5 Mobilité sociale - SES PDF

Title 5 Mobilité sociale - SES
Course Introduction aux Sciences Économiques et Sociales
Institution Université de Nantes
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Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Sociologie I.

La mobilité sociale a. Les différentes formes de mobilités (mobilité sociale /mobilité dans l’emploi / mobilité intragénérationnelle et intergénérationnelle / mobilité structurelle)

i. Définition de la mobilité sociale Dans une société, les positions sociales ne sont pas distribuées au hasard, mais dépendent étroitement de l’origine sociale des personnes ainsi que des évènements qui jalonnent leur existence, en particulier la fréquentation de l’école et l’insertion professionnelle . Le statut social ne se transmet pas de manière identique dans tous les groupes sociaux. Dans certains groupes sociaux, d’une génération à l’autre, les enfants changent massivement de catégories, du fait de stratégies individuelles ou familiales, ou encore à cause des contraintes liées aux changements sociaux. Toutes ces questions sont regroupées par les sociologues dans l’étude de la « mobilité sociale ». Mobilité sociale : Désigne le changement de position sociale d’un individu ou d’un groupe d’individus.

ii. Mobilité dans l’emploi  La mobilité géographique : Elle ne donne pas nécessairement lieu à un changement de niveau social, même si les migrations géographiques, internes ou externes à un pays sont très souvent liées à la mobilité sociale. Changer d’emploi, ou simplement trouver un emploi peut conduire à quitter la campagne (exode rural) ou son pays (émigration).  La mobilité professionnelle (dans l’emploi) : Elle peut consister à changer d’entreprise ou de type de travail sans impliquer nécessairement une modification de niveau social, même si changer de profession est un des moyens de passer à un autre statut social. Un cadre du secteur public qui devient cadre du secteur privé est un exemple de mobilité professionnelle.

iii. Mobilité au sein de la structure sociale Les différents types de mobilité possibles donnent lieu à une typologie établie par les sociologues. En premier lieu, on distingue mobilité verticale et mobilité horizontale. Mobilité verticale : Changement de position dans la structure sociale qui a pour effet une

progression ou une régression dans la hiérarchie sociale. Selon que l’on observe une élévation dans la hiérarchie sociale ou au contraire un déclassement le long de l’échelle sociale, on parle de mobilité sociale verticale ascendante ou descendante. Mobilité horizontale : Situation dans laquelle le changement de statut et de milieu ne détermine pas une progression ou une régression décisive dans la hiérarchie sociale.

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Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Sociologie Dans une usine productrice de vélos, lorsqu’un ouvrier devient contremaitre (superviseur du travail des autres), il connait une mobilité verticale ascendante. S’il change ensuite d’entreprise pour devenir contremaitre dans un abattoir, il connait une mobilité horizontale.

On distingue de plus mobilité intragénérationnelle et mobilité intergénérationnelle selon que la mobilité sociale se déroule au cours du parcours d’un individu, ou entre deux individus d’une génération à l’autre. Mobilité intragénérationnelle : Mobilité sociale en cours de carrière, lorsqu’un individu change de statut socioprofessionnel au cours de son existence d’adulte. Mobilité intergénérationnelle : Mobilité sociale qui se déroule entre deux générations d’un même groupe social. Le statut d’un individu est donc différent du statut de son milieu d’origine. On mesure souvent cette mobilité en comparant le statut professionnel d’un fils avec celui de son père.

Un individu dont les parents sont instituteurs et qui devient professeur des universités connait une mobilité sociale intergénérationnelle ascendante. S’il quitte ensuite son poste pour devenir enseignant dans un collège, il connait une mobilité intragénérationnelle descendante.

La mobilité individuelle a un sens différent si elle est exceptionnelle ou si tout le groupe auquel on appartient connait la même mobilité. Pour le mettre en évidence, on étudie la mobilité structurelle . Mobilité structurelle : Mobilité qui s’explique par les modifications de la structure socioprofessionnelle de la société. Tout un groupe d’individus a alors tendance à connaitre une même mobilité.

