Le degré zéro de l\'écriture PDF

Title Le degré zéro de l\'écriture
Course Littérature Française
Institution Université de Strasbourg
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notes sur le livre incontournable de critique littéraire française ...


Description

Le degré zéro de l’écriture Roland Barthes Introduction L’écriture n’a pas pour seule fonction de communiquer et d’exprimer, elle doit aussi « imposer un au-delà du langage qui est à la fois l’Histoire et le parti pris qu’on y prend ». La littérature doit « signaler quelque chose, différent de son contenu et de sa forme individuelle […] ce par quoi précisément elle s’impose comme Littérature. » = un ensemble de signes Cet ensemble de signes devient sacré car elle pose la littérature comme une institution. Def : « un ensemble de signes donnés sans rapport avec l’idée, la langue ni le style, et destinés à définir dans l’épaisseur de tous les modes d’expression possibles, la solitude d’un langage rituel ». Histoire des Signes de la Littérature manifestée par sa liaison avec l’Histoire profonde. Mais la forme de cette liaison peut varier avec l’Histoire elle-même. Exemple de l’unité idéologique de la bourgeoisie = écriture unique. A partir de Flaubert, « on ne sent plus la Littérature comme un mode de circulation socialement privilégié, mais comme un langage consistant, profond, plein de secrets, donné à la fois comme rêve et comme menace ». Forme-objet depuis 100 ans. « La Forme se suspend devant le regard comme un objet » nécessité de la forme, la forme est détruite  l’écrivain aussi Trois temps de l’histoire de l’écriture, trois états d’une solidification progressive. Chateaubriand = poids léger de l’euphorie du langage, narcissisme, peut de distance entre écriture et instrument. Flaubert = avènement de la littérature comme fabrication. Mallarmé = une destruction du langage. Résultat, OJD stade de l’absence soit par mouvement d’une négation, soit impuissance à l’accomplir dans une durée ( degré zéro de l’écriture) Création d’un écrivain sans Littérature. Dernier épisode d’une passion de l’écriture. Volonté « d’affirmer l’existence d’une réalité formelle indépendante de la langue et du style ». Attache écrivain à sa société, pas de Littérature sans une Morale du langage.

Qu’est ce que l’écriture ? Pour l’écrivain, la langue est un moule  « corps d’habitude » elle « enferme la création littéraire » elle est « l’aire d’une action, la définition et l’attente d’un possible ». C’est un « objet social par définition non par élection ». Elle reste un support et à ce titre elle est « la stable signification de la démarche et le geste essentiel de la sociabilité ». STYLE « des images, un débit, un lexique naissent du corps et du passé de l’écrivain et deviennent peu à peu des automatismes de son art » ; « un langage autarcique qui nous plonge que dans la mythologie personnelle et secrète de l’auteur » ; possède quelque chose de brut « il est une forme sans destination » ; « il est la « chose » de l’écrivain » ; « nullement le produit d’un choix » « part privé d’un rituel » « éploie hors de sa responsabilité » ; « partie d’un infra-langage qui s’élabore à la limite de la chair et du monde » Profondeur du langage = horizontal ; profondeur du style = vertical, il est métaphore cad « équation entre l’intention littéraire et la structure charnelle de l’auteur » ; dimension de secret Langue + style = nature. « la langue fonctionne comme une négativité, la limite initiale du possible, le style est une Nécessité qui noue l’humeur de l’écrivain à son langage ».  gestuaire familier Autre réalité formelle réside dans la Valeur : écriture. C’est dans l’écriture que l’auteur s’engage, elle est l’identité formelle « liant la forme à la fois normale et singulière de sa parole à la vaste Histoire d’autrui ». Il comprend « le ton, le débit, la fin, la morale, le naturel de la parole etc ». Mérimée et Fénelon, même écriture à 1 siècle de différence. Contemporain différents : Mallarmé // Céline, Gide // Queneau…

Les écritures différentes sont comparables : s’inscrivent dans un mouvement identique « une réflexion de l’écrivain sur l’usage social de sa forme et le choix qu’il en assume », problématique littéraire sur la ‘morale de la forme’ et ‘le choix de l’aire sociale’. / !\ « Son écriture est une façon de penser la Littérature, non de l’étendre. » ( pas un choix de destinataire, mais une réflexion générale sur la littérature et son lien avec celle-ci). Choix de l’écriture = sa Liberté. Mais la liberté n’a pas les mêmes limites dans l’Histoire. Les écritures s’établissent « sous la pression de l’Histoire et de la Tradition ». « L’écriture est précisément ce compromis entre une liberté et un souvenir. » L’écriture n’est qu’un moment, rapport avec l’histoire. Preuve : éclatement de l’écriture française correspond à une grande crise de l’Histoire.

