Y a t-il une vérité des apparences PDF

Title Y a t-il une vérité des apparences
Course Philosophie
Institution Université de Bourgogne
Pages 3
File Size 102.8 KB
File Type PDF
Total Downloads 25
Total Views 138

Summary

Méthodologie dissertation...


Description

Y a t-il une vérité des apparences ?

On peut définir l'apparence comme la manière dont une personne ou une réalité se présente à nous : c'est l'aspect extérieur d'une chose. Or, l'adage populaire nous conseille depuis longtemps de nous méfier des apparences car celles-ci sont trompeuses. En effet, nos cinq sens nous permettent d'avoir un rapport immédiat avec le monde et donc on peut se faire une idée, basée uniquement sur la première impression que renvoie un physique. Mais l'apparence est-elle toujours en adéquation avec la nature profonde d'un être humain ? Il semblerait que la vérité soit dans son sens le plus courant le caractère d'un savoir conforme à la réalité résultant d'une analyse objective. Ainsi, obtenir une vérité absolue supposerait de voir au delà des apparences. Dans ce cas, faut-il se méfier des apparences pour prétendre à un savoir absolu? N'y aurait-il pas néanmoins une part de vérité en elles ? Pour répondre à ce problème, nous verrons tout d'abord que l'apparence appartient au monde sensible. Ensuite, nous envisagerons de confronter la connaissance avec l’expérience. Enfin, nous verrons que dans certains domaines, l'apparence peut avoir à elle seule une valeur de vérité. I/ L'apparence est sensible: L'apparence relève avant tout du domaine du sensible. En effet, elle est perçue de façon immédiate par les sens et non par la raison. Ainsi, elle relève du paraître et non de l'être intérieur. De ce fait, on peut penser que l'accès à l'aspect extérieur n'est pas forcément suffisant voire même à l'opposé de ce qu'une personne ou une chose peut être réellement. Le rapport sensible possède effectivement un caractère subjectif, c'est-à-dire que l'expérience que nous faisons du monde qui nous entoure nous est propre à chacun selon la façon dont nous la percevons. Ainsi, une perception étant singulière et subjective, on peut douter de sa véracité. En effet, l'être et le paraître sont deux choses différentes qui peuvent parfois s'opposer. Comme le distingue le philosophe anglais John Locke dans son Essai sur l'entendement humain, une substance contient des qualités premières et des qualités secondaires. Les qualités premières sont celles qui existent dans l'objet indépendamment de l'esprit humain telles que la taille, la forme, la matière etc. Les qualités secondaires en revanche n'existent pas dans l'objet lui même mais dans l'esprit qui perçoit les effets que les qualités premières produisent sur lui. Il peut s'agir de la couleur, de l'odeur ou de la texture par exemple. Néanmoins, comme l'a reconnu Locke, nos sens ne sont pas toujours fiables car chaque espèce vivante possède un appareil psychique qui reconstruit ce qu'elle perçoit d'une façon n'appartenant qu'à elle. De ce fait la couleur rouge perçue par une personne n'est pas forcément perçue de la même intensité chez une autre. Ainsi, on peut dès lors penser que le rapport sensible n'est pas suffisant pour savoir. Pour cette raison, l'apparence peut même s'avérer être une illusion. Platon a toujours

reproché aux sophistes de jouer avec les apparences car ils se souvenaient des choses mais n'en avaient pas le savoir. C'est ce jeu de l'apparence de la vérité qu'il dénonce dans le Phèdre en prenant l'exemple de l'illusion véhiculée par l'écriture. En effet, l'auteur joue sur le double sens du mot grec Pharmakon qui signifie à la fois « remède » mais aussi « poison ». Ainsi, les différents sens attribués aux mots peuvent nous éloigner de la vérité car l'écriture n'est que l'imitation de la parole. Qu'il soit remède ou poison, le pharmakon est mauvais pour Platon. L'écriture endort la mémoire contrairement à la vérité de l'oral (qui vient de l'intériorité) qui est le déploiement de celle-ci. Par la pluralité des traductions, la pensée orale ne peut donc pas être parfaitement retranscrite. De ce fait, l'écriture n'a pas une valeur de vérité et c'est en ce sens qu'elle est un « poison » pour la mémoire. Elle est extérieure à cette dernière et est productrice d'opinion et non de science.