Le phénomène de tertiarisation provoque une diminution de l’importante quantitative du secteur primaire. Ainsi, d’une génération à l’autre, il y a de moins en moins d’emplois dans l’agriculture, et structurellement, de nombreux fils d’agriculteurs sont poussés à changer de métier. C’est un exemple de mobilité structurelle.

b. La fluidité sociale (statuts sociaux assignés ou acquis) i. La mobilité nette La mobilité nette a pour objectif de faire disparaitre la mobilité liée aux variations de

structures de la société (la mobilité structurelle), afin d’étudier uniquement la mobilité indépendante de la structure sociale , celle qui renvoie uniquement aux possibilités d’évolutions des individus dans la hiérarchie sociale. 2

Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Sociologie La mobilité nette se calcule par la différence entre la mobilité observée (brute) et la mobilité structurelle. Mobilité observée : Mobilité telle qu’elle est affectée par l’évolution de la distribution socioprofessionnelle des fils par rapport à celle des pères. C’est une mobilité réelle, telle qu’elle découle de l’examen des tables de mobilités. C’est donc la mobilité nette qui permet de mesurer l’égalité des chances, c'est-à-dire les possibilités

réelles qu’ont les individus d’évoluer dans la structure sociale.

ii. La fluidité sociale Faire la distinction entre la mobilité nette et la mobilité structurelle vise à répondre à l’interrogation sur les origines de la mobilité sociale, afin de savoir si elle provient d’une modification des

structures ou d’une véritable progression de l’égalité des chances entre individus d’origines sociales différentes. La mesure de la mobilité nette vise à quantifier la fluidité sociale, c'est-à-dire la fréquence et la facilité avec laquelle les individus peuvent changer de milieu social, indépendamment des changements de structure. Fluidité sociale : Mesure l’importance et la fréquence de la mobilité sociale au niveau de la société toute entière. Elle représente la force du lien entre origine et position sociale, indépendamment de l’évolution de la structure socioprofessionnelle.

Une société est d’autant plus fluide que la mobilité nette est élevée. Une société est au contraire rigide s’il y a peu de mobilité nette.

Une société fluide est une société où la position sociale des individus n’est pas déterminée par leur origine sociale. Il s’agit d’une société avec une forte mobilité nette, où tous les individus ont la même probabilité d’atteindre les diverses positions sociales, indépendamment de leur origine. Plus une société est fluide, et moins les positions socioprofessionnelles sont héréditaires.

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Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Sociologie Pour mesurer cette fluidité, on compare la probabilité pour deux catégories différentes de la population d’accéder à la même position sociale, à l’aide d’un instrument nommé « odds ratio ». Odds ratio : Rapport des chances relatives d’accès aux différentes positions sociales , c'est-àdire le rapport entre la probabilité pour un individu d’une catégorie A d’accéder à une certaine position sociale X plutôt qu’une autre position Y, et la probabilité pour un individu d’une autre catégorie B d’accéder à la même position sociale X plutôt que la position sociale Y. Plus il est proche de 1, et plus la société est fluide, car alors les individus issus de deux catégories d’origine différentes ont la même probabilité d’accéder à une certaine position sociale.

iii. L’égalité des chances On peut opposer les sociétés où les statuts sociaux sont affectés de manière prédéterminée, rigide et définitive à celles où les conditions d’accès aux statuts permettent des changements , c'est-àdire de la mobilité sociale. Dans le premier cas, on parlera de statuts sociaux « assignés », que les individus reçoivent de l’extérieur sans pouvoir les modifier, dans le second, de statuts « acquis », sur lesquels ils ont une certaine prise ou qui peuvent être l’objet d’une compétition ouverte, ce qui permet de changer de statut, ou de ne pas être enfermé dans celui que peut définir la naissance dans un milieu social. Dans une société de castes (Inde), les statuts sont assignés dès la naissance aux individus, car ils appartiennent à la même caste que leurs parents, et ce jusqu’à leur mort (phénomène de reproduction sociale).

La mobilité sociale est un enjeu politique : dans les sociétés où l’organisation politique se réfère à des principes démocratiques et l’organisation économique au libéralisme, il semble logique que l’égalité des citoyens et la liberté d’entreprendre correspondent dans le domaine social, sinon l’égalité des situations sociales… L’analyse de la mobilité sociale renvoie ainsi au principe de « l’égalité des chances », que les sociétés démocratiques et libérales se donnent pour principe. Ces sociétés peuvent chercher à évaluer la réalité ou l’efficacité de ce principe de fonctionnement en mesurant l’importance des flux de mobilité sociale qu’elles permettent. Lorsque la position sociale des enfants est peu dépendante de celle des parents, ce qui suggère que l’égalité des chances soit assurée, on dira que la société est fluide, ou mobile. Dans le cas contraire, la reproduction sociale est importante, et on parlera de rigidité ou de viscosité sociale.

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Comment rendre co ompte de la mobilité socialle ? Sociologie II.

La mesure de la mobilité sociale a. Les tables de mobillité sociale e destinée i. Les tables de Les tables de destinée renseiignent sur ce que deviennent les fils isssus d’un groupe

socioprofessionnel donné. Elles se lisent de la manière suivante : que deviennent (destinée) 100 fils issus d’une certaine catégorie sociale e ? L’origine est lue en colonne, et la destinéee en ligne. Par exemple, la colonne 1 regro upe tous les fils d’agriculteurs, et on lit sur chaquue ligne leur destinée.

