ARRÊT 4 PDF

Title ARRÊT 4
Author INES BELHADJ
Course Droit administratif approfondi
Institution Université Lumière-Lyon-II
Pages 7
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COMMENTAIRE D’ARRÊT DIRIGÉ N° 4 Commentaire comparé : CE, Section, 3 décembre 1999, Association ornithologique et mammologique de Saône et Loire et Association France nature environnement (deux affaires) ; CE, 25 janvier 2002, Ligue pour la protection des oiseaux

Jurisprudence à citer : - CE, Ass., 30 mai 1952, Dame Kirkwood, n° 16690, Recueil Lebon p. 291. - CE, 20 octobre 1989, Nicolo, n° 108243, Recueil Lebon p. 190. - CE, Ass., 28 février 1992, SA Rothmans International et SA Philipp Moris France, n° 56776-56777. - CE, 7 décembre 1984, Fédération française des sociétés de protection de la nature, n° 41971 et 41972. - CJCE, 19 janvier 1994, Association pour la protection des animaux sauvages c/ Préfet de Maine-et-Loire et Préfet de Loire-Atlantique), Affaire C-435/92, Recueil de jurisprudence 1994, p. I-00067. - CE, Ass., 3 février 1989, Cie Alitalia, n° 74052. - CE, Ass., 22 décembre 1978, Min. de l’Intérieur c/ Cohn-Bendit, n° 11604. - CE, 27 février 2004, Ligue pour la protection des oiseaux et autres, n° 224850. - CE, 5 juillet 2004, Ligue pour la protection des oiseaux et autres, n° 264010.

Corrigé proposé L’intégration en droit interne français des normes communautaires ne va pas sans difficultés quant à leur application. Tel est le cas des directives par exemple, qui lient les Etats membres quant au résultat à atteindre uniquement. Ceux ci doivent alors transposer ces directives en droit interne en veillant bien à respecter les objectifs de la directive (art 189 du Traités des Communautés Européennes TCE). Ainsi les arrêts du Conseil d’Etat du 3 décembre 1999 « Association ornithologique et mammalogique de Saône et Loire et association France Nature Environnement » et celui du 25 janvier 2002 « Ligue pour la protection des oiseaux » portent tous deux sur l’applicabilité d’une norme de droit interne postérieure à une directive de droit communautaire. D’un côté, dans l’arrêt du 3 décembre 1999, les associations avaient demandé au ministre compétent de fixer la date d’ouverture anticipée de la chasse au gibier d’eau. Celui-ci refuse ces demandes par les décisions du 30 juillet et 20 août 1998, au motif qu’il n’en a plus la compétence. Selon lui, par l’entrée en vigueur de la loi du 3 juillet 1998, cette loi aurait abrogé les dispositions des articles L 224-2 et R 224-6 du Code Rural qui lui donnaient cette compétence. En l’espèce, l’al 1 art L224-2 et l’art R 224-6 disposaient respectivement que les dates d’ouverture et de fermeture de la chasse sont fixées par l’autorité administrative, et que le ministre compétent peut autoriser l’ouverture de la chasse anticipée. Mais les dispositions de l’al 2 art L 224-2 introduites par la loi de 1998 prévoyaient de fixer ellesmêmes ces dates. Les associations saisissent le Conseil d’Etat qui statue en section du contentieux pour recours pour excès de pouvoir. Elles demandent l’annulation des deux décisions ministérielles de 1998, au moyen que le ministre ne pouvait refuser d’exercer sa compétence que la loi de 1998 n’avait

