Seance 5 - Le mariage - Formation et effets PDF

Title Seance 5 - Le mariage - Formation et effets
Author Moro Ruru
Course Droit civil : droit des personnes et de la famille
Institution Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
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Summary

TD5 droit de la famille...


Description

Séance n°5 – Le mariage : Les conditions de formation (suite et fin) Les effets

Cours de Madame le Professeur Malaurie-Vignal Année 2015 - 2016

I.

Nullité du mariage

A. Nullité du mariage pour erreur Document 1 : Ch. Réunies, 24 avr. 1862, Berthon, DP, 1862, conclusion Dupin Document 2 : Cass. Civ. 1ère, 13 déc. 2005, n° 02-21259 : Bull. civ. I, n° 495, p. 416 Document 3 : TGI Lille, 1er avr. 2008, note C. Bernard-Xémard, RLDC, 2008, 3063 (note reproduite) Document 4 : V. Larribau-Terneyre, « Le mariage décidément toujours institution d'ordre public et la virginité jamais qualité essentielle ! », Droit de la famille, n°12, décembre 2008, comm. 167, Note sous CA Douai, 1e ch., 17 nov. 2008, n° RG 08/03783 B. Nullité du mariage pour bigamie Document 5 : Cass. Civ. 1ère, 25 sept. 2013, n° 12-26.041 : Bull. civ. I, n° 184, Droit de la famille, 2013, comm. 148 Document 6 : Cass. Civ. 1re, 20 nov. 2013, n° 12-25.897, inédit (mariage putatif) II.

Effets du mariage

A. Contribution aux charges du mariage Document 7 : Civ 1ère, 16 sept. 2014, n° 13-18.935

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B. Obligation de communauté de vie Document 8 : Cass. Civ. 1re, 12 févr. 2014, n° 13-13.873 : Bull. civ. I, n° 25 : Il résulte des articles 21-2, 108 et 215 du code civil que « pour des motifs d'ordre professionnel, les époux peuvent avoir un domicile distinct, sans qu'il soit pour autant porté atteinte à la communauté de vie […] ». C. Solidarité aux dettes du ménages Document 9 : Cass. Civ. 1ère, 4 juin 2009, n° 07-13122 : Bull. civ. I, n° 118, Droit de la famille, 2009, comm. 100 (versement de cotisations dues par un époux au titre d'un régime légal obligatoire d'assurance vieillesse). Document 10 : Cass. Civ. 1 re, 17 déc. 2014, n° 13-25.117 (FS-P+B) (Dette ménagère : sort des dettes de santé contractées par un époux) : « Mais attendu qu'il résulte de l'alinéa 1er de l'article 220 du code civil que toute dette de santé contractée par un époux engage l'autre solidairement ; que, la cour d'appel ayant constaté que l'AP-HP avait agi en recouvrement d'une dette de soins contre l'époux de la débitrice et dès lors qu'il n'a pas été soutenu que les frais litigieux entraient dans les prévisions de l'alinéa 2 de ce texte, M. X... était tenu au paiement de la dette ; que, par ce motif de pur droit, substitué, dans les conditions de l'article 1015 du code de procédure civile, à ceux critiqués, la décision déférée se trouve légalement justifiée ; » TRAVAIL À EFFECTUER : 1°) Dissertation : « L’obligation de fidélité dans le couple » 2°) Résoudre le cas pratique suivant : Satisfaite des conseils que vous lui avez récemment prodigués, Madame RAGOT vous consulte à nouveau. Elle et son époux ont fait la connaissance de Dimitri, leur chauffeur de bus lors de leur dernier voyage en Ukraine. Voulant découvrir la vie et les coutumes locales, les époux RAGOT se plaisaient à questionner Dimitri et ce dernier leur avait même confié que lors de son mariage il ne pouvait pas imaginer en tant qu’Ukrainien, que son épouse ait pu ne pas être vierge, ou pire, qu’elle ait pu lui cacher la vérité sur sa virginité. Monsieur et Madame RAGOT s’étaient alors demandés et se demandent encore, ce qu’il en serait d’une telle situation aujourd’hui en France ? Madame RAGOT vous indique également être une femme au foyer entièrement dévouée à ses enfants et mariée depuis quatre ans à Monsieur RAGOT. Néanmoins, si depuis leur mariage la vie de Monsieur et Madame RAGOT s’écoulait le plus doucettement du monde, leur couple n’était pas non plus à l’abri de difficultés. En effet voilà que Monsieur RAGOT reproche maintenant à son épouse de le laisser assumer seule toutes les charges du foyer. De plus un malheur n’arrivant jamais seul, Madame RAGOT a pris l’initiative d’acheter au moyen d’un emprunt bancaire, un véhicule des plus communs, pour lui permettre de conduire les enfants à l’école sans avoir à souffrir des rigueurs de l’hiver. Mais c’est dans leur couple que l’hiver, pour ne pas dire la tempête, s’installe et Monsieur RAGOT mécontent de l’initiative de son épouse décide de ne pas payer les échéances liées à l’emprunt contracté par son épouse. Quant 2

