Autorité et légitimité PDF

Title Autorité et légitimité
Course Science Politique
Institution Institut d'Études Politiques de Paris
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Michel Hastings...


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La domination politique

Leçon 4 : Autorité et légitimité Comment justifier que ce soit d’un point de vue moral, sociologique, philosophique que nous collaborions à la domination qui s’exerce sur nous ? Comment un être rationnel et raisonnable peut-il accepter d’être victime de cette domination ? Quels sont les fondements de l’obéissance ? L’obéissance est extrêmement majoritaire, c’est une relation quasiment normale de la vie en société. Il faut regarder du côté du consentement : consentir, c’est plus qu’accepter. On peut accepter par peur, par résignation, par fatalisme... Le consentement, c’est un acquiescement, un acte rationnel de volonté de participer à la relation de pouvoir. J’accepte délibérément cette asymétrie de la relation de pouvoir. Le consentement c’est une part de notre liberté fondamentale mais une part de liberté qui paradoxalement, se porte sur une privation de liberté. Suis-je libre d’accepter de réduire ma liberté ? Sur la question de l’avortement, les partisans mettent en avant le consentement libre et rationnel de la femme. Au contraire, lorsqu’on a voulu combattre la prostitution, les féministes ont dit qu’on ne peut pas consentir librement à un service sexuel payant. La question du consentement est essentielle parce qu’elle concentre toute la représentation que nous avons du citoyen libre. La deuxième question qui est derrière est celle du pouvoir consenti. Quand un pouvoir reçoit, de la part d’une société, un consentement, ce pouvoir est accepté : il s’agit d’un pouvoir légitime. La légitimité c’est la qualité d’un pouvoir dont l’acceptation se fonde non pas sur la coercition mais sur le consentement réputé libre de la population qui s’y soumet. Il faut distinguer la définition de la légitimité de la légalité. La légalité c’est la conformité d’un acte à des règles de droit. La légitimité c’est quelque chose d’autre qui découle fondamentalement d’une croyance dans ce que le pouvoir qui s’exerce sur moi correspond à des principes que j’accepte. Quand un pouvoir est légitime de mon point de vue, je le rapporte à un ensemble de valeurs morales qui constituent un bloc de croyance me convertissant à l’utilité, à la normalité de ce pouvoir. La légitime ne passe pas forcément par la légalité. Il peut y avoir des conflits entre la légalité d’un acte, d’un pouvoir et sa légitimité. C’est le fameux problème d’ Antigone de Sophocle. Cette question du consentement ouvre sur le mystère de l’obéissance. Pourquoi obéissons-nous ? Que recherchons-nous dans l’obéissance ? A quoi obéissons-nous quand on obéit ? La légitimation rappelle que nous sommes dans un processus car la légitimité n’est jamais acquise une fois pour toute. La légitimité se fabrique, s’entretient et peut se perdre. Un pouvoir n’est pas légitime il apparait comme tel. La notion de legimité est perpetuellement en changement. La notion de leigimité renvoie a une question du mystere de l’obesissance, un pouvoir legitime recevra de l’obesisance de la plu plart des assujetis. Une autoruité légitime doit chercher a faire obéir a partir d’un certain nombre d’elements, un element de confiance… Il est important de faire un distinctintion entre légitimité et légitimiation. A quoi obeit-on quand on obeit ? Qu’a besoin le pouvoir qui nous domine pour nous dominer ?

I.

Au cœur de l’obéissance, les mysteres de l’obéissance A. La force de la loi

La loi c’est une reference absolue qui echappe a la discussion et la remise en cause, elle est accroché a une substance exterieure, la loi vient d’une autorité qui est foncierement supérieure. Loi trascendente et innégociable. Cette chose supérieure, en fonction des epoques elles a été 1