pas abrogé au regard de l’al 1 art L 224-2 et R 224-6. Et que même si l’al 2 précité avait pu ôter cette compétence, il ne saurait s’appliquer en raison de son incompatibilité avec l’article 7-4 de la directive du 2 avril 1979 (objectifs de préservation des espèces). Le juge administratif (JA) a donc dû statué sur l’application ou non de dispositions législatives postérieures et incompatibles aux objectifs d’une directive européenne. Au regard de l’article 189 du TCE et de l’interprétation de la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) de l’article 7-4 de la directive citée, le CE annule les décisions ministérielles au motif que l’alinéa 2 de l’article L 224-2 est incompatible avec la directive ; le ministre était alors compétent. D’un autre côté, dans l’arrêt du 25 janvier 2002 « Ligue pour la protection des oiseaux », l’association attaque le décret d’application du 1er Août 2000 de la loi du 26 juillet 2000 relatif aux dates d’ouverture de chasse selon les espèces. Elle demande son annulation au moyen que les dérogations à ces dates sont incompatibles avec le droit communautaire, en l’espèce l’article 7-4 de la directive sus citée. Le CE a donc été conduit à statuer sur l’applicabilité des dispositions du décret selon les espèces visées au regard de le la directive de 1979. Après s’être référé à l’interprétation de la CJCE, le juge a annulé partiellement le décret en ce qui concerne les dates d’ouverture anticipée de la chasse aux canards et autres, et celles de clôture postérieures au 30 janvier de la chasse à d’autres espèces. Les motifs ont été identiques pour ces dispositions : la jurisprudence de la CJCE et les données scientifiques. Il en a conclu que ces dispositions étaient incompatibles avec l’objectif de protection complète des espèces de l’article 7-4 de la directive. En revanche l’article 9-1 de cette directive permet de déroger à l’article 7-4 dans certains cas. Or, l’article R 224-6 du code rural résultant du décret attaqué a été pris selon l’article 9-1. Le juge sursoit à statuer et renvoie à la CJCE la question préjudicielle de savoir si cet article 9-1 permet de déroger aux dates de chasse au regard de l’article 74 de la directive de 1979. Alors, à travers ces deux arrêts, la question qui est posée est celle de l’étendue et des limites de la compétence du juge administratif en matière de contrôle de conformité du droit interne aux textes de droit communautaire dérivé. La réponse peut s’articuler de la manière suivante: le Conseil d’Etat confirme dans ces deux arrêts la suprématie des normes communautaires sur les normes nationales et réaffirme l’étendue de sa compétence pour contrôler la conformité des AAR et des lois au droit communautaire dérivé (I). Toutefois, sa compétence est doublement limitée au regard du type de contrôle de conformité qu’il exerce et au regard de la question de l’interprétation des textes de droit communautaire (II).

I - L’étendue de la compétence du juge administratif pour assurer la suprématie du droit communautaire dérivé en droit interne Dans ces deux arrêts, le CE réaffirme la suprématie des normes communautaires - en l’espèce, la directive communautaire du 2 avril 1979, relative à la protection des oiseaux sauvages - sur les normes nationales. Le JA se reconnaît ainsi compétent pour contrôler la conformité des AAR et des lois au droit communautaire dérivé (A). Dans le cadre de son contrôle, il rappelle l’obligation, à la charge des autorités nationales, de respecter le droit communautaire (B).

A – Le JA, juge de la conformité des lois et règlements au droit communautaire dérivé 1- Le JA, juge de la conformité des lois au droit communautaire dérivé 1.1 Le contrôle de conventionnalité de la loi exercé par le CE dans l’affaire Association ornithologique et autres En l’espèce, le CE a estimé que la quasi-totalité des dispositions des lois de 1994 et 1998 étaient incompatibles avec les objectifs fixés par la directive communautaire. Le JA accepte ainsi de contrôler la conformité d’une loi aux objectifs fixés par une directive communautaire, conformément à sa jurisprudence. 1.2 L’arrêt du CE du 3 décembre 1999, Ass. ornithologique et autre : un prolongement de la jurisprudence Nicolo - Depuis 1989 ( CE, 20 octobre 1989, Nicolo), le CE accepte de contrôler, par voie d’exception, la conformité au traité d’une loi postérieure qui a servi de fondement à l’AA attaqué (revirement de jurisprudence / jurisprudence dite des Semoules de France) - CE, 1989, Nicolo : contrôle de conformité de la loi postérieure aux stipulations du traité de Rome - Extension du contrôle de conventionnalité des lois au droit dérivé : CE, 1992, SA Rothmans International et SA Philip Moris France (le CE accepte de contrôler la conformité d’une loi aux objectifs fixés par une directive communautaire) 2- Le JA, juge de la conformité des actes réglementaires au droit communautaire dérivé - Annulation par le CE, dans l’affaire Ligue pour la protection des oiseaux (CE, 25 janvier 2002) d’une partie des dispositions de l’article 1er du décret du 1er août 2000 pour méconnaissance des objectifs fixés par la directive - Application d’une jurisprudence constante : le juge administratif contrôle depuis longtemps la compatibilité des actes administratifs avec les traités internationaux. Il accepte ainsi d’examiner le moyen tiré de la méconnaissance d’une norme internationale à l’appui d’un recours pour excès de