à Madame RAGOT, la réaction de son époux constitue pour elle un nouvel affront auquel elle décide de répondre immédiatement, en ne dormant plus au côté de son mari. Elle se demande aujourd’hui si elle ne va pas quitter le foyer en emmenant avec elle les enfants issus de leur union. Sans évoquer la question du divorce, quel(s) conseil(s) pouvez-vous donner à Madame RAGOT ? Document 1 : Ch. Réunies, 24 avril 1862, Publié au Bulletin, Berthon REJET du pourvoi formé par Zoé-Marie-Louise Herbin contre un Arrêt rendu par la Cour impériale d'orléans, le 6 juillet 1861, en faveur du sieur X..., son mari. Attendu que l'erreur dans la personne dont les articles 146 et 180 du Y... Napoléon ont fait une cause de nullité du mariage ne s'entend, sous la nouvelle comme sous l'ancienne législation, que d'une erreur portant sur la personne elle-même ; Attendu que si la nullité, ainsi établie, ne doit pas être restreinte au cas unique de l'erreur provenant d'une substitution frauduleuse de personne au moment de la célébration ; Si elle peut également recevoir son application quand l'erreur procède de ce que l'un des époux s'est fait agréer en se présentant comme membre d'une famille qui n'est pas la sienne, et s'est attribué les conditions d'origine et la filiation qui appartiennent à un autre ; Le texte et l'esprit de l'article 180 écartent virtuellement de sa disposition les erreurs d'une autre nature, et n'admettent la nullité que pour l'erreur qui porte sur l'identité de la personne et par le résultat de laquelle l'une des parties a épousé une personne autre que celle à qui elle croyait s'unir ; Qu'ainsi la nullité pour erreur dans la personne reste sans extension possible aux simples erreurs sur des conditions ou des qualités de la personne, sur des flétrissures qu'elle aurait subies, et spécialement à l'erreur de l'époux qui a ignoré la condamnation à des peines afflictives ou infamantes antérieurement prononcées contre son conjoint, et la privation des droits civils et civiques qui s'en est suivie ; Que la déchéance établie par l'article 34 du Code pénal ne constitue par elle-même ni un empêchement au mariage ni une cause de nullité de l'union contractée ; Qu'elle ne touche non plus en rien à l'identité de la personne ; qu'elle ne peut donc motiver une action en nullité du mariage pour erreur dans la personne ; Qu'en le jugeant ainsi et en rejetant la demande en nullité de son mariage formée par Zoé Herbin, et motivée sur l'ignorance où elle avait été à l'époque du mariage de la condamnation à quinze ans de travaux forcés qu'avait antérieurement subie Berthon, son mari, et de la privation des droits civils et civiques qui en avait été la suite, l'arrêt attaqué n'a fait qu'une juste et saine application des articles 146 et 180 du Y... Napoléon. LA COUR REJETTE, […]