legitimiée de manière differente (Antigone et la periode d el’antiquité, la Loi était accroché a la loi de la nature, une armonie naturelle), la cité est le lieu de vie en sacoiété car elle represente l’ordre de vie naturelle. La cité est construite dans l’aromonie meme de la nature. Une autre référence, le christianimise a appprté la Loi apporté par l’autorité divine, Dieu est la référene suppreme. Dans les lumieres la secularisation il a fallu apporter une nouvelle trascendence, d’où vient la loi chez nous ? du peuple, de sa propre légitimité. On obéit a la loi, on obéit a la puissance meme de la loi, pas a la petite voie qui applique la loi. On fonde une socieite politique par un engament, un contrat social, lier les différentes parties. Lorsqu’Antigone expose à sa sœur Ismène d’enterrer selon les coutumes son frère Polynice qui avait transgressé une loi de la cité, la réaction d’Ismène est d’être totalement effrayée. Elle a peur de la sanction assortie à la loi, qui peut être extrêmement violente. La loi est toujours l’expression d’une autorité, qui à cette époque ne pouvait être qu’absolue. Pourquoi la loi de la cité est à ce point importante ? Les lois de la cité ont toujours été prises dans une sorte de calque, de mimésis des lois de la nature. La référence que l’on avait pour les lois civiles, politiques, c’était l’ordre de la nature. Quelques siècles plus tard, on remplacera la nature par dieu. La force de la loi vient du prince, qui n’est qu’une représentation de dieu. Lorsqu’on obéissait à la loi, on obéissait à dieu. Désobéir à la loi, c’était désobéir au prince mais avant tout à dieu donc la sanction pouvait être terrible. Dans notre période moderne, la source de la loi n’est plus extérieure à la société elle-même. La source de la loi, c’est le peuple. La loi est désormais immanente, elle vient de nous. Elle est prise par une assemblée composée de nos représentants. Désormais, la force de la loi est dans l’origine du peuple. Lorsque nous obéissons à la loi, nous obéissons à l’outil que nous nous sommes donné pour régler la société. Quelle est la rationalité de désobéir à la loi qui vient de nous ? Montesquieu disait qu’être libre c’est se soumettre à la loi qu’on s’est donné. A quoi obéit-on lorsqu’on obéit à la loi ? On n’obéit pas forcément au policier qui est devant soi. Une vie en société ne peut pas reposer que sur la peur de sanction. Il faut transformer cet aspect négatif en un aspect positif : nous obéissons à la loi car elle est notre expression d’une citoyenneté libre et engagée. Cette question de légitimation de la loi comme outil de consentement, comme lieu de fabrication de l’obéissance des sociétés a d’abord été posée philosophiquement, de manière théorique pour ensuite déboucher sur de véritables institutions. Les premiers qui ont véritablement posé les jalons de cette intelligence de la loi sont les « contractualistes », ceux qui ont, à partir du XVIIème et jusqu’au XVIIIème siècle, réussi à développer l’imaginaire du contrat. Les contractualistes rappellent le lien tout à fait inédit qui va désormais exister entre ce nouveau souverain qui apparait (le peuple) et celui qui prend le nom de prince, de gouvernement : celui qui agit en notre nom. Quelle sera la base de ces relations ? Que vais-je donner en tant que peuple à ce souverain ? Quel pouvoir vais-je lui donner ? Quelles sont les limites de ce pouvoir ? C’est une fiction révolutionnaire : c’est la naissance du citoyen et la fin du sujet. Ces grands auteurs sont Hobbes, Locke, Rousseau. Hobbes, dans son texte sur Le Léviathan, invente que l’homme, laissé à lui-même, dans un état de nature, est incapable de construire une vie en société car il est en permanence traversé par des passions de mort, de destruction vis-à-vis de l’autre. On ne peut rien faire dans l’état de nature, ce n’est pas une vie de société. Il invente l’idée que cette vie étant insupportable, dans une sorte de sursaut, les êtres humains vont dire que ce n’est plus possible et vont décider de sortir de la 2

condition de l’état de nature. C’est la première étape de contrat, qui est un rassemblement horizontal des individus. Ils veulent trouver une solution à la nature dangereuse de l’homme : il faut se doter d’un outil, un pouvoir, un Léviathan, qui disposera de la possibilité de nous contraindre à vivre pacifiquement. On donne à ce pouvoir notre violence individuelle et si nous ne respectons pas le contrat d’obéit à ce pouvoir, la violence pourra se retourner contre nous. Le pouvoir hobbesien est un pouvoir consenti dans un cadre contractuel mais qui dispose d’un monopole de la violence légitime. Nous avons perdu une partie de notre liberté mais nous avons gagné une sécurité (individuelle et collective). C’est l’explication un peu fantasmée de la naissance des sociétés. Nous avons été libres de consentir, de donner un peu de notre liberté pour être capable un jour de vivre en société. Le contrat est la base de l’accord tacite que nous donnons au pouvoir. Nous ne nous révoltons pas car nous savons que nous sommes à l’origine du pouvoir qui nous gouverne. Les sociétés modernes, démocratiques, individualistes ont de plus en plus de mal à faire accepter leur pouvoir : il faut inventer des croyances nouvelles pour assurer un vivreensemble pacifique et durable.

