TD n°4 responsabilité civile - La faute - évolution ou disparition PDF

Title TD n°4 responsabilité civile - La faute - évolution ou disparition
Course Droit civil
Institution Université d'Évry-Val-d'Essonne
Pages 4
File Size 94.5 KB
File Type PDF
Total Downloads 57
Total Views 130

Summary

dissertation La faute - évolution ou disparition...


Description

Droit civil Dissertation «!La faute : évolution ou disparition ?!»

«!Le fait de l’Homme n’engage la responsabilité de son auteur que si ce dernier a commis une faute!». En effet, pour Mireille Bacache-Gibeili, civiliste française, il faut nécessairement une faute pour engager la responsabilité de son auteur. Elle semble donc placer la notion de faute au sommet de la responsabilité civile, tout comme le fait le droit positif à l’avènement du Code civil de 1804. En effet, les rédacteurs du Code civil ont voulu faire de la faute l’élément fondamental de la responsabilité civile car la responsabilité était traditionnellement liée à la morale, ce qui impliquait une forte importance de la faute. Par ailleurs, cette notion est d’autant plus importante que la responsabilité pour faute a aujourd’hui valeur constitutionnelle (Conseil Constitutionnel, 22 octobre 1982). Pour autant, bien que cette faute soit l’élément axial de la responsabilité civile, elle ne trouve pas de définition dans le Code. Ce dernier ne fait que l’évoquer aux termes de l’article 1382 qui dispose que «!Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer!». Ce fut donc à la jurisprudence ou encore à la doctrine d’en délimiter les contours. En effet, dans une décision en date du 16 juillet 1953, la 2ème Chambre civile de la Cour de cassation affirme que «!la qualification juridique de la faute relève du contrôle de la Cour de cassation!» Une interprétation sans définition semble alors difficile à trouver et c’est pour cela que la Cour de cassation s’en réserve le contrôle. Néanmoins, certains auteurs ont tenté d’en établir une définition juridique et ainsi, Marcel Planiol, jurisconsulte du 19ème siècle définit la faute civile comme étant «!Un comportement que l'on peut juger défectueux soit parce qu'il est inspiré par l'intention de nuire, soit parce qu'il va à l'encontre d'une règle juridique, soit parce qu'il apparait déraisonnable et maladroit!». En effet, la faute se compose classiquement de deux éléments à savoir un élément objectif qui est un fait illicite, et un élément subjectif, qui est l’élément d’imputabilité. Ainsi, pour constater la faute d’un auteur, il fallait rechercher le comportement fautif de ce dernier, mais également rechercher si l’auteur avait eu la conscience de mal agir, s’il avait eu l’intention de nuire. En d’autres termes, l’individu privé de discernement ne pouvait être tenu pour responsable d’un fait illicite qu’il avait commis. Cependant, depuis quelques années, nombreux sont les débats qui ont éclaté au sujet de cette notion de faute. En effet, il semblerait que cette dernière subisse une certaine évolution qui se justifie au regard de la nécessité d’indemniser les victimes de dommages. Effectivement, avec l’élément subjectif de la faute, si l’auteur n’est pas doué de discernement, alors il ne peut être tenu pour responsable. La conséquence de cette irresponsabilité est que les victimes du dommage ne peuvent obtenir droit à réparation, à indemnisation. Il a donc fallu trouver des palliatifs pour que les victimes puissent être indemnisées. Ainsi, les nombreux palliatifs que le droit positif ou la jurisprudence ont trouvés pour pouvoir indemniser les victimes lorsque l’auteur du dommage ne pouvait être déclaré responsable, ont suscité l’éclatement de la doctrine. En effet, ces palliatifs ont donc conduit à s’interroger sur une possible disparition de la faute. Dès lors, il convient de se demander si l’importance qu’ont voulu accorder les rédacteurs du Code civil à la faute ne s’est pas retrouvée étouffée par une évolution qui pourrait à terme, conduire à sa disparition. En effet, si la notion de faute a subi, d’une part, de nombreuses évolutions notamment par l’abandon de son élément subjectif (I), il n’en demeure pas moins que cette évolution a conduit d’autre part à une objectivation de la faute, qui suscite des interrogations quant à sa disparition (II).

