Analyse de l’activité située PDF

Title Analyse de l’activité située
Course Approche située de l'activité
Institution Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis
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Summary

Support du cours Analyse de l'activité située licence 3 psychologie...


Description

Analyse de l’activité située Cadre méthodologique Licence 3 de Psychologie – EN35ERGC Cathy TOUPIN Université Paris 8, 2 rue de la liberté - 93 526 Saint-Denis, France

Version du 7/11/2018

Ce document de cours est à destination des étudiants de l’Institut d’Enseignement à Distance de l’Université Paris 8, pour un usage strictement personnel. La reproduction et la diffusion partielle ou totale, sous quelque forme que ce soit, sont strictement interdites.

Le cours « Analyse de l’activité située » est composé de deux parties. La première concerne les fondements théoriques de l’activité située. Y ont été présentés : le débat qui alimente l’étude de la cognition humaine entre les tenants d’une approche symbolique et ceux d’une approche située ; et les fondements théoriques de l’approche située de l’activité (qui s’articulent autour de l’anthropologie cognitiviste américaine, la psychologie soviétique d’inspiration historico-socio-culturelle, et l’ergonomie francophone de l’activité). La seconde partie de ce cours (présentée dans ce document) explore le cadre méthodologique pour l’analyse de l’activité située en ergonomie. Y sont présentés la démarche ergonomique, et les principaux outils de recueil (observations, entretiens, verbalisations) et d’analyse utilisés dans le cadre de l'« Analyse de l'activité située ». Ces éléments sont illustrés et mis en œuvre à partir d'une étude réalisée sur le terrain, dans le secteur automobile.

Analyse(de(l’activité(située(–(Cadre(méthodologique(

Cathy(Toupin(

Sommaire

1 Quelques rappels ....................................................................................................................... 3 1.1

OBJETS D’ETUDE ET OBJECTIFS DE L’ERGONOMIE .......................................................................................3

1.2

DES CONCEPTS CLES ....................................................................................................................................4

2 Un modèle guide d’analyse de l’activité en ergonomie .......................................................... 8

3 Une démarche d’intervention type........................................................................................... 15 3.1

IDENTIFICATION, PRISE EN COMPTE D’UNE DEMANDE INITIALE.................................................................15

3.2

ANALYSE ET REFORMULATION DE LA DEMANDE INITIALE ........................................................................16

3.3

PROPOSITION D’INTERVENTION .................................................................................................................18

3.4

« OBSERVATIONS OUVERTES » DE L’ACTIVITE, ET PRE-DIAGNOSTIC ........................................................18

3.5

ANALYSE FINE DE L’ACTIVITE ...................................................................................................................22

3.6

DIAGNOSTIC ..............................................................................................................................................22

3.7

RECOMMANDATIONS .................................................................................................................................23

3.8

ACCOMPAGNEMENT / SUIVI ......................................................................................................................24

4 Analyse de l’activité située : les outils de recueil .................................................................... 26 4.1

4.2

LES OBSERVATIONS ...................................................................................................................................26 4.1.1

Les observations ouvertes ................................................................................................................27

4.1.2

Les observations systématiques .......................................................................................................28

4.1.2.1

Modalités pratiques des relevés ..................................................................................................................29

4.1.2.2

Quelques exemples d’observables ..............................................................................................................31

LE RECUEIL DE DONNEES VERBALES .........................................................................................................34 4.2.1

Les entretiens ...................................................................................................................................34

4.2.1.1

Objectifs ...................................................................................................................................................... 34

4.2.1.2

La conduite d’entretien ...............................................................................................................................35

4.2.2

L’entretien d’explicitation ...............................................................................................................37

4.2.2.1

Objectifs ...................................................................................................................................................... 37

4.2.2.2

Les conditions de réalisation....................................................................................................................... 38

4.2.3

Les verbalisations .............................................................................................................................39

4.2.3.1

Objectifs ...................................................................................................................................................... 39

1

Analyse(de(l’activité(située(–(Cadre(méthodologique( 4.2.3.2

4.3

Cathy(Toupin(

Les modes de verbalisation ......................................................................................................................... 40

LES SIMULATIONS .....................................................................................................................................44

5 Analyse des données recueillies ................................................................................................ 46 5.1

5.2

L’ANALYSE DES DONNEES D’OBSERVATION ..............................................................................................46 5.1.1.

