3 - L\'État, une forme universelle d\'organisation des sociétés PDF

Title 3 - L\'État, une forme universelle d\'organisation des sociétés
Course Sciences Sociales Et Méthodes : Science Politique
Institution Université Paris Dauphine
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DEGEAD 1...


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L’État, une forme universelle d’organisation des sociétés ?  Distinguer la notion de pouvoir et la notion d’État : On peut dire que l’État n’est qu’une des modalités possibles de l’exercice du pouvoir au sein d’une société. Ce qui caractérise les sociétés contemporaines est que l’État est la modalité principale. Mais il y a d’autre types d’exercice de pouvoir qui ne sont pas produits par l’État (ex : pouvoir économique au sein des entreprises avec une hiérarchie, aussi en dehors de l’entreprise avec le lobbying, pouvoir financier, pouvoir au sein de l’enseignement, au sein de la famille, au sein de la religion, pouvoir culturel, médiatique etc.) L’État n’est que l’une des composantes du pouvoir (pouvoir ≠ État). Le pouvoir est la capacité à agir et/ou à faire agir les autres à sa place ou selon sa volonté avec ou sans intention expresse (l’ordre n’a pas besoin d’être énoncé, formulé, il est anticipé par celui qui le subit). Toute société est traversée par des formes de pouvoirs mais on peut se demander si toutes sont traversées par l’État. L’État est-il nécessaire à la vie en société ? Est-il une catégorie universelle dans l’exercice du pouvoir ? Le pouvoir (ou concept de puissance), Weber le définit comme toute chance de faire triompher au sein d’une relation sociale sa propre volonté même contre des résistances et peut importe sur quoi repose cette chance. Il distingue ce concept de puissance avec celui de domination (Herrschaft) qui est la chance de trouver des personnes prêtes à obéir à un ordre. Cette domination décrit une situation où l’on trouve le consentement potentiel d’un public sur lequel va s’exercer cet ordre, il nécessite un public disposé à obéir. Cela permet de sortir de l’idée substantialiste du pouvoir (idée que le pouvoir est une substance que l’on gagne, que l’on perd, que l’on peut se transmettre = matérialisation du pouvoir). On tend à projeter dans des objets le pouvoir, avec par exemple la couronne, le sceptre etc. Or cela tend à écarter le Herrschaft, la relation constante entre la public disposé à obéir et le dominant. Idée qu’une fois que l’on possède un pouvoir, il est intransitif (peut s’exercer de manière générale). Ex : A a du pouvoir sur B et B a du pouvoir sur C donc A a du pouvoir sur C. Or dans les faits, c’est plus compliqué que ça. Le chef d’entreprise a du pouvoir sur ses salariés, un salarié a un pouvoir sur ses enfants mais le chef n’a pas de pouvoir sur ces enfants. Il y a une logique relationnelle du pouvoir. Le pouvoir ne s’exerce pas dans le vide, mais toujours dans une relation sociale et c’est celle-ci qu’il faut étudier. Weber va chercher à caractériser ces différents types de domination. Pierre Clastres : ethnologue qui va regarder le fonctionnement de sociétés lointaines de la notre. Ethnocentrisme : non prise de recul sur son propre système de valeurs à partir duquel on va juger d’autres sociétés environnantes.