Ecritures politiques L’écriture parait symbolique, la parole n’est qu’une « durée de signes vides dont le mouvement seul est significatif ». On trouve dans toute écriture « l’ambition d’un objet qui est à la fis langage et coercition ». L’écriture politique doit « joindre d’un seul trait la réalité des actes et l’idéalité des fins ». Ecriture classique se rattache à l’exercice du pouvoir. Pendant la Révolution, l’exercice du langage se fait en fonction du sang répandu dans une logique constamment emphatique, correspondant aux consciences et aux mouvements des esprits. « C’est la singularité des situations historiques qui a forme l’identité de l’écriture révolutionnaire. » Baudelaire : « la vérité emphatique du geste dans les grandes circonstances de la vie » l’écriture révolutionnaire fut ce geste emphatique. L’écriture marxiste n’est pas emphatique, elle est comme un langage de la connaissance, par un lexique particulier, un vocabulaire technique, une écriture litotique. 1 Ecriture stalinienne : pas de mot sans valeur, tout est ‘définition’ cad séparation entre le bien et le mal, écriture décrite comme triomphante mais tautologique. Chaque régime possède son écriture, bon terrain d’étude de la phénoménologique sociale. L’écriture « tant la forme spectaculairement engagée de la parole », ambigüité entre l’être et le paraitre du pouvoir. Exemple de la Restauration : écriture de classe, répression, donner à la justification de l’acte la caution de sa réalité. Régime autoritaires et écriture policière. Type nouveau de scripteur entre l’écrivain et le militant, un homme engagé dont l’acte est l’écriture. « l’écriture devient ici comme une signature que l’on met au bas d’une proclamation collective ». L’écriture en tant qu’elle est subjective est engagement. « La Forme devient ainsi plus que jamais un objet autonome, destiné à signifier une propriété collective et défendue. » Une écriture intellectuelle est instable, elle est la manifestation temporelle d’une adéquation entre la conscience du scripteur et ‘l’image rassurante d’un collectif’.

L’écriture du Roman Histoire et Roman sont semblables au XIXe = « construction d’un univers autarcique … ses dimensions et ses limites, et y disposant son Temps, son Espace, sa population, sa collection d’objets et ses mythes » Récit est à la fois Roman et Histoire, et intègre le choix ou l’expression d’un moment historique. Rôle du passé simple : « rituel des Belles-Lettres », »maintenir une hiérarchie dans l’empire des faits » ; le VERBE fait partie d’une ‘chaine causale’ « participe à un ensemble d’actions », porte l’intelligence du Récit. Derrière le passé simple se dégage le démiurge, il suppose un monde construit, élaboré, offert. Passé simple = souvenir utile, ordre, réalité claire, signifie une création ; « il est un mensonge manifesté », ambigüité de la vraisemblance  « donne à l’imaginaire la caution formelle du réel »