B. Jouir de l’obéissance Qu’y-a-t-il de plaisant à être dominé ? On comprend le plaisir à dominer mais trouver un plaisir à obéir porte en nous un malaise. Pourtant, il y a bien un certain nombre de réponses qui ont été formulées. Gustave Le Bon, dans La psychologie des foules (1895), donne des conseils au gouvernant pour développer l’art de gouverner les foules. Comment limiter le potentiel de dangerosité des foules ? La thèse de Gustave Le Bon est de partir du constat que l’individu, aussi intelligent soit-il quand il est seul, dès lors qu’il entre dans une foule, dans une collectivité, voit ses comportements s’aligner sur celui du plus médiocre : l’homme en foule est travaillé de manière négative par l’« esprit de foule ». Nous perdrions tout sens du raisonnable, toute morale individuelle (supporters, lynchages). L’homme perd ses facultés de jugement moral dans une foule. Il suit la collectivité, même si ce n’est pas forcément dans le mauvais (enthousiasme patriotique). La solution que Le Bon préconise est que le gouvernement, la classe politique doit être capable elle-même de manipuler une foule. Plutôt que de laisser les foules se manipuler elles-mêmes, les élites politiques modernes doivent être des meneurs de foules. C’est la parole qui peut mobiliser les foules. Le prince moderne doit être un tribun. Nous sommes gouvernés par des mots, par la dimension symbolique des mots. L’obéissance est fabriquée par l’emprise conformiste de la foule. Solomon Hasch dans Les lois de la conformité, réalise une expérience sociale avec un groupe de dix étudiants dont neuf sont de mèche. L’expérience consiste à regarder des droites différentes et les étudiants doivent trouver la ligne la plus ressemblante à la ligne témoin. Les neuf de mèche disent une réponse fausse mais au final, le dernier à parler, le naïf, va s’aligner sur le comportement de ces camarades, dans un réflexe rassurant de conformité. Face à un nombre d’individus qui nous est supérieur, qui tous vont dans le même sens, notre jugement critique est travaillé de l’intérieur : soit je dis ce que je vois mais du coup je prends le risque social d’apparaitre isolé soit je me rallie en trouvant une rationalité à la dissonance qui est au fond de moi-même. S’il y a une unanimité des complices, la pression sera beaucoup plus forte et le dernier se rallie à 60% dans ce cas précis. L’obéissance se fabrique ici de manière horizontale : il n’y a pas d’ordre supérieur, ce sont les pairs qui par leur unanimité, leur pression sociale, conduisent à ce conformisme social. 3

Stanley Milgram dans Soumission à l’autorité cherche à expliquer les raisons pour lesquelles un individu obéit à un ordre. On prend un naïf, une personne tout à fait ordinaire qui doit injecter des chocs électriques à chaque mauvaise réponse de la personne en face. Cette relation de face à face est en fait un triangle car à côté du naïf, il y a l’expérimentateur (un médecin en blouse blanche) qui va donner l’ordre d’appuyer. Un nombre extrêmement important de personnes ordinaires sont capable d’aller jusqu’à obéir à des ordres qui peuvent provoquer la mort de l’individu. Ce que montre Stanley Milgram c’est le capital d’autorité et de légitimité dont dispose la personne en blouse blanche : c’est parce que cette personne est habilitée par le naïf comme une personne compétente que celui-ci obéit. Ce sont ces signes d’autorité et de légitimité qui emportent l’obéissance. La fabrication de l’obéissance est directement liée à la capacité du dominant à se doter d’une légitimité à donner l’ordre.

II.

Le processus de légitimation A. Les fondements de la légitimité chez Max Weber

Max Weber définit de la domination comme « la chance pour des ordres spécifiques de trouver obéissance de la part d’un groupe d’individus ». Max Weber introduit l’élément du consentement, qui était manquant dans sa définition du pouvoir. Pour Weber, le rapport de domination comporte un minimum de volonté d’obéir. Quels sont les différents types de justification que l’on donne à notre obéissance ? Quelle est la nature de la légitimité du pouvoir qui me donne des ordres et que je vais accepter ? Au nom de quoi j’obéis à ce pouvoir ? Weber distingue trois grands types de domination légitime, trois grandes bonnes raisons d’obéir à un pouvoir que nous construisons comme étant légitime : -

