Lecture lineaire La Muse venale PDF

Title Lecture lineaire La Muse venale
Author ryad. h
Course Littérature Et Culture Francophones
Institution Université Sorbonne Paris Nord
Pages 3
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Summary

L’or en boue - « La Muse vénale » ; « Spleen et Idéal »
- Titre paradoxal : poésie du contraste.
- Sonnet : forme fixe, traditionnelle de la poésie lyrique, amoureuse, ici détournée....


Description

- L’or en boue - « La M Muse use vénale » ; « Spleen et Idéal » - Titre paradoxal : poésie du contraste. - Sonnet : forme fixe, traditionnelle de la poésie lyrique, amoureuse, ici détournée. Quatrain 1 : Vers 1 : L’apostrophe pleine d’emphase, le complément du nom qui dit l’appartenance affective, l’allitération en (m) tel un murmure amoureux = 1er hémistiche. L’amour déclaré du premier hémistiche est déçu dès le deuxième par le chiasme, « muse de mon cœur / amante des palais » (référence à l’Olympe des dieux grecs), qui dit un amour non réciproque. Le poète aime la muse (a pour rôle d’apaiser les dieux de l’Olympe par son art) qui aime…les palais ! Au « coeur », métonymie du sentiment, du lyrisme, Baudelaire oppose « des palais », pluriel qui recouvre une réalité prosaïque. Au désir amoureux, est substitué celui de la possession matérielle. Le premier vers construit donc : une impossibilité de dialogue entre le poète et sa muse, et une figure de la muse peu conventionnelle : une femme qui aime le luxe plus que celui qu’elle doit inspirer. Vers 2 : On peut ainsi remarquer que le rapport à la muse semble inversé : c’est le poète qui s’inquiète de ce qu’elle va devenir et non l’inverse (on attendrait d’une muse qu’elle soit protectrice et inspiratrice pour le poète) : questions / verbes au futur qui expriment l’inquiétude de son avenir / verbes prosaïques (« auras-tu / « racolteras-tu ») ou aux sonorités dures (allitération en R : « ranimeras-tu ») La subordonnée de temps (quand Janvier lâchera ses Borées ») est une périphrase poétique pour désigner l’hiver. Le mois est allégorisé, et Baudelaire se réfère à la mythologie, avec les « Borées ». Le ton est donc précieux et conforme à une poésie classique. Vers 3 :On retrouve ce principe dans le complément circonstanciel du vers suivant, vers particulièrement travaillé, « Durant les noirs ennuis des neigeuses soirées » : antithèse noir / neigeuse ; allitération en (N), antéposition précieuse des 2 adjectifs. Ainsi, les circonstances créent un univers plutôt conventionnel sur le plan poétique. Vers 4 : Cependant, ce caractère conventionnel est déjoué au dernier vers du quatrain : l’enjambement qui a suspendu le moment de découvrir le COD de « auras-tu » suscite un effet déceptif au regard de la pompe des vers 2 et 3. Il s’agit en effet d’avoir… « un tison pour chauffer tes deux pieds violets » ! Tout ici exprime le prosaïsme : le « tison » (Baudelaire aurait pu préférer « âtre » ou « foyer »), « chauffer » plus prosaïque que « réchauffer », « pieds » dont le prosaïsme est accentué par la cheville « deux », enfin « violets » qui fait référence explicitement à la couleur bleutée d’une peau qui a froid. L’image de la muse est donc celle d’une femme seule, auprès du feu (rappelle « Quand vous serez bien vieille… » ; Ronsard Sonnets pour Hélène = poésie lyrique du XVIe s.) On peut alors se demander si la dégradation opérée dans ce dernier vers n’était pas à l’oeuvre dans les deux précédents : de fait, l’accumulation des effets poétiques classiques notés plus haut est suspecte. Comme souvent, chez Baudelaire, cette surenchère est signe d’ironie. Ainsi, le poète se moquerait-il d’une certaine emphase (exagération) poétique, il l’imiterait, la parodierait pour mieux faire ressortir, par contraste, la misère de sa propre muse. De fait, si on suit cette piste métatextuelle ( mise en abîme, la poésie qui parle d’elle-même) , on se rend compte que les « pieds » peuvent aussi désigner les syllabes en poésie. Dans ce cas, la muse a les pieds…glacés, autant dire que sa poésie est figée, paralysée. La diérèse sur « violets » fonctionne comme un signal. Et il est permis d’entendre aussi le mot « laid ». On peut même aller jusqu’à se demander si le système des rimes dans ce premier quatrain : abba (é/è) ne conforte pas cette