Les « chroniques d’activité » ..........................................................................................................46

5.1.2.

Analyses quantitatives et représentations graphiques ...................................................................48

L’ANALYSE DES DONNEES VERBALES .......................................................................................................53

6 Quelques éléments de déontologie ............................................................................................ 56

7 Bibliographie .............................................................................................................................. 57

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Dans les deux premières parties de ce document (« 1 » & « 2 »), nous proposons quelques rappels d’éléments longuement présentés dans le cours « Introduction à l’Ergonomie » de première année de licence (les objets d’études et objectifs de la discipline, ses concepts clés, et le modèle guide d’analyse de l’activité). Ils sont rappelés ici afin d’aider à la compréhension des éléments nouveaux relatifs à la démarche et à la méthodologie.

1

QUELQUES RAPPELS

1.1

Objets d’étude et objectifs de l’ergonomie

L’ergonomie est la discipline scientifique qui vise à comprendre l’activité humaine (c’est-àdire tout ce qu’un individu fait, tout ce qui se passe pour lui à un moment donné), en situation naturelle (c’est-à-dire en observant cette activité dans son cours naturel, en allant sur le terrain). Elle porte un double objectif : « comprendre » pour « agir ». Le premier objectif, épistémique, est de produire, construire des connaissances, scientifiquement fondées, relatives au fonctionnement de l’Homme en activité naturelle, et inscrire ces connaissances « dans un corpus qui pourra notamment faciliter la réalisation des analyses ultérieures » (Leplat, 2004). Une situation naturelle, ou "écologique", est une situation qui suit son cours naturel. Elle n'a été ni transformée, ni découpée en variables par le chercheur (à l’inverse d’une situation non naturelle, ou « expérimentale », construite par le chercheur). L'intérêt pour l'ergonome de privilégier ces situations naturelles est de pouvoir prendre en compte la singularité, la complexité et la richesse des situations et activités observées.

Le second objectif, pragmatique, consiste à organiser les connaissances construites sur l’activité humaine, afin de les appliquer à l’amélioration des conditions de réalisation de cette activité, avec des critères centrés sur les sujets (en termes de santé, sécurité, bien-être, confort,

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facilité d’usage, développement des compétences, satisfaction, etc.), et des critères centrés sur les « systèmes » et leur performance (en termes d’efficacité, productivité, fiabilité, qualité, etc.). A la naissance de la discipline, et pendant quelques années, l’ergonomie s’est principalement centrée sur des problématiques en lien avec le travail ; puis ces dernières années, elle a élargi son champ d'action vers d'autres domaines, telles que la formation ou les activités de la vie quotidienne. Au travers de ces trois grands domaines d’activité, l’ergonomie s’intéresse autant à l'adulte, qu'à l'enfant ou l’adolescent, à la personne vieillissante, à la personne en situation de handicap… tous sujets acteurs de leur propre activité.

1.2

Des concepts clés

Plusieurs concepts forment un socle de connaissances commun à tous les professionnels de l’ergonomie (qu’ils soient praticiens, chercheurs ou enseignants).