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Document 2 : Cass. Civ. 1ère, 13 déc. 2005, n° 02-21259 : Bull. civ. I, n° 495, p. 416 Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : Attendu que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 11 décembre 1995 ; que Mme Y... a engagé une action en nullité du mariage sur le fondement de l'article 180, alinéa 2, du Code civil en soutenant avoir découvert, le soir de son mariage, que son mari entretenait une liaison avec une femme mariée ; Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 20 décembre 2001) de l'avoir déboutée de sa demande, alors, selon le moyen : 1 / que l'erreur sur les qualités "substantielles" de la personne ne saurait s'apprécier de façon purement abstraite, sans considération pour les convictions religieuses ou philosophiques qui ont pu déterminer le consentement de l'autre partie, qu'en refusant de prononcer la nullité du mariage contracté par Mme Y... au motif "qu'en l'état actuel des moeurs "la liaison durablement entretenue par M. X... avec une femme mariée ne pouvait pas constituer une cause de nullité du mariage, sans rechercher si, au regard des convictions religieuses très ancrées de Mme Y..., apparemment partagées par M. X... et communes à tout leur environnement social, cette liaison adultérine cachée à Mme Y... n'avait pas pu caractériser une erreur déterminante du consentement de celle-ci, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 180 du Code civil; 2 / qu'il était soutenu, et de surcroît non contesté, que la liaison que M. X... entretenait depuis sept ans avec une femme mariée s'était prolongée au moins jusqu'au matin même de son mariage civil avec Mme Y..., qu'en se bornant à énoncer que Mme Y... "ne prouve pas" que M. X... ait eu l'intention de continuer à entretenir cette liaison après son mariage, sans rechercher si le comportement de M. X... n'était pas objectivement incompatible avec la fidélité due au lien matrimonial et la loyauté des époux qui constituaient les qualités essentielles sur la foi desquelles Mme Y... avait donné son consentement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 180 du Code civil ; Mais attendu que la cour d'appel, qui s'est livrée à la recherche prétendument omise, a relevé que si M. X... reconnaissait avoir entretenu avant son mariage des relations avec une autre femme, il n'était pas démontré qu'il ait eu l'intention de poursuivre cette liaison après son mariage, en dépit des allégations malveillantes de cette personne sur la persistance de leur relation jusqu'au jour du mariage ; qu'elle a pu en déduire que le fait pour M. X... d'avoir caché à son épouse l'existence de cette relation antérieure ne constituait pas une tromperie sur ses qualités essentielles et a souverainement estimé que les convictions religieuses de Mme Y... ne permettaient pas d'établir que celle-ci n'aurait pas contracté mariage si elle avait eu connaissance de cette liaison passée de son mari dans la mesure où les aspirations de M. X... à une union durable n'étaient nullement mises à mal par cette circonstance ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;

