Fiche 9 - Faute de service et faute personnelle PDF

Title Fiche 9 - Faute de service et faute personnelle
Course Droit administratif
Institution Université de Paris-Cité
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Description

Fiche 9 : Faute de service et faute personnelle La responsabilité administrative est par principe une responsabilité pour faute. Or, l'expression « responsabilité pour faute» est faussement claire: si elle permet de distinguer la faute (acte, opération en contradiction avec l'état du droit) et la responsabilité (traduction en droit de l'obligation de réparer un dommage causé à autrui), elle ne précise pas a priori les liens qui se tissent entre les deux notions; il importe donc d'identifier l'auteur de la faute (I), puis la personne responsable (II). I/ L’auteur de la faute : faute personnelle et faute de service Identifier l'auteur de la faute implique de déterminer dans quelles conditions le comportement fautif d'un agent public est couvert par le fonctionnement du service ou peut, au contraire, entraîner sa responsabilité personnelle. A/ La garantie des fonctionnaires Afin de protéger les agents publics des actions introduites à raison d'actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions et d'éviter les immixtions du juge judiciaire dans le fonctionnement de l'administration, l'article 75 de la C. du 22 frimaire an VIII a consacré le système dit de garantie des fonctionnaires: «les agents du gouvernement, autres que les ministres, ne peuvent être poursuivis pour des faits relatifs à leurs fonctions, qu'en vertu d'une décision du Conseil d'État; en ce cas, la poursuite a lieu devant les tribunaux ordinaires ». Pratiquement, ce système reposait sur la combinaison de deux principes : l'interdiction faite à t'autorité judiciaire de s'immiscer dans le fonctionnement de l'administration et la garantie personnelle des agents. It aboutissait à une très large immunité des agents publics et participait de l'irresponsabilité de la puissance publique. Assimilé aux errements des régimes antérieurs, ce système fut logiquement abrogé au début de la Me République (D. du 19 sept. 1870) sans être remplacé. Il en résulta un risque de déséquilibre inverse, plus aucune disposition ne protégeant les agents publics contre les poursuites à raison de leurs fonctions. Saisi de la question (TC, 30 juil. 1873, Pelletier), le Tribunal des conflits énonce que l'abrogation de l'article 75 de la C. de l'an VIII n'a qu'une portée limitée: si la garantie personnelle des agents a bien été supprimée par le décret (simple fin de non-recevoir adressé à l'autorité judiciaire), il n'en est rien de l'interdiction faite à l'autorité judiciaire de connaître de l'action administrative («règle de compétence absolue et d'ordre public »). Compte tenu de cela, rien ne permet de soutenir que le D. du 19 sept. 1870 a entendu admettre un régime de responsabilité de droit commun des agents publics, lequel serait en contradiction avec le principe issu de la L. des 16-24 août 1790. Conformément aux principes dégagés dans la décision Blanco* (TC, 8 fév. 1873), le Tribunal des conflits considère ainsi que les agents publics ne peuvent pas, par principe, être poursuivis pour des faits commis dans l'exercice de leurs fonctions; dans cette hypothèse, c'est la responsabilité de la personne publique qui doit être recherchée devant le juge administratif pour faute de service. Par exception, il est toutefois admis qu'une faute personnelle imputable aux auteurs en propre est justiciable devant le juge judiciaire.