pouvoir (CE, Ass., 30 mai 1952, Dame Kirkwood). Concernant le droit communautaire dérivé, le Conseil d’État a également accepté dès 1984 d’annuler un décret de transposition d’une directive au motif que ce décret en méconnaissait les objectifs (CE, 28 septembre 1984, Confédération nationale des sociétés de protection des animaux de France et des pays d’expression française). Au-delà, il peut annuler les dispositions de tout acte réglementaire contraire à une directive ( CE, 7 décembre 1984, Fédération française des sociétés de protection de la nature). 3- La référence à la jurisprudence de la CJCE - Dans l’affaire Association ornithologique et autres : le CE juge que la quasi-totalité des dispositions des lois de 1994 et de 1998 sont incompatibles avec les objectifs de la directive (protection des espèces migratrices), tels qu’ils sont interprétés par la CJCE (19 janvier 1994, Association pour la protection des animaux sauvages c/ Préfet de Maine-et-Loire et Préfet de Loire-Atlantique) - Dans l’affaire Ligue pour la protection des oiseaux : le CE se réfère à l’interprétation donnée par la CJCE de la directive de 1979 pour annuler l’article 1 er du décret de 2000 qui prévoit des dates de chasses échelonnées en fonction des espèces migratrices. - Rappel du principe fixé par la directive : la protection des espèces migratrices doit être complète - Exception admise : la fixation des dates de chasse échelonnées en fonction des espèces peut être admise sous certaines conditions B - Le rappel par le JA de l’obligation à la charge des autorités nationales de respecter le droit communautaire dérivé Dans ces deux affaires, le CE rappelle que les autorités nationales ont l’obligation d’assurer l’application du droit communautaire. 1- Le rappel de l’obligation faite aux autorités nationales de tirer les conséquences de l’incompatibilité entre les dispositions législatives et les objectifs fixés par la directive communautaire (affaire Ass. ornithologique et autres) L’application de la loi dont les dispositions sont contraires aux objectifs fixés par la directive communautaire doit être écartée. 2- Le rappel de l’obligation faite à l’administration d’exercer sa compétence réglementaire dans le respect des objectifs de la directive ( affaires Ass. ornithologique et autres et Ligue pour la protection des oiseaux) - Les autorités nationales ne peuvent édicter de textes réglementaires contraires aux objectifs définis par une directive (application de la jurisprudence CE, Ass., 1989, Alitalia)

- Les autorités nationales ne peuvent pas non plus, après l’expiration du délai de transposition d’une directive, laisser subsister des dispositions réglementaires qui ne seraient plus compatibles avec les objectifs de la directive (CE, Ass., 1989, Alitalia) L’autorité administrative a donc l’obligation de faire droit à une demande tendant à l’abrogation de dispositions réglementaires incompatibles avec une directive. 3- Les conséquences - L’application des lois incompatibles avec la directive « oiseaux » est écartée : annulation par le CE de la décision par laquelle le ministre de l’environnement a refusé d’exercer son pouvoir réglementaire pour fixer des dates d’ouverture et de fermeture de la chasse conformes à l’objectif de la directive (décision assimilée à un AA susceptible de faire l’objet d’un REP) - La non conformité du texte réglementaire aux objectifs fixés par la directive entraîne son annulation : annulation par le CE des dispositions du décret de 2000, incompatibles avec les objectifs de la directive « oiseaux » (CE, 2002, Ligue pour la protection des oiseaux) Si la compétence du JA semble étendue en matière de contrôle de conventionnalité des lois et actes réglementaires, elle se trouve, dans une certaine mesure, limitée.

II - Les limites « relatives » de la compétence du juge administratif dans le cadre du contrôle de conformité au droit communautaire des textes de droit interne La compétence du JA est doublement limitée. D’une part, il se contente d’exercer un contrôle restreint sur la décision par laquelle le PM a refusé de mettre en œuvre la procédure de déclassement des dispositions législatives intervenues dans une matière réglementaire (A). D’autre part, le CE, confronté à une difficulté sérieuse d’interprétation d’une disposition de la directive, décide de saisir la CJCE d’une question préjudicielle (B).