1 Litote : dire moins pour faire entendre plus « vas je ne te hais point »

But d’un Roman et d’un mythe (par le biais du passé simple) : « livrer une essence sous les espèces d’un artifice » la fiction peut mener à une morale ≠ passé narratif = système de sécurité, constitue un des pactes « établis entre l’écrivain et la société, pour la justification de l’un et la sérénité de l’autre » Autre procédé narratif important : la personne de la narration. « La troisième personne, comme le passé simple, rend donc cet office à l’art romanesque et fournit à ses consommateurs la sécurité d’une fabulation crédible et pourtant sans cesse manifestée comme fausse ». Le « il »  ‘convention indiscutée, elle séduit les plus académiques’, signe d’un pacte intelligible entre la société et l’auteur, fait tenir le monde de la façon qu’on veut. ≠ Le « je » est moins ambigu  ‘faux naturel d’une confidence’ Quelques particularités / exceptions : - Agatha Christie qui cache derrière le ‘je’, le ‘il’ que l’on cherche comme criminel - Balzac la multiplicité des il, réseau de personnages, « décèle l’existence d’un monde dont l’Histoire est la première donnée » (voir projet de HdB dans la préface de la Comédie Humaine), le il comme matériau et non le fruit de la création - César : le il de l’autobiographie. But : « état algébrique de l’action au profit d’une liaison, d’une clarté ou d’un tragique des rapports humains » - Maurice Blanchot à propos de Kafka : le récit impersonnel est un acte de fidélité à l’essence du langage ? Métaphore du phosphore : « La Littérature est comme le phosphore : elle brille le plus au moment où elle tente de mourir » « Le Roman est une Mort ; il fait de la vie un destin, du souvenir un acte utile, et de la durée un temps dirigé et significatif » Cpdt  importance des yeux de la société, réception de l’œuvre fait tout Y a-t-il une écriture poétique ? Equation de M. Jourdain : Poésie = Prose + a + b+ c et Prose = Poésie – a – b – c , en admettant que a,b,c, soient des « attributs particuliers du langage, inutiles mais décoratifs, tels que le mètre, la rime ou le rituel des images ». La différence entre prose et poésie dans les temps classiques n’est pas une différence d’essence mais de quantité. Il s’agit de doser différemment les façons de parler. « Toute poésie n’est alors que l’équation décorative, allusive ou chargée d’une prose […] qui git en essence et en puissance ». Pas de différence de langage mais « inflexion d’une technique », « projeter une parole socialisée par l’évidence même de sa convention une penser intérieur » (principe de la poésie). Dans la poésie moderne (à partir de Rimbaud), les poètes instituent leur parole comme une Nature fermée qui embrasse à la fois la fonction et la structure du langage. Langage nouveau et différent comme qualité irréductible et sans hérédité. La Poésie porte sa nature en elle. « les rapports prétendus de la pensée et de la parole sont inversés » Art classique : une pensée toute formée accouche d’une parole qui l’exprime. Poétique moderne : les mots produisent une sorte de continu formel dont émane peu à peu une densité intellectuelle ou sentimentale impossible sans eux. Fabrication (classique) ≠ aventure (moderne). Langage classique = relationnel, langage mathématique. « les mots neutralisés, absentés par le recours sévère à une tradition qui absorbe la fraîcheur, fuient l’accident sonore ou sémantique », éléments soumis à une même pression émotionnelle, le lexique poétique est un lexique d’usage. Le but du poète est d’ordonner le protocole ancien. L’art de la poésie classique est un art de l’expression non de l’invention. « usés dans un petit nombre de rapports toujours semblables, les mots classiques sont en route vers une algèbre : la figure rhétorique, le cliché sont les instruments virtuels d’une liaison » provoque valence chimique. Principe même de la communication. Intention prématurée chez Hugo avec ses expériences sur l’alexandrin d’une explosion de mots. La poésie moderne ne laisse subsister que les assises lexicales. « Le Mot éclate au dessus d’une

ligne de rapport évidés, la grammaire est dépourvue de sa finalité, elle devient prosodie 2, elle n’est plus qu’une inflexion qui dure pour présenter le Mot. » parodie et néant des précédents rapports dogmatiques. Le rôle du mot comme sujet ou objet de l’écriture change entre les deux périodes. PC (poésie classique) : mot emportés par des rapports déjà établis. PM : liberté du mot. Le mot poétique devient un acte sans passé immédiat, sous chaque mot de la PM git une géologie existentielle . Le consommateur de PM se retrouve uniquement face au mot et le choix face à toutes ses significations, mot sous état zéro. Mot devient une boite de Pandore, gourmandise sacrée. Csq  « parole terrible et inhumaine », pleine de trous, lumières, absences… Langage classique : langage d’autrui, de la rencontre, oral. Langage moderne : Nature interrompue qui se révèle par blocs. PM = poésie objective. Personne n’impose une hiérarchie ou un sens au mot. On rend alors tout son potentiel au mot. Csq  création « d’un discours plein de terreur, cad qu’il met l’homme en liaison non pas avec les autres hommes mais avec les images les plus inhumaines de la Nature : le ciel, l’enfer, le sacré, l’enfance, la folie, la matière pure… » Mais à ce moment là, on ne peut plus parler de langage poétique puisque sa violence détruit toute portée éthique. Avec langage classique, le geste oral est un geste de modification, démiurge. PM : pas un état d’âme ou un exercice spirituel mais la découverte et la recherche d’un langage rêvé. Triomphe et rupture de l’écriture bourgeoise Littérature préclassique XVIe XVIIe, pluralité des écritures, allure de la nuance et d’une euphorie de la liberté (eg chez Rabelais). Jusqu’en 1650, la Littérature classique n’a pas encore réglé la question de la langue 3, et tant que la langue hésite sur sa structure, toute morale de la langue est impossible. L’écriture n’apparait qu’au moment où la devient une sorte de négation (= une limite entre ce qui est défendu et ce qui est permis). Variations de genres et de mouvements littéraires sont des données esthétiques. Pendant que l’idéologie sociale triomphe, société française dispose de l’écriture comme instrumentale et ornementale. Instrumentale  forme sert le fond. Ornementale  écriture décorée d’instruments extérieurs. Mais pas question de variété de style à l’époque, mais questions sur la rhétorique des discours. (la rhétorique cesse d’intéresser au XIXe, et donc fait surgir les écritures modernes). Ecriture classique = écriture de classes. Née près du pouvoir au XVIIe, développée sous des dogmes, travail de définition. En 1647, Vaugelas4 recommande l’écriture classique comme un état de fait, non de droit et la clarté n’est qu’à l’usage de la cour. Dans les années 1660, la grammaire de PortRoyal définit la clarté comme donnée universelle. Or, la clarté est une donnée rhétorique usitée et utile au pouvoir. Même après la Révolution, la littérature bourgeoise perdure  mentalité a perduré. Seul le mépris d’Hugo pour la pression de l’écriture classique et contre la mythologie formelle voit les faits muter dans le sens d’une progression littéraire. 1850, trois faits historiques majeurs : le renversement de la démographie européenne, la substitution de l’industrie métallurgique à l’industrie textile (naissance du capitalisme moderne), la sécession de la société française en trois classes ennemies  bouleverse la place et le rôle de la bourgeoisie. La bourgeoisie est niée en tant que modèle. ‘tragique de la littérature’ « jusqu’alors c’était l’idéologie bourgeoise qui donnait elle-même la mesure de l’universel, le remplissant sans 2Prosodie : Ensemble des règles relatives à la quantité des voyelles en vue de la composition du vers. Ensemble des règles permettant d'établir une correspondance juste entre les syllabes accentuées ou atones des paroles et les temps forts ou faibles de la musique. Étude de la forme et de la substance des éléments phoniques dont les limites ne coïncident pas avec celles du phonème. Ainsi, les recherches sur l'accent et sur l'intonation ; l'étude du rythme, du débit et des pauses dans la parole. http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/prosodie/64461#jlsEfWfKVqHI47O8.99 3 https://fr.wikipedia.org/wiki/Ordonnance_de_Villers-Cotter%C3%AAts 4 https://fr.wikipedia.org/wiki/Claude_Favre_de_Vaugelas