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B/ Typologie de la faute de service et de la faute personnelle 1/ La faute de service La faute de service est une «faute commise dans l'exercice du service » ou résultant du «fonctionnement défectueux du service» (J. Morand-Deviller). Ainsi que l'écrit É. Laferrière, elle «révèle un administrateur plus ou moins sujet à erreur et non l'homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences». La faute de service peut résulter d'une action (décision illégale, CE S., 26 janv. 1973, Ville de Paris c. Driancour; promesse non tenue, négligence, erreur, opérations matérielles...) ou d'une inaction de la personne publique (p. ex. défaut de surveillance et de contrôle, CE, 9 juil. 2007, M. Delorme, à propos d'un suicide en prison ; ou absence d'information, CE A., 3 mars 2004, Min. de l'Emploi c. Consorts Thomas, défaut d'information de l'État en matière d'amiante)... 2/ La faute personnelle La faute personnelle est la faute qui se détache de l'exercice des fonctions. On en distingue trois types. La faute personnelle dépourvue de tout lien avec les fonctions recouvre les cas où l'agent a agi avec malveillance et dans son intérêt propre (p. ex. CE, 23 juin 1954, Dame Veuve Litzler, meurtre commis par un douanier qui profite de son apparence). La faute commise dans l'exercice des fonctions mais qui s'en détache parce qu'elle est particulièrement grave concerne les hypothèses où l'agent ayant agi de manière violente ou malveillante ou en excédant spontanément ses prérogatives commet un acte d'une particulière illégalité (p. ex. CE A., 12 avr. 2002, Papon, «caractère inexcusable» du comportement de M. Papon dont la participation à la déportation de 76 personnes d'origine juive, « constitue […] une faute personnelle détachable de l’exercice des fonctions » (son comportement lui ayant par ailleurs valu d’être condamné pour complicité de crime conter l’humanité par la cour d’assises de Gironde) ou encore le silence gardé pendant trois jours par un chef de service hospitalier sur une erreur commise dans son service, alors qu’il savait que les chances de survie du patient, dont l’état se dégradait d’heure en heure, dépendaient de l’information sur cette erreur qu’il aurait du donner sans délai ( CE 28 décembre 2001 M. Valette). Attention : La qualification pénale et la qualification administrative sont autonomes; le juge administratif n'est ainsi pas lié par l'appréciation du juge répressif (TC, 14 janv. 1935, Thépaz, abandon de la qualification automatique de la faute constitutive d'une infraction pénale en tant que faute personnelle; une infraction pénale commise dans l'exercice des fonctions peut désormais constituer une faute de service). La faute personnelle commise en dehors de l'exercice des fonctions mais « non dépourvue de tout lien avec le service » (CE A., 18 nov. 1949, Dlle Mimeur) regroupe les hypothèses où la faute a été commise en périphérie des fonctions mais non sans lien avec le service. Ainsi, Le meurtre commis par un gendarme, avec son arme personnelle en dehors des heures de service, constitue une faute personnelle, mais non dépourvue de tout lien avec le service ; l’agent participait à l’enquête, ce qui lui permettait d’échapper aux poursuite (CE 18 novembre 1988 Raszweski ). !2 sur !4

ou encore CAA Paris 26 juin 2006 : Fautes personnelles commises en dehors de l’exercice des fonctions de l’agent mais présentant un lien avec elles : Un agent public qui, en service, effectue, à des fins privées, un détour avec son véhicule de fonction et provoque un accident, engage la responsabilité de l'Administration devant le juge judiciaire selon les termes de la loi. Il conduit aussi son employeur public à prendre en charge le coût de la réparation du véhicule de l’Administration. Dans ce cas de figure, la faute est rattachée au service si le comportement dommageable est une simple négligence ou maladresse, si le moyen est régulièrement détenu par l'agent et si le moyen mis à la disposition de l'agent expose le tiers à un risque. Une fois l'auteur de la faute identifié, on peut envisager les conséquences en termes de responsabilité. II/ La personne responsable : du cumul de fautes ou cumul des responsabilités En principe, la responsabilité engagée est celle de l'auteur de la faute: quand la faute est personnelle, la responsabilité de l'agent pourra être engagée tandis que celle de l'administration le sera en raison d'une faute de service. Toutefois, la volonté d'assurer une meilleure indemnisation des victimes a conduit le juge administratif à étendre la portée de la responsabilité administrative (A) puis à organiser des mécanismes d'action récursoire (B). A/ Du cumul de fautes au cumul de responsabilités Le souci d'assurer l'indemnisation des victimes d'un dommage mettant en cause un agent public et la puissance publique a conduit le juge administratif à admettre la possible déconnexion entre l'auteur de la faute et La personne responsable. Il faut alors distinguer selon qu'on est en présence d'une ou de deux fautes. En présence de deux fautes, le régime juridique applicable dépend du lien existant entre elles. Si les deux fautes sont distinctes (i.e. une faute personnelle de l'agent détachée du service et une faute de service), la victime peut attaquer l'agent devant le juge judiciaire et/ou poursuivre l'administration devant le juge administratif. Chacun est alors responsable pour la part du dommage imputable à sa faute (p. ex. CE A., 12 avr. 2002, Papon, partage à parts égales entre l'État et son ancien agent de l'indemnisation des parties civiles). En revanche, en présence de deux fautes liées (une faute personnelle rendue possible par une faute de service), le Conseil d'État admet le cumul de fautes; l'administré peut attaquer l'agent devant le juge judiciaire ou l'administration devant l'ordre administratif pour l'intégralité du préjudice (CE, 3 fév. 1911, Anguet, concernant un dommage subi par Le requérant expulsé violemment d'un bureau de poste: faute personnelle de l'agent qui le blesse en l'expulsant rendue possible par un dysfonctionnement du service). Il appartient, le cas échéant, à la partie condamnée d'engager une action récursoire contre l'auteur de l'autre faute. En présence d'une seule faute, l'admission du cumul de responsabilités (CE, 26 juil. 1918, Époux Lemonnier) permet à l'administré lésé d'engager la responsabilité de l'administration (devant le juge administratif) ou de son agent (devant le juge judiciaire) pour le préjudice subi. [actuellement, cela conduit à un élargissement de la responsabilité de l'administration qui peut être engagée à la fois pour les fautes de service et pour les fautes personnelles commises dans l'exercice ou en lien avec les fonctions (seules les fautes purement personnelles sont insusceptible d'un tel cumul; dans ce dernier cas, l'agent peut seul être poursuivi devant l'ordre judiciaire).

