Commentaire stylistique Phèdre (Racine) PDF

Title Commentaire stylistique Phèdre (Racine)
Course Stylistique Des Textes Narratifs
Institution Université de Toulon
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Commentaire stylistique de type CAPES entièrement rédigé....


Description

Commentaire stylistique - Phèdre (Racine)

Phèdre est une tragédie classique par excellence composée par le très célèbre dramaturge Jean Racine au XVII ème siècle. Cette pièce s’inscrit et respecte à la lettre les règles classiques de l’époque à savoir celle du temps, du lieu et de la bienséance. Phèdre, qui est l’épouse de Thésée aime Hippolyte (le fils de Thésée qu’il a eu avec sa première femme) ; dans la scène 3 de l’acte I, Phèdre fait donc cet aveu à sa nourrice Oenone. Comment Phèdre et Oenone, par un affrontement langagier, parvient- elles à révéler la nature tragique de cette pièce ? On étudiera alors dans un premier temps les procédés qui constituent cette scène d’aveu et dans un second temps la construction de ce dialogue qui tourne à l’affrontement. I. Une scène d’aveu A. Les embrayeurs : marqueurs du pathétisme et du lyrisme Dans cet extrait, on relève une multitude d’occurence qui place au centre de l’action Phèdre et qui permet de faire ressortir tout l’amour passionnel et interdit que comporte ce personnage ; on y perçoit la présence du pronom personnel sujet «Je» :« je t’en ai dit assez » « je meurs » « je rompt le silence » « je n’en mourrai pas moins » « ...que lui vais-je dire » « j’aime je tremble je frissonne...j’aime » (...) mais aussi, la forme tonique « Moi » : « Epargne-moi ». Par les pronoms possessifs « mes mains » « mon crime » « ... m’accable » « ma mère » « ma soeur ». Oenone lorsqu’elle s’adresse à sa maitresse elle évoque tout au long de cet extrait la deuxième personne du pluriel qui est la marque d’un respect hiérarchique (a niveau des classes sociales) « De quels remords êtes-vous déchirés? » « que faites-vous madame ? » « Aimez-vous ? » ... en revanche, il y a moins d’occurrences concernant Oenone si ce n’est la deuxième personne du singulier « tu » pour la désigner « tu connais » « quand tu sauras.. » etc. Ainsi que la forme tonique de la P2 avec « c’est toi qui l’a nommé ! ». De plus, la souffrance domine ce texte, ce qui oriente le spectateur et le lecteur vers un aveu dramatique ; Le dramaturge appel son lectorat à ressentir les sentiments. Il y a une dimension pathétique ; on relève le champ lexical de l’amour passionnel « l’amour » « amour blessée » « fureurs » et l’anaphore suivie des aposiopèses « j’aime...à ce nom fatal, je tremble, je frissonne . j’aime... » v43, 44 : mais il y a là l’impossibilité à nommer Hippolyte, ce qui est représentatif de cet amour interdit. Sans oublier les marques du lyrisme avec la répétition de la lettre O dans « O haine de Vénus ! O fatale colère » v2, qui est un appel à l’aide envers les Dieux. B. Une scène latente tragique ( fatum) - La condamnation et de l’interdit lié à cet amour incestueux prédomine ce texte ; on peut relever tout un champ lexical de cela avec « crime » « sang » « criminelle » « mourrez » « mort » « cruelle » « coupable » « funeste » « violence » (...) 1

En parallèle on relève un champ lexical de l’abomination : « affreux » « horreur » « déplorable » « misérable » « épouvanté ». La fatalité domine cette scène d’aveu : l’antithèse dans « ...mes mains ne sont point criminelles/ Plût aux dieu que mon coeur fût innocent comme elles ! » = criminelle // innocent : elle n’y peut rien contre la volonté d’aimer : elle est innocente d’aimer comme une criminelle. Elle commet un crime sur le plan sentimental par un amour naissant incestueux. Cette idée de « fatum » est représentative par le chiasme du vers 38 à 41 « Et quel mortel ennui contre tout votre sang vous anime aujourd’hui ? » / « Puisque Vénus le veut, de ce sang déplorable Je péris la dernière et la plus misérable » > Phèdre est enfermé dans une souffrance sans issue. Le présent de narration impose une lecture de l’instant présent et rend ainsi l’action très vivante. Ce présent participe à la dimension tragique par notamment l’effet de suspens qui s’installe « cherchez une autre main » « je t’en ai dit assez » (...) Mais on relève également le futur proche : « tu vas fuir le comble des horreurs ... » qui prépare a l’aveu. Le suspens perdure jusqu’à la toute fin : on relève la périphrase « tu connais ce fils de l’Amazone, Ce prince si longtemps par moi-même opprimé ? » : cela implique l’impossibilité de Phèdre à expliciter le nom de celui qu’elle aime . Cette périphrase est représentative de cet amour interdit et impossible. Enfin, la personne aimée est enfin explicitement dévoilée par Oenone « Hippolyte ? » auquel répond Phèdre « C’est toi qui l’as nommé ! » : nous somme ici en pleine tragédie du langage par l’impossibilité de nommer Hippolyte dans ce demi-aveu : le nommer serait de le rendre réel. II. Un dialogue qui tourne à l’affrontement A. La forme du dialogue et l’enchainement des répliques Il y a en effet un respect des tours de parole entre Phèdre et Oenone : les répliques s’enchainent à tour de rôles et sont assez brèves. On note seulement une grande réplique d’Oenone qui est l’expression de sa fidélité envers sa maitresse. Cependant, on perçoit des reprises lexicales qui sont des marqueurs de dialogisme interlocutif avec « Plût aux dieux que mon coeur ... » (Phèdre) => « Dont votre coeur encor doive être épouvanté » (Oenone) / « je meurs... » (Phèdre) => « Mourrez... » (Oenone)/ «… contre tout votre sang vous anime » aujourd’hui ?» (Oenone) => «...de ce sang déplorable » (Phèdre) . On pourrait alors penser qu’il y a une cohésion textuelle par la reprise de termes identiques or ce n’est pas le cas. On perçoit un affrontement langagier dans la mesure où, le personnage d’Oenone qui pousse Phèdre à la révélation pose des questions mais ne reçoit aucune réponse attendue : « Et quel affreux projet avez -vous enfanté sont votre coeur encore doive être épouvanté ? » > « Je t’en ai dit assez. »« Aimez-vous ? > De l’amour j’ai toutes les fureurs » / « Qui ? » > « Tu connais ce fils de l’Amazone... On parle alors ici de « 2