II/ Connaissance et expérience : C'est en effet cette dernière, la science, qui symboliserait la valeur de vérité car elle serait précisément la connaissance en tant qu'elle s'oppose radicalement à l'opinion qui se contente du rapport subjectif, donc de l'apparence. Comme l'affirmait Gaston Bachelard dans La formation de l'esprit scientifique, « L'opinion ne pense pas ». Celle ci semble en effet nous aveugler car elle se nourrit uniquement d'une constatation personnelle, donc subjective. Elle n'est pas à la recherche de la vérité. La connaissance n'est pas immédiate, donc il semble qu'il faut aller au-delà des apparences. La sphère sensible ne semble ainsi pas se confondre avec la raison car la sensation est relative à chacun tandis que la démonstration amène à des faits universels et objectifs. L'accès à ce qui est résiderait donc dans cette tentative de dépasser la subjectivité de l'apparence. Cependant, il semblerait que dans le domaine scientifique la connaissance débute avant tout d'une théorie qui ne peut être vérifiée qu'avec l'expérience sensible. La sensation et la raison semblent pouvoir s'accorder pour accéder à la vérité car notre chemin vers la connaissance ne peut partir que de son paraître. C'est la thèse que soutient Kant dans Critique de la raison pure en affirmant que "Des intuitions sans concept sont aveugles, des concepts sans intuitions sont vides". L'auteur assimile l'intuition à la façon dont nous comprenons des informations sensibles contrairement au concept qui s'identifie à la faculté d'analyser une chose à partir de ces données sensibles fournis par cette intuition. Cette dernière serait le point de départ de l'analyse d'un phénomène car elle est immédiate et donc arrive en premier dans l'esprit du sujet avant de pouvoir être analysée. En outre, par le terme d'"intuition" on comprend d'emblée que la connaissance ne provient pas uniquement d'une réalité extérieure (donc du concept) mais aussi d'une réalité intérieure (l'entendement, la sensibilité). Autrement dit, pour connaître réellement un phénomène, la sensibilité est indissociable de l'intelligibilité. Ainsi, si l'un est pensé

sans l'autre, le sujet ne peut pas prétendre à un savoir vrai. III/ La vérité en Art : On comprend donc que l'apparence est insuffisante pour s'assurer de connaître la vérité à propos d'une chose ou d'une personne. Cependant, il semble exister une vérité des apparences dans certains domaines. Prenons l'exemple de l'art. Dans ce contexte, l'apparence est la seule chose qui nous permet de comprendre une œuvre puisque tout le travail et le message de l'artiste réside dans sa beauté. Elle est la matérialisation des pensées d'un artiste, ce qui sert d'intermédiaire pour communiquer ses émotions à celui qui la contemple. Il semble donc nécessaire d'entretenir un rapport sensible avec elle. Les êtres humains sont certes des êtres doués de raison mais ce sont aussi des réacteurs sensibles: c'est pour cette raison que nous sommes capables de réceptionner le message émotionnel d'un auteur à travers son œuvre. Mais si le jugement esthétique dépend donc de la sensibilité, dans ce cas il est subjectif. Dès lors, le jugement du goût ne fera pas objet d'une démonstration puisqu'il renvoi à une subjectivité relative à un sujet. Cependant, quand nous disons « ceci est beau » et non « cela me plaît », notre jugement prend bien une forme générale par le biais de caractéristiques objectives de beauté de l'objet. Dans ce cas notre jugement pourrait être définit comme objectif, voire se prétendre universel. C'est d'ailleurs en dépit de ce subjectivisme radical que Kant, dans Esthétique, va essayer de penser une certaine objectivité du jugement de goût : Il pense tout d'abord que d'une part, l'universalité du jugement de goût est garantie par le caractère désintéressé du jugement. Autrement dit, lorsque nous disons « cela est beau, cela me plaît », ce n'est pas un jugement d'agrément. Nous ne nous intéressons pas à l'existence de l'objet : en effet, l'objet représenté dans un tableau par exemple n'est pas jugé beau en lui-même. Ce qui nous plaît n'est pas l'objet réel mais sa représentation. D'autre part, Kant émet l'hypothèse d'une sensibilité commune à tous les hommes. Autrement dit, il pense que cette sensibilité commune garantirait le jugement de goût et donc son universalité. Interpréter une œuvre d'art ne consisterait pas à chercher à lui attribué une vérité unique mais plutôt à montrer que sa vérité ne s'épuise pas dans une seule interprétation.

Pour résumé, l'apparence appartient au monde sensible tandis que la vérité semble de prime abord s'assimiler au monde intelligible. D'un point de vue chronologique, le sensible intervient avant l'intelligible dans l'esprit humain. En effet, un phénomène nous apparaît avant de pouvoir être pensé car notre perception est immédiate et que notre réflexion résulte de cette sensation. On peut donc conclure que pour atteindre la vérité, il est nécessaire de remettre en question l'apparence. Cependant, celle-ci n'est pas toujours synonyme de mensonge et elle semble même détenir la vérité en elle même dans certains domaines comme l'art....


Similar Free PDFs