« Tâche » & « Activité » Le concept de tâche a pris une acception spécifique en ergonomie francophone, où il est opposé à l’« activité ». La « tâche » se définit par deux éléments : « un but donné dans des conditions déterminées » (Leplat, Hoc, 1983, p51). Dans le cadre du travail, le but est l’état final souhaité, et peut être décrit sous différentes formes : en termes de qualité, de quantité de production, etc. Les conditions, quant à elles, sont relatives aux procédures à mettre en oeuvre (méthodes de travail, consignes, normes, etc.), aux contraintes de réalisation (rythme à respecter, délais attendus), aux moyens mis à la disposition des opérateurs (documents, machines, outils, etc.), aux caractéristiques de l’environnement physique (ambiances de travail, configuration du poste de travail), aux dimensions collectives (présence ou non de collègues, hiérarchie, modalités de communication, etc.), et enfin aux caractéristiques sociales du travail (rémunération, contrôle, sanction, etc.) (Falzon, 2004). Diverses lectures du concept de tâche ont été proposées, distinguant les tâches proposées par les prescripteurs et celles élaborées par le sujet : - La « tâche prescrite » est admise comme étant ce qui est à faire, c’est « le modèle pour le prescripteur » (Poyet, 1990), « la tâche conçue par celui qui en commande l’exécution » (Leplat, Hoc, 1983). 4

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- Mais la tâche prise en compte par le sujet dépasse souvent les prescriptions. De par son expérience ce dernier peut avoir une représentation et une prise en compte de la tâche prescrite qui suppléent son caractère prescriptif. Leplat (1997) parle de « tâche redéfinie », qui prend en compte les différents buts que doit remplir la tâche prescrite, et les nouveaux buts que peut se fixer le sujet (par exemple, en termes de santé). En ergonomie, l’activité est l’unité analytique de base, l’unité minimale qui permet de situer et de comprendre les conduites humaines. Elle est ce qui est fait, ce qui est mis en jeu concrètement par le sujet pour effectuer la tâche qui lui est demandée. L’activité peut être décrite à partir de comportements (des gestes, des postures, des regards, des verbalisations, des interactions, etc.), séquences d’action qui aboutissent à la réalisation de la tâche, facilement observables. Mais elle est également constituée des processus mentaux (évaluation, planification, raisonnement, etc.) qui préparent, déclenchent, conduisent et donc expliquent les comportements des sujets. Ces mécanismes, inobservables, devront être inférés à partir des observations, et appréhendés par des méthodes de recueil spécifiques. L’examen des fondements théoriques de l’activité située présentés par Decortis (2018)1 met en évidence plusieurs dimensions importantes pour comprendre ce que fait l’homme en situation, en identifiant notamment ce qui fait sens pour lui. L’activité peut également être décrite, dans la mesure où cela se révèle nécessaire pour son explication, à partir des processus biologiques et physiologiques (activité cardio-pulmonaire, activité oculomotrice, activité musculaire, etc.), et des émotions et manifestations de l’affectivité du sujet (par exemple, dans les situations qui comportent des dangers, ou pour celles où les sujets sont en contact avec un public) (Darses, de Montmollin, 2012). Précisons que, tout comme le concept de tâche, celui d’activité peut également revêtir diverses acceptions : nous parlerons ainsi d’ « activité prescrite », et d’ « activité redéfinie » par le sujet. En pratique, toute analyse du travail comprendra à la fois des analyses en termes de tâche et des analyses en termes d’activité (Rabardel et coll., 2002).

« Prescrit » & « Réel »

1

cf. Partie 1 du cours « Analyse de l’activité sitée – Fondements théoriques » (Decortis, 2018)

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Toute analyse du travail fait systématiquement apparaître un élément fondamental théorisé par les pionniers de l'ergonomie francophone Ombredane et Faverge (1955) : le travail réel (la tâche prise en compte et l’activité mise en œuvre concrètement) est toujours distinct de ce qui est prescrit. Les écarts peuvent concerner : les buts que se fixe l’individu (par rapport à ceux prescrits) ; les moyens disponibles en situation (par rapport à ceux normalement prévus) ; les modes opératoires mis en œuvre (en fonction des procédures prescrites, mais également de savoir et savoir-faire acquis dans la pratique) ; les résultats obtenus (différents des résultats prescrits) ; etc. L’ergonomie accorde une importance à ces écarts (souvent méconnus dans l’entreprise), car la distance entre les prescriptions et le réel peut mettre en évidence : -

une prescription trop détaillée (et par conséquent difficile à suivre), trop lacunaire, vague, implicite, voire erronée ;

-

la diversité et la variabilité des situations auxquelles les sujets peuvent être confrontés ;

-

la façon dont les compétences des sujets leur permettent de traiter cette diversité et variabilité (en se donnant par exemple de nouveaux buts, en adaptant leurs modes opératoires, en mettant en œuvre des stratégies de régulation, etc.), pour que les objectifs soient malgré tout atteints de façon satisfaisante.

