CE, 11 avril 2012 - commentaire sur l\'arret de GISTI PDF

Title CE, 11 avril 2012 - commentaire sur l\'arret de GISTI
Course Droit Administratif
Institution Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
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Summary

commentaire sur l'arret de GISTI...


Description

Rania Semlali

CE, 11 avril 2012 :

Le Conseil d'État a revu à travers plusieurs arrêts comme en 1989 avec l'arrêt Nicolo, le champ d'application et le contrôle des traités en matière de d roit international. L’arrêt Van Gend en Loos du 5 février 1963 consacre le principe de l’effet direct. Le 11 avril 2012, le Conseil d’Etat réuni en assemblée du contentieux rend une décision portant sur l’effet direct des traités internationaux et donc sur la l’influence du droit international en droit interne. En l'espèce, une association pour la réinsertion par le logement et un groupement de soutien des immigrés demandent au Conseil d’Etat l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 8 décembre 2008 pris pour l’application de la loi du 5 mars 2007 relative au droit au logement opposable. Ce décret insère un article R. 300-2 du Code de la construction et de l'habitation qui pose les conditions du droit au logement opposable et qui exclut notamment les titulaires de carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant", "salarié en mission" ou encore "compétences et talents". Les associations dénoncent le non-respect de l'article 6-1 de la convention qui dispose qu'un travailleur migrant hors Union européenne est réputé comme ressortissant du pays d'accueil dans plusieurs domaines notamment le logement et l'accès à la justice : le décret ajoute une condition incompatible avec la convention. La question qui se pose au juge administratif est celle de connaître les mesures dans lesquelles une convention internationale produit-elle un effet direct sur le droit interne ? Le Conseil d'Etat répond par la positive et modernise ainsi l’effet direct en droit. Afin de répondre à notre problématique nous commencerons par l'évolution de l'appréciation des juges dans l’application de l’effet direct (I), puis nous étudierons l’application du principe constitutionnel d'égalité comme un renforcement de la décision (II).

I. Une évolution de l'appréciation des juges dans l'application de l'effet direct Nous commencerons par la reconnaissance d’un principe d’effet direct affirmant la supériorité des traités internationaux à l'échelle nationale (A ), ensuite nous présenterons la modernisation des critères traditionnels de l’effet direct (B ). A. La reconnaissance d’un principe d’effet direct : la supériorité des traités internationaux à l'échelle nationale.

Rania Semlali

On définit le principe d’effet direct comme un principe permettant aux particuliers d’invoquer directement une norme internationale devant une juridiction nationale ou européenne. Ce dernier a été consacré par la cour de justice des communautés européennes le 5 février 1963 dans l’arrêt Van Gend and Loos. Effectivement, cet arrêt attribue une définition de l’effet direct confère aux particuliers “ des droits individuels que les juridictions nationales doivent sauvegarder ”. En l'espèce, les deux associations attaquent le décret pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat. Effectivement, les requérants soulèvent une non-conformité du décret à la Convention internationale concernant les travailleurs migrants. De plus, il est précisé que pour qu'il y ait un contrôle de conformité, le traité international doit être doté d'un effet direct, comme précisé dans le texte, “dès lors qu'elles créent des droits dont les particuliers peuvent directement se prévaloir”. En effet, le traité international sur les travailleurs migrants interdit les discriminations de nationalité et possède ainsi un effet direct : le traité peut être alors évoqué par les requérants et il peut donc y avoir un contrôle de conformité. Dans cette décision, le Conseil d'Etat révise le principe d’effet direct et ainsi assouplit ses critères.

B. Une modernisation des critères traditionnels de l’effet direct : un assouplissement de la jurisprudence.

Au fil du temps, en l’absence de définition claire dans la jurisprudence, les critères de l’effet direct étaient devenus passablement relativement restrictifs. Certains arrêts attachaient ainsi une grande importance à la rédaction, en écartant l’effet direct des stipulations. Ainsi, cette décision vient assouplir les critères de l’effet direct : le Conseil d’État clarifie pour la première fois sa jurisprudence en matière d’effet direct des traités et accords internationaux.