A – Le contrôle restreint du JA face au pouvoir d’appréciation du Premier ministre (PM) - Affaire Association ornithologique et autres : recours en annulation contre la décision par laquelle le PM a refusé de mettre en œuvre la procédure de déclassement de textes de forme législative intervenus dans une matière réglementaire (procédure prévue à l’article 37, alinéa 2 de la Constitution). - Fondement de la compétence du CE pour examiner le REP formé contre cette décision : la décision par laquelle le PM a refusé d’engager la procédure de déclassement se rattache à l’exercice du pouvoir réglementaire et revêt ainsi le caractère d’un AA susceptible de faire l’objet d’un REP.

- Contrôle restreint exercé par le CE sur la décision de refus du PM : le PM dispose, selon le JA, d’un large pouvoir d’appréciation quant à la détermination de la date et de la procédure appropriées pour tirer les conséquences de l’incompatibilité entre les textes de droit interne et la directive communautaire - Le CE a ainsi considéré que le PM disposait d’un « délai raisonnable » pour mettre en conformité les textes de droit interne à la directive. En l’espèce, la décision de refus du PM était intervenue moins de 5 mois après le vote de la loi de 1994. Le délai n’était donc pas expiré. Sa décision de refus n’a donc pas été annulée. - Conséquence : rejet au fond des conclusions présentées par les associations et dirigées contre cette la décision

B – Le renvoi préjudiciel à la CJCE en matière d’interprétation des textes de DC Affaire Ligue pour la protection des oiseaux : recours en annulation dirigé contre l’article 2 du décret de 2000, en ce qu’il prévoit que des dérogations aux règles résultant des dates de clôture de chasse pourront être accordées par les préfets. Le CE était conduit à se prononcer sur la compatibilité de ces dispositions aux stipulations de l’article 9§1 c) de la directive communautaire qui prévoit plusieurs motifs de dérogation à l’objectif de protection complète. 1- Le renvoi préjudiciel à la CJCE pour difficulté sérieuse d’interprétation de l’article 9§1 c) de la directive - Le CE a estimé que la question de la compatibilité du décret à l’article 9§1 c) de la directive soulevait une difficulté sérieuse qui justifiait la saisine de la Cour de justice à titre préjudiciel - Questions posées à la CJCE : question de savoir si l’article 9§1 c) de la directive permet de déroger aux dates d’ouverture et de fermeture de la chasse fixées compte tenu des objectifs mentionnés à l’article 7§4 ; en cas de réponse affirmative, selon quels critères et dans quelles limites ces dérogations peuvent être prévues 2- La tendance actuelle du CE à saisir la CJCE à titre préjudiciel en cas de difficulté sérieuse d’interprétation : une évolution / à la jurisprudence relative à l’acte clair Faisant application de la théorie de l’acte clair, le CE estimait que l’interprétation du texte communautaire ne posant pas de difficulté sérieuse, il n’était pas nécessaire de renvoyer la question devant la CJCE ( CE, Ass. 1978, Ministre de l’intérieur c/Cohn-Bendit). Cependant, compte tenu notamment du fait que la transposition en droit interne des directives communautaire revêt désormais le caractère d’une obligation constitutionnelle, la jurisprudence Cohn-Bendit a été récemment abandonnée par le Conseil d’Etat (CE, Ass., 30 octobre 2009, Mme P…, n° 298348). Désormais, tout

justiciable peut se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive lorsque l’Etat n’a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaire. Si la CJCE s’est déjà prononcée sur une question d’interprétation posant une difficulté sérieuse, le CE se réfère à la jurisprudence communautaire pour rendre sa décision. 3- Les conséquences du renvoi préjudiciel à la CJCE a.

Les juridictions qui s’écartent de l’interprétation donnée par la CJCE commettent une illégalité au regard du DC

Les arrêts rendus par la CJCE, saisie d’une question d’interprétation d’une norme communautaire, ont autorité absolue de chose interprétée. b.

La CJCE a rendu son arrêt le 16 octobre 2003 - elle a conclu à l’incompatibilité des dispositions de l’article 2 du décret aux objectifs de la directive. Le CE s’est conformé à cette interprétation et a, par conséquent, annulé les dispositions litigieuses entachées d’illégalité (CE, 27 février 2004, Ligue pour la protection des oiseaux et autres et CE, 5 juillet 2004, Ligue pour la protection des oiseaux et autres)....


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