie est considérée comme faisant partie de la modalisation (= tous les mots et groupes de mots qui montrent un jugement ou un sentiment de la part de l’énonciateur) au même titre que l’épistémique (ex : « je sais », « je crois », « peut-être »  tout ce qui se

rapporte au savoir) ou que la déontique (ex : « tu dois partir », « tu peux », « il t’est permis »  tout ce qui se rapporte à l’obligation)

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Pour les verbes occasionnellement subjectifs, l’évaluation peut se faire sur un axe bon/mauvais avec les verbes de sentiment comme « aimer/détester », « apprécier/déprécier » et les verbes locutoires comme « critiquer », « complimenter », « féliciter » + l’évaluation peut se faire sur un axe vrai/faux avec les verbes de perception comme « avoir l’air », « sembler », « paraître » et les verbes d’opinion comme « croire que », « estimer que », « savoir que »...


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