Fiche Morphosyntaxe Négation PDF

Title Fiche Morphosyntaxe Négation
Course Grammaire
Institution Université de Limoges
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Morphosyntaxe : la négation Introduction Définition lexicale : la négation s’exprime lexicalement dans la relation d’antonymie qui oppose des mots de sens contraire. Ces termes peuvent constituer des unités lexicales sans rapport morphologique (pauvre/riche ; laid/beau) ou appartenir à une même famille lexicale, par dérivation (possible/impossible). Définition grammaticale : la négation sert à former, avec des outils grammaticaux spécifiques, un type de phrase combinable avec un type déclaratif, interrogatif, injonctif et même exclamatif. Mais on trouve aussi la négation dans la phrase averbale : « Pas question ! ». Plusieurs distinctions : ► Négation logique et grammaticale : le terme de négation recouvre à la fois un phénomène sémantique et les formes lexicales et sémantiques sous lesquelles il se réalise. - La négation logique : inversion de la valeur de vérité, passage du vrai au faux. Ex : « Pierre n’a pas cuit ce gâteau ». Négation logique : paraphrase par « Il est faux que Pierre ait cuit ce gâteau » = si P est vrai, non P est faux. Le locuteur, qui assigne une valeur négative à un contenu propositionnel, asserte la non-correspondance de celui-ci à la réalité. - La négation grammaticale : par métonymie, la négation désigne les mots grammaticaux utilisés pour obtenir cette valeur sémantique. Il n’y a pas nécessairement coïncidence entre niveau logique et niveau grammatical. ► Portée de la négation : Négation totale (correspond à la négation logique) / négation partielle (porte sur un élément de la phrase). La négation peut viser l’un des constituants de la proposition : le COD (« Pierre n’a pas cuit ce gâteau, mais autre chose ») ; le sujet (« Quelqu’un d’autre a cuit ce gâteau ») ; le prédicat verbal seul (« Il n’a pas cuit ce gâteau, il l’a acheté ») ou bien encore sur le procès (« Il ne l’a pas cuit, il l’a carbonisé »). ► Incertitude sur la distribution du thème et du rhème de l’énoncé : L’incertitude qui pèse sur la portée de la négation est celle qui pèse sur la distinction entre thème et rhème. Ce qui est nié dans un énoncé négatif est le rhème : « Pierre n’a pas cuit ce gâteau (il a cuit autre chose) » : « ce gâteau » est le rhème, tout le reste est thématique.

La portée de la négation ne peut donc être analysée que relativement à une situation d’énonciation : la position des termes négatifs n’indique pas forcément ce sur quoi ils portent. ► Distinction entre la négation polémique et la négation descriptive : - La négation polémique correspond à la valeur de base de la négation : elle rejette un énoncé antérieur, que cet énoncé ait effectivement été produit ou qu’il soit présupposé par le locuteur. « Je ne suis pas passé au feu rouge » (sous-entendu « Monsieur l’agent ») ; « Les centrales nucléaires ne sont pas en danger d’exploser ». - La négation descriptive vise à présenter un état de chose de manière négative, sans qu’il y ait opposition à autre chose. « Marie n’a pas 40 ans » (elle approche la quarantaine) : la négation est un simple outil de modalisation. « Les bébés ne savent pas nager ». Dans les deux cas, un énoncé négatif présuppose toujours un énoncé positif. La négation n’inverse pas seulement la valeur de vérité de l’affirmation correspondante, mais qu’elle soit descriptive ou polémique, toute négation présuppose une affirmation antérieure ou au minimum sa possibilité. → Pour rendre compte des discordances potentielles entre négation logique et grammaticale, mais aussi des difficultés possibles à saisir la portée de la négation, choix d’un classement morphosyntaxique, en fonction des mots grammaticaux utilisés pour exprimer la négation.

I. La négation réduite à un seul morphème 1) La négation exprimée par un morphème lié Ce sont les préfixes privatifs ou négatifs in-, il-, im - ; dé-, a-, mal-, mé-. Non peut fonctionner comme un préfixe dans des mots dérivés : avec un nom (« non-lieu », « noningérence ») ; avec un adjectif (« non coupable ») // pas (« pas coupable »).