Dans une table de destinée, le es nombres sur la diagonale représentent le nombre de fils qui ont eu la même destinée que leur père. (Par exemple, la première case en haut à gauche donnne la proportion de fils d’agriculteurs qui sont devenus agriculte eurs à leur tour). La proportion d’individus sur la diagonale indique donc le degré « d’immobilité sociale ».

mbres d’un groupe La table de mobilité permet de savoir ce que sont devenus les fils des mem socioprofessionnel. Ainsi, on peut lire qu’en q 2003, sur 100 fils de cadres et professions intellectuelles supérieures (CPIS) de 40 à 59 ans, 52% sont devenus eux-mêmes cadres, 8% sont devenus agriculteu rs, 9% sont devenus ouvriers.

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Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Sociologie ii. Tables de recrutement Les tables de recrutement renseignent sur la position sociale des pères des individus

composant un groupe socioprofessionnel, c'est-à-dire sur l’origine sociale . Elles se lisent de la manière suivante : quelle est l’origine sociale de 100 agriculteurs aujourd’hui, autrement dit, que faisaient les pères de ces 100 agriculteurs ? Là encore la diagonale répertorie les immobiles, c'est-à-dire ceux qui occupent une position sociale identique à celle de leur père. La lecture s’effectue horizontalement, par lignes.

b. Les limites des tables de mobilité (utilisation restreinte, évolution des générations, pertinence des critères, ressenti personnel, rôle des femmes) L’utilisation des tables de mobilité présente un certain nombre de limites à prendre en compte :  Les tables de mobilité sont basées sur la classification des « professions et catégories

socioprofessionnelles ». Or, seule la France utilise cette classification . Cela rend les comparaisons internationales de données obtenues à partir des tables de mobilité difficiles. Eurostat, l’institut de statistiques européen, essaie actuellement de mettre en place des normes européennes harmonisées afin d’y remédier.  Les tables de mobilité recensent les individus qui ont entre 40 et 59 ans. Ceci permet de saisir pour tous les individus leur position sociale au même moment de leur vie, en fin de carrière. Mais ce faisant, on ne tient pas compte de la mobilité intragénérationnelle , car les individus n’avaient peut-être pas la même position en début de carrière. De plus, celle limite de l’âge fait que l’on ne dispose pas d’indications sur la mobilité (intergénérationnelle) pour les générations les plus récentes, qui n’ont pas encore atteint 40 ans.  Les tables de mobilisé se basent sur l’appartenance à une PCS, mais ce n’est pas le seul indicateur du statut socioprofessionnel. Le type de contrat de travail est aussi important (contrat à durée indéterminé, à durée déterminée, interim, stage…). Par exemple, un fils de cadres (qui étaient en CDI) qui est lui-même cadre mais par interim connait un déclassement que les tables de mobilité assimilent à de l’immobilité sociale.

 Les tables ne permettent pas de prendre en compte le ressenti personnel (c’est lui qui pourtant donne des incitations sur l’égalité perçue) : ainsi être ouvrier en 2010 est moins valorisé qu’en 1970  Les tables sont traditionnellement basées sur les positions respectives des fils et des pères. Celles-ci

ne prennent pas en compte les filles et les mères, bien que l’on essaie de plus en plus d’élargir les relations étudiées. Elles sont notamment aveugles au lien entre la possession socioprofessionnelle du fils et celle de la mère. Or, il peut y avoir un lien non négligeable entre les 6

Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Sociologie deux, par exemple si la mère est bien dotée en capital culturel (diplômes) et incite son fils à faire des études longues.

La plupart des enquêtes de mobilité sociale ne portent que sur les hommes . La justification technique de cet état de fait renvoie au choix de la profession comme indicateur de position sociale. Dans les sociétés occidentales d’après guerre, les femmes sont souvent inactives, ou actives seulement à certaines périodes de leur vie, avec des interruptions volontaires lors du mariage ou de la naissance des enfants. De ce fait, il a paru de les classer en fonction de la profession du chef de famille plutôt que de leur (éventuelle) profession personnelle. Malgré la forte augmentation de l’activité professionnelle féminine, cette justification garde une certaine pertinence, car la structure des emplois féminins est très différente de celle des hommes : rapporter la profession des femmes à celle de leur père donne ainsi des tableaux de mobilité qui ne peuvent avoir la même signification que ceux des hommes. Ils font nécessairement apparaitre plus de mobilité descendante, puisque le marché de l’emploi féminin est moins ouvert aux emplois supérieurs. Il s’agit là encore de différences structurelles qui ne préjugent pas de la fluidité. Il serait alors logique de construire des tableaux croisant la profession des femmes avec celle de leur mère, mais celles-ci appartiennent aux générations de faible activité professionnelle.