contestation ; l’écrivain bourgeois, seul juge du malheur des autres hommes […] dorénavant, cette même idéologie n’apparait plus que comme une idéologie parmi d’autres possibles » Les écritures commencent alors à se multiplier. « Chacune est une tentative de réponse à cette problématique orphéenne de la Forme moderne : des écrivains sans littérature ». « Chaque fois que l’écrivain trace un complexe de mots, c’est l’existence même de la Littérature qui est mise en question ; ce que la modernité donne à lire dans la pluralité de ses écritures, c’est l’impasse de sa propre Histoire. »

L’artisanat du style La forme avait une valeur d’usage pendant les périodes classiques mais désormais « La forme coûte cher » (Valéry, quand il explique pourquoi il ne veut pas publier ses cours au collège de France). A partir de 1850, se pose à la littérature (ou ce qu’il en reste), la question de sa justification. Alors des écrivains soucieux incorporent dans la littérature la valeur du travail, image de l’artiste artisan. « le labeur de la forme constitue le signe et la propriété d’une corporation ». valeur-travail remplace la valeur-génie. Flaubert créateur de l’écriture artisanale. Il se moque dans ses romans à travers ses personnages (Moreau, Emma, Bouvard et Pécuchet) de l’ancienne nécessité bourgeoise et son inadéquation avec le monde nouveau (post 1850). Etablit une Loi comme écriture normative. / !\ paradoxe des règles : 1  récit sur succession d’essences qui produisent le sixième sens de la littérature (règles des temps verbaux, rythme, éloquence) 2  sagesse dans le labeur de l’écriture. L’écrivain donne à la société son art et la société accepte l’écrivain La Flaubertisation de la littérature (= l’écrivain accorde désormais une place plus grande au labeur), permettent aux écrivains de rencontrer à nouveau leur condition fatale. Ecriture et révolution Le naturalisme = signes formels de la littérature (passé simple, discours indirect..) + des signes non moins formels du réalisme (langage populaire, mots forts…). L’écriture neutre n’existe que bien après, la littérature réaliste est chargée des signes les plus spectaculaires de la fabrication. Retrouver le langage de la nature sociale, l’écriture réaliste est condamnée a seulement dépeindre pour exprimer la réalité. La stylistique de Maupassant réside dans la syntaxe (changer de place un complément du nom par exemple pour le mettre en évidence et obtenir un rythme expressif). Création d’un signe littéraire détaché de son contenu, distanciation fond et forme pour créer une littérature grossière qui se voit de loin. Communisme reprend ces méthodes de littérature grossière pour diffuser plus simplement les messages dont il fait part. « être heureux pour la première fois » et « battre » remplacent « les artères cognent » et « il étreignait la première minute de sa vie ». Médiocrité de Garaudy, met des métaphores uniquement pour signaler une appartenance à la littérature....


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