2) La négation exprimée par des morphèmes non liés ou externes * NON - mot-phrase (adverbe) : non représente négativement toute une proposition. Selon Marc Wilmet (Grammaire critique du français), non peut servir à : * infirmer une prédication positive : il est alors le symétrique de si qui sert à infirmer une prédication négative. « Tu m’écoutes ? Non » ; * confirmer une prédication négative (« Il ne chante pas ? Non ») : il est alors le symétrique de oui qui confirme une prédication positive ;

* repousser l’énonciation (« Non, ce n’est pas ça ») : négation totale. Il peut être renforcé par un adverbe (certainement, sûrement, vraiment) ou par mais, ma foi, ah çà ! Remarque : dans « Pierre chante-t-il ou non ? », non réfère à la proposition qui précède = valeur anaphorique : il sert à abréger le prédicat dans une structure coordonnée → mot proposition. Non peut aussi être employé à la place d’un COD (« Elle m’a dit non ») ou d’une complétive (« Je dis que non »). « Pierre ne chante pas, (et) moi non plus » → non confirme la prédication négative : dans ce cas, non est remplacé par non plus. « Pierre chante, non ? » → non sert à discuter la confirmation de l’énoncé, dans une interrogation. Non est fréquemment associé à la modalité interrogative : valeur percontative. - non peut servir à exclure un élément coordonné : négation partielle. « Il aime Marie, non Sidonie ». Variantes locutionnelles : (non) pas ; non parce que / non que (rapport de causalité nié). * NE Classement de Marc Wilmet d’un moins à un plus de négativité : - ne explétif faiblement négatif : suppression possible. Pas de valeur logique d’inversion. Il apparaît : * dans les propositions conjonctives pures signifiant l’interdiction ou la crainte : « Je crains qu’il ne vienne me voir pour me faire des reproches ». * dans les conjonctives pures dépendant d’un verbe de doute, en construction négative ou interrogative. Adverbe explétif lié au subjonctif > à l’indicatif, le ne disparaît. « Il n’y a personne qui ne sache cela ». * dans les subordonnées circonstancielles introduites par à moins que, de peur que, etc. FC : à la différence du FM, le ne explétif n’apparaît pas dans les subordonnées qui dépendent de termes recteurs porteurs d’une idée négative. - ne comparatif : « Il chante mieux que je ne chante ». Certains grammairiens le placent avec le ne explétif (négation d’une idée sous-jacente) # Marc Wilmet en fait une catégorie particulière : arguments du mode (indicatif) + valeur plus négative que le ne explétif. - ne pleinement négatif : certains tours stéréotypés conservent l’état de langue de l’AF. Locutions lexicalisées : « n’ayez crainte ». Verbes : oser, cesser, savoir, pouvoir. « Je ne puis répondre à cette question ». Hypothétiques : « Si je ne me trompe, vous êtes le mari de Sophie ».

« Que n’ai-je fait (…) » // « que ne le disiez-vous plus tôt ? » Tours au SUBJ : « qu’à cela ne tienne ». * SANS : correspondant négatif de avec. Cf. sans que (sans ne explétif). ∆ Jamais peut avoir une valeur positive en contexte négatif : « As-tu jamais rien vu de plus étrange ? » // « T’ai-je jamais refusé nulle chose ? » (La Fontaine) = un jour.

II. La négation à deux termes (forme discontinue) Elle se compose d’un discordantiel (ne) et d’un forclusif, qui peut être un adverbe (pas, point, guère), un pronom (rien), un déterminant (« Il ne cuit aucun gâteau »). Ne et pas sont considérés comme des adverbes, mais ils ont un fonctionnement particulier. La GMF parle de « marqueurs de négation ». Tesnière : parle de « négation à double détente ». Place de la négation → ne…pas/plus/jamais encadrent le verbe à la forme simple. Ne est antéposé au verbe (proclitique) et ne peut en être séparé que par les formes clitiques du pronom complément (« Je ne l’aime plus ») + forclusif postposé au verbe (ancien COD). Forme composée du verbe : ne…pas/plus/jamais encadrent l’auxiliaire et les pronoms compléments (« Je ne l’ai jamais aimé »). Personne, aucun, nulle part sont placés après le participe passé (« Je n’ai vu personne »).