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Document 3 : TGI Lille, 1er avr. 2008 (extrait) Exposé des faits et de la procédure : « X, de nationalité française, s’est marié avec Y le 8 juillet 2006 à (...). Par acte du 26 juillet 2006, il a fait assigner Y devant le tribunal de céans, arguant avoir été trompé sur les qualités essentielles de sa conjointe. » Prétentions des parties : Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 31 octobre 2007, X sollicite l’annulation du mariage sur le fondement de l’article 180 du Code civil. Il indique qu’alors qu’il avait contracté mariage avec Y après que cette dernière lui a été présentée comme célibataire et chaste, il a découvert qu’il n’en était rien la nuit même des noces. Y lui aurait alors avoué une liaison antérieure et aurait quitté le domicile conjugal. Estimant dans ces conditions que la vie matrimoniale a commencé par un mensonge, lequel est contraire à la confiance réciproque entre époux pourtant essentielle dans le cadre de l’union conjugale, il demande l’annulation du mariage.Y demande au tribunal de : lui donner acte de son acquiescement à la demande de nullité formée par X. Décision : « Attendu qu’aux termes de l’alinéa 2 de l’article 180 du Code civil, s’il y a eu erreur dans la personne, ou sur des qualités essentielles de la personne, l’autre époux peut demander la nullité du mariage ; que, par ailleurs, l’article 181 — dans sa rédaction issue de la loi du 4 avril 2006 applicable à la cause — précise qu’une telle demande n’est plus recevable à l’issue d’un délai de cinq ans à compter du mariage ou depuis que l’époux a acquis sa pleine liberté ou que l’erreur a été par lui reconnue ; Attendu qu’il convient en premier lieu de constater qu’en l’occurrence, l’assignation a été délivrée avant l’expiration d’un délai de cinq années suivant la célébration du mariage et la découverte de l’erreur ; que l’action en annulation du mariage s’avère dès lors recevable ; Attendu qu’en second lieu il importe de rappeler que l’erreur sur les qualités essentielles du conjoint suppose non seulement de démontrer que le demandeur a conclu le mariage sous l’empire d’une erreur objective, mais également qu’une telle erreur était déterminante de son consentement ; Attendu qu’en l’occurrence, Y acquiesçant à la demande de nullité fondée sur un mensonge relatif à sa virginité, il s’en déduit que cette qualité avait bien été perçue par elle comme une qualité essentielle déterminante du consentement de X au mariage projeté ; que dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande de nullité du mariage pour erreur sur les qualités essentielles du conjoint ; […] Par ces motifs, le tribunal, statuant en audience publique, contradictoirement et en premier ressort, après communication de l’affaire au ministère public, prononce l’annulation du mariage célébré le 8 juillet 2006 à (...) (acte n° 50) entre X et Y, ordonne la transcription du présent jugement en marge de l’acte de naissance des parties et de l’acte de mariage (...) ». C. Bernard-Xémard, « L’hymen jeté sur la place publique », Revue Lamy de Droit civil, 2008, n° 51 Mariage, nullité, virginité. Trois mots qui ne cessent d’agiter la presse générale comme spécialisée, depuis maintenant plusieurs semaines. À l’origine de ce qui est devenu un débat de société, une décision du tribunal de grande instance de Lille qui a accueilli la demande de nullité de mariage introduite par un époux pour mensonge relatif à la virginité de sa conjointe. Analysant la décision rendue, l’auteur démontre que la polémique élevée autour de celle-ci est en réalité quelque peu excessive. En matière d’annulation de mariage, il y a eu, au XIXe siècle, l’affaire Berton mettant en scène une jeune fille qui, découvrant après son mariage qu’elle avait épousé un forçat, avait connu la désillusion supplémentaire de voir sa demande en nullité de l’union rejetée par la 5