hypothèse. La différence entre le (é) fermé et le (è) ouvert fait entendre à la lecture une presque platitude, en tout cas oblige à une application dérisoire. Quatrain 2 : Il est facile de constater que la dégradation de la muse se poursuit dans le quatrain suivant à travers deux détails de son corps (les épaules, le palais) Vers 5 : Les « épaules marbrées » peuvent avoir 2 explications : soit la muse a froid, soit elle est frappée, maltraitée, sa peau ayant des ecchymoses. On peut faire entendre, dans ce vers, l’allitération en (R), et la présence de l’occlusive (K) à la césure (« donc ») qui créent une sonorité assez dure, peu harmonieuse. Vers 6 : Le complément de moyen qui suit (vers 6) suit, selon le modèle des vers 2 et 3 du quatrain 1 une forme recherchée : antéposition précieuse de l’adjectif (« nocturnes rayons »), métaphore du halo de la lune capable de « percer » (passer à travers ? blesser ?) les « volets ». On l’aura compris, ces accents poétiques (selon le modèle conventionnel de l’écriture poétique) font contraste avec le reste du quatrain (comme c’était le cas dans le quatrain 1 pour les vers 2 et 3), prosaïque. Cette image peut être rapprochée de « Tristesse de la lune » où la lune (muse ?) est métaphorisée en une femme lascive, ou des « Bienfaits de la lune » dans les Petits Poèmes en prose. Disons que cette présence lunaire est riche de sens : elle place la muse du côté des femmes lascives, quelque peu maléfiques, lunatiques. L’astre baudelairien est plus la lune que le soleil… Vers 7-8 : La dégradation se poursuit aux vers 7 et 8 - d’abord dans le choix de sonorités peu euphoniques : allitération en (S) trop rapprochées, (K) à la césure (qui fait écho au « donc » du vers 5), succession de (T) et (K) dans le 2 hémistiche. Reprise de l’allitération en (R) dans le vers 8, appuyée par le mot « or » à la césure. Ensuite par le sens : la muse est pauvre, l’expression pour le dire est familière (« à sec ») et permet le jeu de mots suggéré par le 2e hémistiche : le « palais » (jeu d’homophonie avec le vers 1, ou sorte d’antanaclase : mot employé dans deux sens différents) désigne évidemment ici l’intérieur de la bouche, la muse a donc aussi soif ! elle a la bouche sèche. On comprend qu’elle souhaite boire…, dans ce contexte, de l’alcool. On peut mesurer la dégradation entre le « palais » du vers 1 et celui-ci… Dans ce contexte, le vers 8 fait contraste sur le plan des sonorités et de l’écriture (par un jeu d’oscillation qu’on a désormais bien compris) : les « voûtes azurées » sont une périphrase précieuse pour désigner le ciel étoilé. Les sonorités en (Z) contrastent aussi avec celles en (R) ou (K) qui précèdent. Baudelaire, potentiellement, est ici ironique. En revanche, il ne fait pas contraste sur le plan du sens ! La muse est ici, soit une mendiante qui reçoit des pièces providentielles…, soit une …prostituée (ce qui expliquerait la femme frappée du vers 5 et donnerait peut-être un autre sens à « violets », celui de violée). Au terme de l’étude des deux quatrains, on constate combien Baudelaire entretient avec sa Muse un rapport peu ordinaire : on avait vu qu’il la protégeait, se souciait de son avenir, mais après étude plus précise, on comprend qu’il a à son égard des sentiments ambivalents : il semble la prendre en pitié, mais également la railler. Dans tous les cas, il n’est pas vraiment tendre avec elle. Par ailleurs, on a mesuré combien cette figure poétique était ici dégradée : plus rien de reste de la muse antique ou romantique. La muse baudelairienne est une femme noyée de préoccupations matérielles (ne pas mourir de froid, boire, avoir de l’argent), et potentiellement, une prostituée.