1) La négation totale Elle porte sur le contenu propositionnel tout entier et correspond à la description logique de la proposition → Si P est vrai, non P est faux. Forclusifs spécifiques de la négation totale : pas et point. Il s’agissait de substantifs en AF, de même que mie, goutte, bouton, denier, etc. Adverbes obtenus par dérivation impropre (désémantisation // lexicalisation). Point : forclusif plus soutenu et vieilli que pas. Langue courante : tendance à supprimer le discordantiel. « Fais-le pas » (inversion de l’ordre des mots). ∆ Négation de l’infinitif et place du clitique en FC → deux constructions sont en concurrence : « ne le savoir pas » (discordantiel et forclusif encadrent le groupe infinitif) et « ne le pas savoir » (discordantiel et forclusif encadrent le clitique). La construction moderne « ne pas le savoir » reste rare (XVIIIe). En FC, l’infinitif est ressenti comme un verbe, tandis qu’en français moderne, on considère que l’infinitif est en emploi nominal. Mais l’infinitif ne peut recevoir la négation propre au nom (non) que lorsqu’il est substantivé (« le non-être »).

Point : exprimerait une négation plus marquée et conviendrait mieux aux « choses portant quantité » selon Maupas. Vaugelas : point est plus fort que pas. Dans l’interrogation, le recours à pas laisse attendre une réponse positive alors que point, plus polémique, apparaît surtout dans le cas d’une orientation négative de la question. D’un point de vue argumentatif, point marque une rupture de la consensualité énonciative entre les interlocuteurs.

2) La négation partielle Elle porte au moins sur l’un des constituants du contenu propositionnel. * NE … PAS / POINT La négation partielle se fait avec les mêmes forclusifs que la négation totale. Mais on ne peut plus gloser la phrase par « il est faux que ». « Le médecin ne reçoit pas le lundi » : il reçoit, mais pas le lundi. Le constituant sur lequel porte la négation est le rhème. Le caractère partiel de la négation n’est signalé par aucune marque morphosyntaxique. Mais le présentatif focalisant (« ce n’est pas le lundi que le médecin reçoit ») peut permettre de lever l’ambiguïté de la négation // la coordination oppositive (« Il ne reçoit pas le lundi, mais le mardi ») et l’accentuation à l’oral (« Il ne reçoit pas le lundi »). * La négation partielle se fait avec des forclusifs spécifiques : - Négation actantielle : elle affecte les constituants actanciels de la phrase (sujet, compléments du verbe) = rien, personne, nul, aucun. « Pierre n’a cuit aucun gâteau ». On trouve la construction « ne pas rien » tout au long du XVIIe siècle, même si Vaugelas la critique : « On ne veut pas rien faire ici qui vous déplaise » (Racine). Voir également les constructions avec ne...pas + personne, aucun, nul : interprétation résultante négative, et non positive comme en FM, où les deux négations s’excluent (« Je ne veux pas rien faire » = « je ne veux rien faire »). - Négation circonstancielle : jamais, nullement, nulle part, etc. « Il ne cuit jamais de cake » : la négation porte sur le constituant temporel. Plus : forclusif opposé à encore → interruption de la continuité temporelle du procès. Guère : s’oppose à beaucoup. « Il ne travaille pas » : le mouvement de négation aboutit à zéro # « Il ne travaille guère » : le mouvement de négation aboutit à une quantité très limitée, mais positive. Voir aussi les « satellites de la négation » (D. Gaatone) :

- locutions adverbiales de sitôt, de longtemps ; pas du tout, le moins du monde, au monde, pour un sou ; si / tant / tellement que cela ; - locutions pronominales grand chose, grand monde, âme qui vive, qui que ce soit, quoi que ce soit.

3) La négation restrictive ne … que Ce n’est pas à proprement parler une négation : équivalent de seulement, uniquement. Elle excepte de la négation l’élément sur lequel elle porte : « Elle ne mange que du chocolat » (elle ne mange rien, excepté du chocolat). La négation exceptive ne peut pas porter sur le sujet ni sur le verbe à un mode personnel. Il faut pour cela ajouter « il n’y a que » sauf si le sujet est inversé (« Ne sont dispensés du contrôle continu que les étudiants dérogataires »). Si l’on ajoute pas, le sens s’inverse : « Elle ne mange pas que du chocolat ». On trouve aussi rien que : « On le reconnaît rien qu’à sa démarche ».

4) La conjonction de coordination ni Elle s’emploie généralement en corrélation avec ne. Elle sert à coordonner des constituants négatifs, que ce soit des syntagmes, des propositions entières ou des GV (« Il ne veut ni ne peut refuser »). Ni coordonne deux termes appartenant à la même catégorie : « Il ne viendra ni lundi ni mardi ». On répète ne quand il s’agit de GV : « Il ne t’écoutera ni ne te fera confiance »....


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