Le rôle de l’ethnologue est justement de prendre des distances par rapport à cela, de ne pas décrire les sociétés comme présentant un manque lorsque celles-ci diffèrent. Réflexion téléologique : l’histoire est guidée vers une destination donnée. Ce raisonnement s’est exercé profondément sur l’analyse des sociétés, les sociétés auraient pour destination la constitution d’un État. Concept d’évolutionnisme : loi tendancielle qui s’imposerait à tous les corps sociaux. Clastres nous dit de révoquer ce type de jugement normatif, l’ethnologue doit d’abord les comprendre. En comprenant mieux les autres, on comprend mieux la notre (société). Ce détour par les autres sociétés nous fait prendre du recul sur ce qui nous paraît évident et naturel dans notre société. Le fait que ces sociétés aient le temps d’avoir des loisirs, de développer des arts ne les inscrit pas dans une subsistance. Ces sociétés n’ont pas de politique dans le sens où il n’y a pas de concurrence pour le pouvoir, pas d’institutions (politique publique). Mais il y a une politique dans le sens « le politique » = mode de régulation de la société sur elle-même. Ce sont des sociétés pourvues d’un mode de régulation de la société mais dépourvues d’État. Ces sociétés se caractérisent comme des sociétés anarchiques, sans centre spécialisé du pouvoir. Anarchie (sens strict) : absence de pouvoir Il y a un chef reconnu différent des autres mais en même temps sans pouvoir coercitif. Il bénéficie d’un grand prestige, n’a comme grand pouvoir que la parole (en général vieux messieurs qui n’a plus la capacité de se battre pour diriger). Sa parole est conciliatrice. Instance très particulière qui n’exerce pas un pouvoir politique coercitif mais qui exerce une fonction politique de régulation et qui permet de régler les conflits du groupe. L’État est un centre monopoliste du pouvoir. Contrôle assez strict des comportements sans qu’il y ait d’autorité centrale. Sociétés sans État mais avec du politique. Clastres rajoute que ces sociétés ne sont pas seulement sans État mais contre l’État. Idée que cette société parvient à vivre et à se développer sans avoir recours à l’État, cette absence ne provient pas d’une incapacité mais d’un refus de toute différenciation politique du corps social. C’est une société qui milite contre l’émergence d’une autorité politique centralisatrice. Pour Clastres, il n’y a pas de lien de nécessité mécanique entre un certain mode économique et un certain mode politique. Il n’y a pas de prima de l’économique sur le politique. Clastres compare deux groupes indiens qui ont deux groupes d’organisation différents et avec ces deux mode économique différents mais les sociétés ont le même type d’organisation politique. Il n’y a pas de lien univoque entre l’économie et le politique. Contre l’idée marxiste que c’est l’infrastructure économique qui détermine la superstructure politique (système d’organisation politique). Clastres dément cette théorie. Il renverse même la perspective

en disant que ces sociétés primitives donnent un prima au politique qui se caractérise par un choix libéré de se préserver de l’apparition d’un appareil politique spécialisé. Conclusion : l’État n’équivaut ni au politique ni au pouvoir. On peut faire société sans État et sans monopolisation du pouvoir. On peut même produire du politique sans chef. Un État exerce son pouvoir sur un territoire et une population.

Texte de Norbert Elias, La dynamique de l’Occident L’État est un produit social particulier, c’est un produit d’une construction sociale, politique et culturelle qui en Europe s’est opérée sur plusieurs siècles. C’est une voie particulière de construction qu’il faut pouvoir analyser, mais ce processus de consolidation de l’État a emprunté des formes et des rythmes différents d’un pays à un autre. Entre le 6ème et le 9ème siècle, c’est l’avènement de la féodalité. L’empire romain d’Occident s’écroule avec la prise de Rome en 476. On a, sur toute la zone de l’Europe de l’Ouest, une situation politique marquée par un éclatement de l’autorité politique, une multitude de royaumes coexistent. C’est la période de féodalité, parcellisation du pouvoir. Dans cette configuration, il y a quand même des territoires plus importants que d’autres. Certains souverains, qui disposent de territoires relativement grands mais qui doivent en passer par des intermédiaires pour administrer leur territoire. Pépin Le Bref et Charlemagne vont agrandir considérablement leur royaume à la fin du VIIIème siècle sur plus d’un million de km² et se servent de leurs meilleurs compagnons pour administrer le territoire. Multiplication des terres de l’empire qui passent sous le contrôle des comtes, ils sont seigneur sur ce territoire qu’on appelle fief. Le Suzerain domine les comtes via une relation de vassalité. Le vassal peut luimême avoir un grand territoire voir même trop grand alors il fera appel par relation de vassalité à un vavasseur. Chacun est sous l’autorité de celui du dessus.

Pyramide vassalique

Suzerain Vassal Vavaseur

Certains vassaux vont commencer à s’émanciper de leur suzerain. La délégation ne va plus être respectée, pour un droit nouveau (patrimonialité). Le Quiercy de S/ Oise accorde à ces