Tercet 1 : Vers 9 : Le rythme du vers 9 exprime une certaine lassitude (3 + 5 +4) - La muse ne répond pas, comme en témoigne l’étude de l’énonciation : « il te faut »…le poète reprend le tutoiement, et file la thématique de la pauvreté : « pour gagner ton pain de chaque soir ». Il s’agit bien cette fois de manger (on a eu plus tôt le froid, la soif) La muse est donc condamnée à la nécessité (c’est le sens de la forme impersonnelle « il te faut ») de s’adonner à des gagne-pain (au sens propre) : tous sont rattachés à l’univers religieux (qu’on avait déjà, détourné, dans la formule gagner ton pain de chaque soir et non quotidien). Vers 10-11 : La comparaison avec « l’enfant de choeur » La référence à « l’encensoir » ou aux cantiques (te deum) Mais ces références religieuses, reste d’une représentation sacralisée de la muse, sont ici ironiques : « jouer de l’encensoir » est presque oxymorique et peut faire penser au balancement des hanches de la prostituée qui, chaque soir, doit appâter le client ; de même, le vers 11 est-il construit de façon antithétique (« chanter de Te Deum auxquels tu ne crois guères »). La foi est feinte, les cantiques de louanges ne sont que stratégie. Si on file la métaphore de la prostituée, cela ferait référence aux flatteries pour appeler le passant. La césure des vers 10 et 11 est très marquée et oppose le sacré et le profane. L’ironie est peut-être perceptible dans les sonorités peu euphoniques « chanter des te Deum » (TDTD) Enfin la rime du vers 11, avec son (è) ouvert manque d’élégance, d’autant plus qu’elle est précédée du verbe « crois », qui fait entendre un croassement qui n’a rien de musical. Toute la strophe fait donc entendre une disharmonie, que la lecture peut mettre en évidence. Tercet 2 : Le deuxième tercet propose un léger glissement dans la représentation de la Muse puisqu’on passe du féminin explicite des deux premiers quatrains au masculin : « saltimbanque ». Au passage, on peut remarquer que le premier tercet restait neutre et ne levait pas l’ambiguïté du masculin ou du féminin. D’aucuns pourront cependant dire que la comparaison avec « l’enfant de chœur » opérait un premier changement. au fond …à qui parle le poète ? Sans doute à lui-même ! Ainsi, la figure de la Muse n’est-elle qu’un artifice emprunté au bric-à-brac poétique pour mettre en scène une introspection du poète sur lui-même. Or, comment se voit-il pour finir ? « saltimbanque à jeun » : le mot est polysémique puisqu’il désigne tout aussi bien un comédien, un marchand ambulant, un acrobate qu’un un orateur (mauvais) ou même un clown, chargés d’amuser les foules sur les places publiques Etymologiquement, c’est celui qui saute sur les estrades. Or, on entend le saut, dans la construction rythmique du vers (1+5), et on peut lire la référence à l’estrade théâtrale dans l’exhibition suggérée dans le deuxième hémistiche : « étaler tes appas ». Par cette locution verbale, le saltimbanque rejoint d’ailleurs la prostituée par une sorte d’hypallage. Les appas (que Baudelaire choisit d’orthographier appas c’est-à-dire selon une graphie recherchée et vieillie, et non appâts ) désignent en effet ce qui excite le désir, la cupidité. On voit mal un saltimbanque étaler ses appas....


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