En l'espèce, le Conseil d’état reprend les critères classiques de l’effet direct, il considère qu’un traité international est doté d’un tel effet dès lors qu’il “ n’a pas pour objet exclusif de régir les relations entre États et ne requiert l’intervention d’aucun acte complémentaire pour produire des effets à l’égard des particuliers”. La modernisation de ces critères réside dans les spécifications relatives à la manière d’apprécier ces critères. En effet, l’arrêt ajoute qu’une telle appréciation doit être faite “eu égard à l’intention exprimée des parties et à l’économie générale du traité invoqué, ainsi qu’à son contenu et à ses termes” et que “l’absence de tels effets ne saurait être déduite de la seule circonstance que la stipulation désigne les États parties comme sujets de l’obligation qu’elle définit”. Ainsi le juge administratif ne se focalise plus sur la rédaction qui a souvent pu prévaloir pour justifier le refus de toute invocabilité de certains traités, notamment de la Charte sociale européenne.

Rania Semlali

Nous nous sommes intéressés dans cette première partie au principe de l’effet direct et la modernisation apporte à ce principe par cet arrêt. Nous verrons par la suite la mise en avant du principe constitutionnel d'égalité. II. Application du principe constitutionnel d'égalité comme un renforcement de la décision

Dans cette deuxième partie, nous commencerons par présenter le principe d'égalité comme une base légale dans l’ordre juridique interne (A ) afin de terminer par la non rétroactivité de la loi comme un problème d'inégalité (B )

A. La principe d'égalité : une base légale dans l’ordre juridique interne

L'égalité devant la loi est par principe le principe selon lequel tout être humain doit être traité de la même façon par la loi : il s’agit d’un principe constitutionnel qui figure dans l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. En l'espèce, le décret créant l’article R. 300-2 du CCH méconnaît le principe d'égalité. En effet, ce dernier exclut les détenteurs de cartes séjours comportant la mention "étudiant", "salarié en mission” et "compétences et talents” du droit au logement opposable. On en déduit alors que les personnes de nationalité non française et les personnes de nationalité française ne sont pas traitées de la même façon puisque le décret pose des restrictions qui n’existent pas pour les français. De plus, il est nécessaire de ressortir les distinctions injustifiées entre les différentes catégories des titres de séjours. Ainsi, la différence de traitement ne se justifie pas par un motif d’intérêt général, ni dans la distinction de nationalité et ni dans la distinction des différents titres de séjours : Le décret est donc, d’après le Conseil d’état, non conforme au principe constitutionnel d’égalité.

B. La non rétroactivité de la loi : une inégalité entre les individus concernés?

Rania Semlali

Le Conseil d'Etat répond par la positive et annule le décret attaqué. Le Conseil précise que cette annulation ne prend effet qu’à compter du 1er octobre 2012. Cela a pour conséquence l’absence d'un effet rétroactif : le principe de non-rétroactivité figure dans l’article 2 du Code civil qui dispose que “La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif”. Cette règle suppose qu’une loi nouvelle ne peut régir que les situations juridiques postérieures à son entrée en vigueur. Ainsi, comme il est précisé dans l'arrêt que “les décisions prononcées sur le fondement de l’article 1er du décret du 8 septembre 2008, antérieurement à son annulation, sont définitives…” Le Conseil d'Etat, pour préserver les situations acquises, décide que cette décision n’est pas rétroactive, dans un souci d’ordre public et des intérêts privés en cause et évitant les conséquences qu'aurait eu une annulation rétroactive. En effet, cette non rétroactivité de la décision peut s'avérer être problématique : selon le Conseil d'Etat, cela “produirait des effets manifestement excessifs tenant au vide juridique ainsi créé.”

Rania Semlali...


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