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De manière plus marginale, la responsabilité personnelle de l'agent peut en retour se trouver engagée pour une faute de service indépendamment de toute faute personnelle (dans ce cas de figure, il appartient toutefois normalement à l'autorité administrative de soulever un conflit d'attribution). B/ Les actions récursoires L'acceptation des cumuls de fautes et de responsabilités a conduit le Conseil d'État a organisé un dispositif permettant de veiller à la répartition de la réparation des dommages entre l'administration et l'agent fautif en fonction de leurs niveaux respectifs de responsabilité. Le Conseil d'État a ainsi admis la possibilité pour l'administration d'exercer une action récursoire contre son agent lorsqu'elle a été condamnée en raison d'une faute commise par lui et, de façon réciproque, la possibilité pour un agent d'exercer une action récursoire contre l'administration afin qu'elle le rembourse d'une partie du paiement des sommes auxquelles il a été condamné (CE A., 28 juil. 1951, Laruelle et Delville [2 espèces)). On peut ajouter que, dans le cas où un agent public a été poursuivi par un tiers pour faute de service et où aucune faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions ne lui est imputable, la collectivité publique a l'obligation, à défaut d'avoir élevé le conflit d'attribution entre les deux ordres de juridiction, de couvrir l'intégralité des condamnations civiles prononcées contre lui. Ce principe, affirmé par la jurisprudence (CE S., 26 avr. 1963, Centre hospitalier de Besançon), a été repris, pour les fonctionnaires, par l'article 11 de la L. du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. III/ Sur la responsabilité pénale des décideurs publics en cas d’infractions non intentionnelle! Cass. Crim. 12 décembre 2000, Affaires du Drac : Il s’agissait d’une sortie d’une classe de 22 élèves âgés de 7 à 8 ans sur le cours de la rivière Drac, en aval d’un barrage ayant ouvert ses vannes. Six d’entre eux et l’accompagnatrice périrent noyés. La condamnation de la commune de Grenoble à une amende fut aggravé en appel. Mais la Cour de cassation, le 12/12/2000, a censuré l’arrêt de la cour de Grenoble et a annulé sans avoir lieu à renvoi les dispositions de ce chef : « l’exécution même du service public communal d’animation des classes de découverte suivies par les enfants des écoles pendant le temps scolaire, qui participe du service de l’enseignement public n’est pas, par nature, susceptible de faire l’objet de conventions de délégations de service public ».

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