III.

Les déterminants de la mobilité sociale a. L’évolution des structures i. La mobilité structurelle

L’évolution de la structure socioprofessionnelle renvoie à la mobilité structurelle . Les structures de production évoluent, ce qui fait nécessairement évoluer la structure sociale. Ainsi, la diminution du groupe ouvrier découle de la diminution de l’industrie dans le paysage productif français et de la tertiarisation, qui favorise en retour le groupe des employés, des professions intermédiaires et des cadres. De même, la diminution du groupe des agriculteurs est structurelle : les fils d’agriculteurs doivent trouver un autre emploi. Cette mobilité s’explique donc pas les impératifs liés à l’évolution de la structure productive et non pas par des stratégies volontaristes des individus qui voudraient changer de catégorie.

ii. Le paradoxe d’Anderson Un paradoxe concernant la mobilité sociale tient à la relation entre niveau de diplôme et emploi. C’est le « paradoxe d’Anderson », du nom du sociologue américain qui l’a mis en évidence en 1961.

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Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Sociologie Paradoxe d’Anderson : Il énonce que pour un individu, l’acquisition d’un diplôme supérieur à celui du père ne garantit pas une position sociale supérieure. Un individu peut obtenir un diplôme plus élevé que celui de son père et aboutir à une position sociale inférieure. Dans les sociétés modernes, le diplôme est souvent la clef de l’accès à l’emploi et à la

promotion dans l’entreprise. Pour les générations nées dans les années 1960, avec la massification scolaire, le nombre de diplômés a augmenté plus rapidement que le nombre d’emplois auxquels ils donnaient accès dans les catégories supérieures (cadres et professions intellectuelles supérieures). Alors, des diplômés de l’enseignement supérieur ont dû trouver des emplois qui demandaient un niveau de diplôme moins élevé que celui qu’ils avaient, en devenant par exemple employés. Au final, ils ont donc pu avoir une position sociale identique à celle de leurs parents (employés), alors même qu’ils avaient obtenus des diplômes de niveau supérieur. Leurs parents étaient en effet la génération née dans les années 1940, qui est arrivée sur le marché du travail dans les années 1960, durant les Trente Glorieuses, où il y a eu une explosion du nombre d’emplois alors que le nombre de diplômés était encore relativement faible. Le paradoxe d’Anderson invite donc à s’intéresser à la structure des emplois ainsi qu’à celle des diplômés correspondants pour comprendre les évolutions de la mobilité sociale. Du fait de changements structurels, la relation entre diplômes et emplois n’a pu évoluer.

b. Le rôle de la famille et de l’école dans la mobilité et la reproduction sociale i. L’inégalité des chances et la « reproduction scolaire » Assurer la fluidité de la société est un enjeu politique pour les sociétés démocratiques. C’est la raison pour laquelle depuis les années 1960, les gouvernements français ont voulu assurer « l’égalité des chances » de tous les individus en démocratisant l’accès à l’éducation. L’école est en effet vue comme le lieu où tous les individus peuvent avoir accès aux mêmes apprentissages et aux mêmes ressources, ce qui devrait permettre à tous d’avoir les mêmes « chances », donc la même probabilité d’occuper les diverses positions sociales, quelle que soit l’origine des individus. L’école républicaine devrait donc favoriser la mobilité sociale et la fluidité de la société. Pourtant, ce n’est pas ce que l’on observe dans les faits. Il existe bien une reproduction des positions sociales, de génération en génération, mesurée par exemple par les odd ratios. L’école échoue donc à empêcher la reproduction sociale, voire la favorise. Les sociologues se sont beaucoup penchés sur cette question, et on peut tirer de leurs travaux deux facteurs qui expliquent que la stratification sociale se reproduise de génération en génération malgré l’école :  Premièrement, le facteur des résultats scolaires, qui fait que les enfants issus de milieux favorisés réussissent mieux à l’école.  Deuxièmement, le facteur des choix d’orientation scolaire, qui fait que les enfants des milieux favorisés poursuivent leurs études plus longtemps, et dans des filières plus prestigieuses, qui leurs 8

Comment rendre compte de la mobilité sociale ? Sociologie assurent comme une position favorisée de façon analogue à leurs parents. Il y a des différences d’orientation selon le milieu d’origine, même lorsque les élèves ont les mêmes résultats.

Les sociologues français Bourdieu et Boudon ont tous les deux étudié cette question, selon des points de vue opposés. Bourdieu a prêté une attention particulière à la transmission des capitaux dans la

fa...


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