I) L’évolution de la notion de faute à travers la disparition de l’un de ses éléments constitutifs. Classiquement, la faute se compose de deux éléments (I) à savoir un élément objectif et un élément subjectif. Cependant, son évolution conduit à abandonner ce dernier (II) car il est source de conséquences juridiques néfastes pour les victimes d’un dommage. A) La conception traditionnelle de la faute en responsabilité civile délictuelle. Les rédacteurs du Code civil ont placé la notion de faute comme l’élément fondamental de la responsabilité civile délictuelle. Sans faute, il est est impossible d’engager la responsabilité d’un auteur, ce qui traduit l’importance de cette notion. En effet, classiquement, la notion de faute est constituée d’un élément objectif qui se traduit par un fait illicite. Il est évident que pour qu’un auteur engage sa responsabilité, il faut qu’il ait adopté une certaine conduite illicite, sinon, il ne commet pas de faute. Cette conduite doit donc être réprouvée par la société, et c’est ce qui constitue l’élément objectif de la faute, c’est l’illicéité et la conduite que l’auteur du dommage a adoptée. Cette faute peut être de nature différente, elle peut être une faute par commission, c’est à dire que l’auteur doit commettre une faute matérielle, ou encore une faute par omission, c’est à dire que l’auteur de la faute a omis de d’accomplir un acte ou d’adopter un certain comportement, ce qui le rend fautif. Ainsi, la vision de faute est très large et c’est l’article 1382 du Code civil qui le rappelle en posant que la faute peut résulter de «!tout fait quelconque de l’homme!». Dès lors, l’élément objectif tient une place extrêmement importante dans la notion de faute car sans fait illicite, la faute n’est pas constituée. Face à cet élément objectif de la faute se trouve l’élément subjectif, qui lui se justifie dans la volonté de l’auteur de la faute. En effet, classiquement, pour qu’une faute soit imputée à un auteur, il faut que ce dernier ait eu la volonté de la commettre. C’est l’élément moral de la faute, la volonté, la conscience de mal agir, en d’autre terme, l’imputabilité. L’absence de cette volonté est donc une cause de non imputabilité. Aussi, pour que l’auteur engage sa responsabilité, il faut donc bien une volonté, mais notamment que cette volonté soit capable et libre. C’est à dire qu’un infans ou un dément ne peut engager sa responsabilité faute de volonté capable et libre. Il est traditionnellement impossible d’imputer une faute à un infans ou à un dément dans la mesure où il n’est pas capable de discerner le bien du mal. Ainsi, dans une décision en date du 21 octobre 1901, la Cour de cassation affirme «!qu’il n’y a pas de faute lorsque la volonté fait défaut!».

Cependant, si traditionnellement la notion de faute se constitue par deux éléments que sont l’élément objectif et subjectif, l’évolution de cette notion implique l’abandon de son élément subjectif, c’est à dire la disparition de l’imputabilité.

B) L’abandon de l’élément subjectif de la faute en responsabilité civile délictuelle. L’élément subjectif de la faute revient à prendre en compte la volonté de l’individu pour engager sa responsabilité. C’est l’imputabilité. Dès lors, si pour engager cette responsabilité il faut cumulativement ces deux éléments que sont l’élément objectif et subjectif, l’absence de l’un d’entre eux empêcherait d’imputer une faute à un auteur et donc d’engager sa responsabilité civile délictuelle. En effet, les déments, par exemple ne sont pas doués de discernement. Ils peuvent donc commettre une faute, mais cette dernière ne sera pas commise avec une volonté libre et éclairée. Dès lors, l’élément subjectif que nécessite la faute n’est pas constitué et par

conséquent, la responsabilité du dément ne peut être engagée. Il en va de même pour les infans qui n’ont pas la capacité de pas discerner le bien du mal, et dont la volonté ne peut être libre et éclairée. Les déments et les infans ne peuvent donc traditionnellement engager leur responsabilité car la constitution de l’élément subjectif fait défaut. Cependant, ce raisonnement conduit à une conséquence d’une grande ampleur et qui ne joue pas en faveur des victimes. En effet, si l’imputabilité est une condition de la responsabilité civile, son absence ferme tous droits à réparation pour la victime. Cette solution étant donc difficilement concevable pour le droit positif français et la jurisprudence, il a fallu trouver des palliatifs pour pouvoir trouver un équilibre entre la responsabilité civile des infans et déments, et la nécessité d’indemniser les victimes de leurs dommages. Ainsi et en vertu de ces palliatifs qu’il conviendra d’analyser ci-après, la faute ne s’apprécie plus in concreto, c’est à dire en prenant en considération la personnalité de la personne pour pouvoir engager sa responsabilité, mais au contraire, elle s’apprécie in abstracto, c’est à dire que pour engager la responsabilité de l’auteur d’un fait dommageable, il va falloir regarder si son comportement est digne de l’ancien bon père de famille, si son comportement se réfère à la normalité, et s’il s’est conduit comme un Homme normalement diligent.

L’évolution de la notion de faute s’est donc traduite par la disparition de son élément subjectif. Dès lors, la faute ne s’apprécie plus qu’au regard de son élément objectif, c’est à dire au regard de l’acte illicite commis par l’auteur. De cette objectivation de la faute ont alors découlé de nombreuses incidences, et notamment l’abandon des causes de non imputabilité, qui s’apprécient notamment au regard de la nécessité d’indemniser les victimes des dommages.