faux dialogue ». Phèdre ne répond pas aux questions de sa nourrice, et à la place, elle évoque les répercutions de ce lourd secret qui foudroie son esprit. B. Les actes de langage : Les actes illocutoires directes dans les phrases interrogatives : 1. Pour Oenone : La modalité interrogative est dominante : c’est Oenone qui pousse Phèdre à l’aveu : les principales interrogations sont directes (présence du point d’interrogation, de l’intonation et/ou de l’inversion sujet-verbe) : on en compte quatorze dans ce texte ; « Quoi ? De quelques remous êtes-vous déchirée ? Quel crime a pu produire un trouble si pressant ? . Cruelle, quand ma foi vous a-t-elle déçue ? / Songez- vous qu’en naissant mes bras vous ont reçu ? / A l’horreur de vous voir exposer à mes yeux ? » « Qui ? » (...). 2. Phèdre pose très peu de questions directes: on en relève seulement quatre : « quel fruit espères-tu de tant de violence ? » « Quel lui vais-je dire ? Et par où commencer ? » « Tu connais ce fils de l’Amazone...? » . Il y a donc là un déséquilibre face à sa servante Oenone. • Les actes illocutoires directes dans les phrases exclamatives : chez Oenone la modalité exclamative est minime par rapport à l’interrogation : on en compte seulement quatre : Et que me direz-vous qui ne cède, grands dieux ! » / Grand dieux ! / Juste ciel ! Tout mon sang dans mes veines se glace ! : Ces exclamations permettent à Oenone de faire paraître l’horreur et l’effroi de cet abominable aveu. C’est alors dans la modalité exclamative que Phèdre va beaucoup intervenir : on en relève six : « Plût aux dieux que mon coeur fût innocent comme elles ! » « vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée ! » « C’est toi qui l’a nommé ! » (...) Par ces actes directifs exclamatifs, on perçoit que Phèdre nie tout crime passionnel. Elle n’est selon elle, pas coupable de cet amour incestueux. D’ailleurs cette dernière exclamation « C’est toi qui l’a nommé ! » laisse voir une mauvaise fois de sa part. Elle se décharge de toutes responsabilités en sous-entendant à Oenone que ce n’est pas elle qui lui a dévoilé ce secret. • Les énoncés injonctifs : Ils sont à la fois présent chez Oenone et chez Phèdre. Même par cette différence sociale (valet / maitre) , on voit que de chaque coté, il y a des injonctions exprimant l’ordre : Les deux femmes ne se laissent pas faire : Par des actes directifs, elles expriment toutes les deux une envie de prendre le dessus sur l’autre (Oenone veut à tout prix savoir quel est ce secret et Phèdre veut a tout prix qu’Oenone arrête de poser des questions). Cependant on constate étrangement qu’Oenone utiles plus le ton injonctif que Phèdre : - Phèdre : « Lève toi ! » « Epargne moi le reste. » - Oenone : « Mourez donc, et gardez un silence inhumain »« Parlez : je vous écoute » / Délivrez mon esprit de ce funeste doute./ « cessez de m’offenser » Pour conclure cet extrait, on remarque que Phèdre est complètement désarmée et mal à l’aise à l’idée de répondre aux questions incessantes d’Oenone. On a vraisemblablement 3

affaire ici à un « faux dialogue » d’affrontement et de confrontation. Ces deux personnages ne se répondent pas directement et impose une attente qui devient angoissant.

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