comtes la patrimonialité. Début de la noblesse héréditaire qui deviendra la noblesse de sang. Progressivement, les grands féodaux ne vont plus tenir directement du roi leurs fiefs mais directement de leurs aînés. Le droit de gouverner son fief n’est plus lier au suzerain. Le vassal est complètement autonome sur son fief = naissance des seigneuries. Mosaïque d’unités indépendantes. Dans cette configuration là, les seigneurs disposent de moyens économiques et militaires relativement équivalents. La plupart sont en concurrence pour accroître leur territoire. Le roi n’est plus qu’un seigneur parmi d’autres au plan militaire et économique et dont l’autorité ne dépasse pas son propre territoire personnel. On peut même dire que ses ressources économiques et militaires sont limitées à celles qu’il peut prélever sur son territoire personnel. Société marquée par une pyramide formelle des pouvoirs dans laquelle on retrouve un certain prestige au roi qui ne se traduit pas forcément dans la réalité. On peut considérer que dans cette société il y a une faible différenciation des fonctions car le fief est à la fois l’unité politique, judiciaire, militaire et économique. Il y a une place faite à l’Église qui quadrille tout le territoire, administre le culte, régente les naissances, les mariages, les morts, rythme la vie quotidienne dans les villages en donnant le temps. Depuis Clovis, l’Église consacre le roi et le considère comme intermédiaire de Dieu, lui donne ce supplément symbolique qui le différencie des autres seigneurs. Elias dégage un mécanisme récurrent de la vie social qu’il applique à la construction étatique, il nomme ce mécanisme la loi du monopole. Ce processus social nous dit que celui-ci surplombe le hasard et donc les capacités individuelles de tel ou tel roi, prince. Le seul rôle des hasards est d’accélérer ou de ralentir le processus. Cette loi du monopole dépasse les talents ou les défauts d’un tel ou d’un tel. N. Élias : On peut appliquer au roi de France, une remarque faite un jour au sujet d’un pionnier américain : « il ne voulait pas tout le terrain il voulait simplement le terrain à côté du sien. » Cette formule simple et précise explique comment le jeu d’innombrables ambitions et intérêts individuels qu’ils soient convergents ou qu’ils s’opposent peut donner naissance à un phénomène que personne n’a explicitement voulu ou programmé mais qui découle néanmoins des ambitions et actions d’un grand nombre d’individus. Il dit aussi que celui qui n’entre pas dans ce processus de monopolisation, qui ne fait pas la guerre, inévitablement va reculer. Ce processus s’impose aux individus quelque soit la volonté ou non des seigneurs. Processus social impersonnel qui s’impose à tous ceux qui occupent des positions de pouvoir. On est dans quelque chose qui dépasse les ambitions individuelles, que personne n’a voulu consciemment. À la base de cette dynamique, Élias isole deux monopoles : le monopole militaire et le monopole fiscal. Les deux se renforcent mutuellement. À mesure que le monopole fiscal croît, le monopole militaire se renforce et réciproquement. Ce processus va être démultiplié par la monétarisation de l’économie. Ces deux monopoles sont clés pour Norbert Élias car ils s’autoalimentent, l’un garantit la croissance de la force physique et l’autre garantit l’efficacité des systèmes de prélèvement. Autre monopole mais qui n’est pas clé = monopole juridictionnel.

Citation de Quentin Skinner (historien) : « La transition décisive est celle du passage de l’idée du souverain « défendant son état » (c'est-à-dire ni plus ni moins que préservant sa place) à celle de l’existence d’un ordre légal et constituée séparée, celui de l’État que le souverain a le devoir de défendre. » Au fur et à mesure que le monopole va se constituer, plus la compétition, la concurrence change de sens, de nature. Cette concurrence cette fois ne vise pas à contester le monopole (elle n’en a plus les moyens) en revanche la compétition change de nature car cette fois elle va résider dans une compétition pour les postes qui vont gouverner le monopole. La compétition va se jouer à l’intérieur du monopole et donc aussi avec des règles différentes (par exemple l’usage de la violence est réglementé). Exemple historique : Angleterre (jamais eu de monarchie absolue) ou milieu du 17ème en France avec la fronde (= révolte de l’aristocratie contre le roi afin de faire imposer leur influence dans l’exercice du pouvoir royal alors que Louis XIV est en bas âge). Cela traduit des rapports de forces entre groupes sociaux pour s’assurer des droits de pouvoir sur la royauté. Certains critères (taille du territoire, division/fragmentation du territoire, hétérogénéité de la population) font que des processus de monopolisation ont lieu plus lentement. Par exemple, en Allemagne, l’unité allemande (unité politique fédérale) va se faire à Versailles après la victoire de la coalition contre la France. Différents rythmes mais bien un processus de convergence. Les processus de démocratisation et de constitution de l’État ne se superposent que plus tard. Constructions étatique et démocratique ne se superposent pas forcément....


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