II) Une objectivation de la faute nécessaire à l’indemnisation des victimes. L’évolution de la notion de faute a donc conduit à la disparition de l’élément subjectif, de l’imputabilité, et ceci dans un souci d’indemnisation des victimes. Dès lors, l’on assiste à une objectivation de la faute qui se traduit par l’admission de la responsabilité civile délictuelle des déments (A) et celles des infans (B). A) L’abandon des causes de non imputabilité par la loi à travers la responsabilité des déments. L’élément subjectif de la faute a donc été progressivement balayé au profit de son seul élément objectif, et c’est notamment une loi du 3 janvier 1968, dite loi portant réforme du droit des incapables majeurs, qui a contribué à sa disparition. En effet, cette loi a inséré l’article 489-2 qui en 2007 est devenu l’article 414-3 du Code civil, et qui prévoit la réparation des actes commis par les incapables majeurs, mais qui s’applique également pour les mineurs. Depuis cette loi, la faute du dément n’est plus appréciée au regard de son discernement, de sa volonté, puisque son trouble mental ne peut plus l’exonérer s’il a commis une faute causant un dommage à autrui. Cette évolution a donc fait l’objet de nombreux débats car en se plaçant du côté du dément, il parait injuste que sa responsabilité puisse être engagée alors même qu’il ne dispose d’aucune faculté de discernement. Cependant, en se plaçant du côté de la victime, cette solution se justifie au regard de l’indemnisation. En effet, si la responsabilité du dément est engagée lorsqu’il cause un dommage, c’est justement pour pouvoir indemniser la victime. Si sa responsabilité ne peut être engagée, alors les victimes de déments ne pourraient obtenir réparation, ce qui apparait également injuste. Dès lors, le droit positif au même titre que la jurisprudence a tranché, et l’élément subjectif de la faute doit donc être écarté pour pouvoir engager la responsabilité des

déments. Ainsi, dans un arrêt dit Trichard en date du 18 décembre 1964, la 2ème Chambre civile de la Cour de cassation a admis au sujet de l’auteur d’un dommage causé sous l’empire d’une crise d’épilepsie, que «!l’absence épileptique au cours de laquelle s’était produit l'accident, n'avait pas pour effet d’exonérer Trichard de la responsabilité qui pesait sur lui en sa qualité de gardien. » Par ailleurs, dans un arrêt en date du 12 décembre 1984, cette même Chambre civile de la Cour de cassation affirme que «!Les juges du fond ne sont pas tenus de vérifier si un mineur est capable de discerner les conséquences de son acte pour caractériser une faute commise par lui!». Ainsi, contrairement à la responsabilité pénale, la responsabilité civile des auteurs d’un dommage peut donc être engagée en l’absence d’une faculté de discernement et cette solution se justifie au regard de la nécessité d’indemnisation des victimes.

Cependant, si la responsabilité des auteurs dépourvus de discernement peut être engagée, il en va de même pour les auteurs qui ne sont pas encore arrivés au discernement. C’est le cas des infans, qui eux aussi, ne bénéficient plus des causes de non imputabilité dans un souci d’indemnisation des victimes.

B) L’abandon des causes de non imputabilité par la jurisprudence à travers la responsabilité des infans. Classiquement, l’infans, c’est à dire le mineur qui n’a pas encore atteint l’âge de six ou sept ans, ne peut être responsable d’un fait dommageable qu’il aurait commis. Cependant, cette solution a, tout comme l’irresponsabilité des déments, des conséquences directes sur les victimes. En effet, admettre qu’un infans ne peut commettre de faute revient à écarter la demande d’indemnisation des victimes. Une période de flou s’installe donc et de nouveaux débats éclatent quant à cette responsabilité des auteurs qui ne sont pas encore arrivés au discernement. Dès lors, c’est l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation qui va tenter de trancher la difficulté que pose la responsabilité de ces infans. En effet, le 9 mai 1984, l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation rend cinq arrêts relatifs à la responsabilité des infans. A travers ces arrêts, la Cour affirme que pour engager la responsabilité de l’auteur d’un dommage, il n’est plus nécessaire de rechercher le discernement de l’auteur malgré son très jeune âge. La responsabilité des infans peut donc être engagée en dépit de leur capacité de discernement. En effet, dans un arrêt dit Fullenwarth, l’Assemblée Plénière affirme au sujet de l’enfant que «!il suffit que celui ci ait commis un acte qui soit la cause directe du dommage invoqué par la victime!» La responsabilité civile de l’enfant peut donc être engagée sans même rechercher si l’enfant avait une capacité de discernement, et c’est ce qui découle de chacun des cinq arrêts de l’Assemblée Plénière en date du 9 mai 1984. Ces arrêts ont donc apporté une vision nouvelle de la faute, une faute objective appréciée in abstracto. La faute ne disparait donc pas entièrement puisque pour engager la responsabilité d’un auteur, il faut bien une faute, comme le rappelle d’ailleurs la 2ème Chambre civile de Cour de cassation dans un arrêt en date du 12 juillet 2014. La disparition de la faute ne semble alors pas être le terme le plus adéquat, mais pour autant, cette notion a subi une importante évolution qui se traduit, à défaut donc, d’une disparition de la faute, par son objectivation....


Similar Free PDFs