« Diversité » & « Variabilité » La diversité renvoie aux différences qui existent, à un instant T, entre les éléments constitutifs d’une situation, et/ou entre les individus composant une population. Elle se définit donc de façon synchronique (Rabardel et coll., 2002). Du côté des personnes, les différences entre individus (inter-individuelles) se manifestent au niveau de : leurs caractéristiques personnelles (âge, sexe, caractéristiques morphologiques, etc.), leurs formations (initiale, continue), leurs expériences et compétences, leurs états de santé (douleurs, fatigue, etc.), etc. Du côté des situations, il peut s’agir de différences entre les dispositifs techniques utilisés (ordinateurs, logiciels, outils, machines, etc.), de différences en termes d’organisation du travail (horaires de travail, composition des équipes, etc.), de différences dans l’environnement de travail (dans la configuration des postes de travail, dans les ambiances thermiques, les nuisances sonores), etc.

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Cathy(Toupin(

La variabilité renvoie au fait qu’il n’existe pas d’état constant (Rabardel et coll., 2002). Elle se définit de façon diachronique, c’est-à-dire qu’il s’agit d’apprécier les différences qui surviennent sur un empan temporel donné (par exemple sur une heure, une journée, une semaine, un mois, etc.) chez un même individu, ou au sein d’une situation. Du côté des personnes, cette variabilité intra-individuelle se manifeste à court terme (évolutions, différences liées aux rythmes chronobiologiques par exemple), et à long terme (évolutions, transformations liées à l’avancée en âge, l’acquisition d’expérience). Du côté des situations, la variabilité peut être liée au type de travail à réaliser (par exemple, le nombre et l’évolution de l’état des patients accueillis dans un service de soins vont fluctuer d’une période – de la journée, de la semaine, de l’année – à une autre), ou incidentelle (par exemple, un dossier incomplet, un outil qui casse, une machine qui tombe en panne, etc.). Une partie de la variabilité sera donc partiellement anticipable et programmable (par exemple les variations saisonnières) ; une autre partie sera, en revanche, aléatoire, et donc plus difficilement prévisible et anticipable (panne d’un outil ; conditions météorologiques changeantes ; trafic routier imprévisible ; etc.). L’objectif de l’étude de la variabilité n’est pas de la supprimer, mais de comprendre : -

comment les sources de variabilité sont prises en compte par les sujets ;

-

les variabilités à prendre en compte dans l’organisation du travail, les variabilités réductibles ;

-

les moyens à fournir aux opérateurs pour faire face à la variabilité incontournable ;

-

les conséquences des sources de variabilité sur la santé, la sécurité et la production.

***

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UN MODELE GUIDE D’ANALYSE DE L’ACTIVITE EN ERGONOMIE

L’activité est un objet complexe abordable par de multiples voies, et grâce à de nombreux modèles d’analyse. Ces dernières décennies, nous avons assisté à une évolution et un enrichissement de ces modèles (et méthodes) d’analyse. D’une part, car les secteurs et domaines d’activité analysés se sont transformés (premières analyses sur des activités industrielles, répétitives ; puis accroissement du secteur tertiaire dans les années 1950, et développement des techniques informatiques et des nouvelles technologiques à partir des années 1980) (Leplat, 2004) ; Daniellou (1997) évoque un « accroissement de la complexité des déterminants de l’activité que l’ergonome doit affronter" (p38). D’autre part, car les act...


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