La domination traditionnelle qui repose sur la « croyance dans le caractère sacré des dispositions transmises par le temps des pouvoirs du chef ». On considère le pouvoir légitime car il est ancré dans une épaisseur historique longue et nous accordons à ces traditions, à ce temps long une valeur politique considérable. Le pouvoir traditionnel est celui qui parvient à nous faire croire qu’il marche dans les pas de ces ancêtres. C’est le mode de légitimation de l’Ancien Régime. Le temps immémorial est privilégié par cette croyance. Il y a un caractère immuable : on est dans une sorte d’immobilisme. Ces régimes sont très conservateurs dans leur mode de fonctionnement mais surtout très protecteur pour les élites sociales qui ne veulent pas être remplacées. - La domination légale-rationnelle : nous allons obéir à un pouvoir que nous construisons comme légitime parce que nous croyons en la légalité des règlements et du droit suivi par ce pouvoir. La valeur de légitimité du pouvoir auquel nous obéissons ce n’est pas le temps long qui la fabrique, c’est plutôt la légalité. Est pour nous légitimité un pouvoir qui respecte l’Etat de droit, la règle de droit, les lois constitutionnelles, la hiérarchie des normes... Un pouvoir légitime est un pouvoir qui se soumet non pas à la tradition mais à ce corpus des lois qu’il va respecter. Cette forme légale-rationnelle est celle dans laquelle une grande partie de nos systèmes politiques évoluent. Ce type de légitimité est le propre de notre époque contemporaine. C’est un lien politique abstrait, non pas personnalisé. Nous n’obéissons pas au chef en tant que tel mais à une entité qui elle-même obéit aux lois de la cité. - La domination charismatique : « la croyance en la qualité extraordinaire d’un personnage doué de forces surnaturelles ou surhumaines ». Nous obéissons à un pouvoir parce que nous lui prêtons la croyance que son détenteur est un personnage extraordinaire : une 4

sorte de guide, de leader, de führer, de caudillo. C’est quelqu’un qui va apparaitre comme le sauveur, le chef de guerre, le prophète, le héros que nous rencontrons en temps de crise. Ce ne sont pas des individus porteurs naturellement de charisme, ce sont des individus à qui la société porte un charisme. C’est un crédit qui vient des gens qui croient en. La personne charismatique a besoin de suiveurs. Cette domination charismatique intervient souvent dans des périodes de crise où les sociétés ont besoin de quelqu’un qui va les sortir de l’impasse. L’obéissance que je vais donner à ce pouvoir charismatique va reposer sur une « communauté émotionnelle » : le lien qui lie le personnage charismatique à ses fidèles est fondé sur des émotions très fortes. Une autre particularité est que si le chef charismatique apparait dans une situation de crise, le problème qui s’impose à lui est quand la crise est résolue. Peut-on maintenir le charisme dans le temps ? N’y a-t-il pas une usure du charisme ? Il est dur de routiniser le charisme : il faut transformer le charisme en tradition charismatique. Il y a des manières de routiniser le charisme : le culte de la personnalité. La mort du chef charismatique est toujours un moment d’effroi pour la société. La typologie de Max Weber met l’accent sur des croyances partagées par les membres des sociétés. C’est nous, dans notre phénomène de croyance, qui produisons la légitimité.

B. Les récits de légitimation La priorité pour tout pouvoir afin de recevoir un crédit de légitimité est d’être capable de produire un récit, une histoire de lui-même, une histoire de sa nécessité, de ses projets. A quoi adhère une société ? A quoi donne-t-elle crédit à un pouvoir ? Elle donne crédit à un récit, aux qualités positives que ce pouvoir va mettre en scène. Actuellement, le pouvoir en place en France a un crédit de légitimité relativement faible. Au lendemain des attentats, la cote de légitimité du gouvernement a été boosté car il a su incarner par des discours, des comportements, des manifestations une autorité solide qui racontait le récit de la nécessité de montrer une solidarité, de défendre les valeurs de la République. Les élites politiques ont su être des chefs de guerre, identifier le mal dans les termes que nous avions envie d’entendre. Ils ont parfaitement produit le récit de légitimité que nous étions prêts à leur donner dans cette période-là. Les attentats de Nice n’ont plus donné de possibilités pour rassurer les Français car les politiques ont été incapables de trouver le juste récit audible, acceptable après cet attentat : on ne pouvait plus dire « je suis là pour vous protéger ». Le très célèbre discours du 28 aout 1963 de Martin Luther King est emblématique puisqu’il vient parachever plusieurs semaines de marche des populations afro-américaines qui voulaient abolir les lois ségrégationnistes. Martin Luther King est un pasteur, il parle dans les termes du prophète Moise. Il est totalement inspiré. Il raconte l’histoire du peuple noir à sa manière, sur le modèle chrétien de la grande traversée.

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