Cour de cassation (Cass. ch. réunies, 24 avr. 1862, DP 1862, I, p. 153 et concl. proc. gén. Dupin). Presque cent cinquante ans plus tard, une autre affaire, celle de la mariée qui n’était plus vierge, est en passe de connaître un retentissement encore plus grand. L’affaire aurait indéniablement dû rester privée. Mais dès la nuit de noces, elle a été révélée aux familles. Elle a ensuite été saisie par la communauté juridique (v. notamment, Labbée P., La mariée n’était plus vierge, D. 2008, p. 1389 ; Rome F., La mariée avait un vice caché, D. 2008, p. 1645 ; Murat P., De la virginité dans le mariage, blog Dalloz 2 juin 2008 ; Cheynet de Beaupré A., À l’ombre des jeunes filles en fleurs, blog Dalloz 2 juin 2008). Et, parallèlement, les médias ont fait en sorte qu’elle soit connue de la France entière. Ainsi, depuis quelques semaines, les articles de presse consacrés au sujet se multiplient, les opinions se font et se défont, les forums de discussion s’enchaînent et se déchaînent, chacun (journaliste, professionnel du droit, spécialiste de l’islam, etc.) y allant de son propre commentaire. Tels qu’ils sont exposés dans le jugement rendu le 1er avril 2008 par le tribunal de grande instance de Lille, les faits sont très précisément les suivants. Le 8 juillet 2006, M. C s’est marié avec Mme H « après que cette dernière lui a été présentée comme célibataire et chaste ». Il a « découvert qu’il n’en était rien la nuit même des noces ». Son épouse « lui aurait alors avoué une liaison antérieure et aurait quitté le domicile conjugal ». Dix-huit jours seulement après la célébration du mariage, M. C a fait assigner sa femme (d’abord devant le tribunal de Céans, mais l’affaire a fait l’objet d’une radiation en septembre 2007 pour défaut de diligences des parties, puis devant le tribunal de Lille), arguant avoir été trompé sur les qualités essentielles de sa conjointe. Plus précisément, il a fait valoir que « dans ces conditions (...), la vie matrimoniale a commencé par un mensonge, lequel est contraire à la confiance réciproque entre époux pourtant essentielle dans le cadre de l’union conjugale ». Il a donc demandé l’annulation du mariage sur le fondement de l’article180, alinéa 2, du Code civil, en invoquant l’existence d’une « erreur sur les qualités essentielles de la personne », laquelle est, depuis la loi n° 75-617 du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce, une cause d’annulation du mariage. Sa requête a été, on le sait, accueillie par le tribunal. Mais peut-être ignore-t-on plus en quels termes elle l’a été. De manière classique, le tribunal a précisé, en premier lieu, que l’action en nullité du mariage fondée sur l’erreur n’est, en vertu de l’article 181 du Code civil, plus recevable à l’issue d’un délai de cinq ans à compter du mariage ou depuis que l’époux a acquis sa pleine liberté ou que l’erreur a été par lui reconnue. Il a constaté que, en l’espèce, l’assignation avait bien été délivrée dans le délai légal. En second lieu, le tribunal a rappelé, conformément à la tradition juridique française, que l’erreur sur les qualités essentielles du conjoint suppose, pour être retenue, « non seulement de démontrer que le demandeur a conclu le mariage sous l’empire d’une erreur objective, mais également qu’une telle erreur était déterminante de son consentement ». Autrement dit, la notion d’erreur sur les qualités essentielles du conjoint doit être analysée sous un angle double, c’est-à-dire à la fois objectivement et subjectivement. L’interprétation objective des qualités essentielles consiste à rechercher ce qui, in abstracto, est de l’essence du mariage (v. sur ce point, Carbonnier J., La famille, l’enfant, le couple, PUF, 21e éd. refondue, 1995, p. 424). Ainsi, les qualités essentielles sont « celles qui participent de l’essence du mariage et dont l’absence est de nature à perturber gravement une vie normale de couple » (Leveneur L., La famille, Montchrestien, 7e éd., 1995, n° 736). À ce titre, on admet sans difficulté que chaque époux est en droit d’attendre, de son conjoint, un « minimum physiologique » et un « minimum psychologique », pour reprendre les termes du doyen Carbonnier (Carbonnier J., La famille, l’enfant, le couple, op. cit.). C’est pour cette raison que l’on admet classiquement que le mariage peut être annulé lorsque le conjoint s’est trompé sur l’aptitude de son époux à avoir des relations sexuelles normales (v. en ce sens : CA Paris, 26 mai 1982, Gaz. Pal. 1982, 2, jur., p. 519, note M. J.) ou lorsqu’il a ignoré que celui6

ci ne disposait pas de toute son intégrité mentale (v. notamment, TGI Rennes, 9 nov. 1976, D. 1977, jur., p. 539, note Cosnard). La question qui se pose donc ici est celle de savoir quelle est, très précisément, la qualité essentielle du conjoint qui, en l’espèce, faisait défaut. Dans ses conclusions, le demandeur faisait valoir, on l’a déjà souligné, que, comme son épouse lui avait caché qu’elle n’était plus vierge, « la vie matrimoniale a commencé par un mensonge, lequel est contraire à la confiance réciproque entre époux pourtant essentielle dans le cadre de l’union conjugale ». Autrement dit, il faisait en quelque sorte valoir que la loyauté et la sincérité sont des qualités essentielles du mariage et que du fait du mensonge de sa femme, il avait été trompé sur lesdites qualités. L’argumentation consistait donc à invoquer l’existence d’un mensonge (qui engendre une erreur sur une qualité essentielle qu’est la loyauté) et non à se fonder sur le contenu du mensonge lui-même (en l’espèce, le défaut de virginité). Cette subtilité dans l’argumentation juridique s’explique, pensons-nous, de la manière suivante : s’appuyer, dans ses conclusions, directement sur le défaut de virginité de son épouse pour faire prononcer la nullité de son mariage sur le fondement d’une erreur sur les qualités essentielles comportait, sans doute, davantage de risques pour le demandeur. En effet, peut-on, de manière objective, considérer que l’erreur commise sur le défaut de virginité de l’épouse constitue une erreur sur les qualités essentielles de la personne ? La réponse est indéniablement négative et la doctrine n’avait pas manqué, il y a quelques décennies déjà, de le souligner (v. Pradel J., comm. sous TGI Le Mans, 18 mars 1965, D. 1967, jur., p. 203, qui écarte également...


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