Le Mal : Introduction Générale (TD 1) PDF

Title Le Mal : Introduction Générale (TD 1)
Course Lecture de textes philosophiques
Institution Université de Paris-Cité
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Ce document contient une introduction générale sur la notion de Mal. Ce cours interroge la notion de mal autour de la Seconde Guerre mondiale et prend exemple sur l'oeuvre littéraire de Kafka.
Ce cours était donné par P. Coudurier...


Description

Introduction Générale I – La notion de mal, première approche. Le mal peut être étudié de différentes façons : de façon psychologique (pourquoi y a-t-il des meurtriers ? quels sont les mécanismes psychiques qui conduisent un homme à devenir un meurtrier ?), de façon anthropologique (pourquoi y a-t-il du mal en l’homme ?) et de façon métaphysique (quelles sont les origines du mal). Pourquoi le concept même de mal est légitime ? Pourquoi peut-on parler d’un concept de mal ? Pourquoi peut-on regrouper différentes expériences qui se sont passées dans le temps et qui sont de natures différentes sous un même concept ? Le mal est quelque chose qui existe. La littérature française et mondiale se nourrit du mal (Baudelaire, Sade, les romans policiers). Du côté de la philosophie, il y a une difficulté : quel ton adopter face au mal ? Quelle distance avoir avec le mal ? La philo doit résonner, doit penser en dehors des affects. Elle est là pour théoriser. Or le mal repose des expériences du mal très précises. Il y a également le danger de tomber dans les affects, dans le pathétique. Le danger pour le philosophe c’est d’analyser le mal en se plaçant du côté de la souffrance, du côté de la victime ou du côté du mal agissant. Le problème récurrent est donc celui de la distance que le penseur adopte face au mal. On peut difficilement faire l’expérience du mal dans son sens profond. On se retrouve confronté au mal, on lui résiste, on peut en être le témoin, on peut le combattre. Le mal c’est la négation de ce qui devrait être, il vient perturber un ordre, des valeurs. On fait moins l’expérience de l’existence du mal que le constat qu’il ne devrait plus être de ce monde. Le mal apparaît comme un défaut dans ce qui existe. La difficulté pour la philosophie c’est de définir le concept du mal. Il y a une très grande hétérogénéité dans les maux (le crime, la maladie, la souffrance, la mort) et ainsi chacun ne fera pas la même liste de ce qu’il estime être le mal selon son expérience, selon sa religion, selon sa sensibilité.

A – L’expérience du mal. Quand on parle du mal en général, on pense tout de suite à ce que l’on subit, à ce qui vient perturber la conscience. On se sent tout de suite victime d’une malédiction et on cherche toujours un coupable invisible. A travers l’histoire de la philosophie, il y a eu des tentatives pour classer les maux. On oppose toujours les types de maux par leur origine : les maux naturels (catastrophes naturelles) et le maux humains. Les philosophes vont se pencher sur les maux humains comme le problème de l’assassinat, de l’esclavage, de la guerre, de la tyrannie, de l’extermination. Ils vont s’intéresser au mal à grande échelle qui pose un problème pratique : que faut-il faire pour remédier à ce mal ? Doit-on châtier les coupables ? Doit-on se révolter individuellement ? Ou en faire un combat politique ? On a parfois du mal à distinguer la part du naturel et la part du social dans le mal. Par exemple, dans le cas des famines : que doit-on attribuer au processus naturel (déficit de

Introduction Générale l’alimentation) et que doit-on attribuer au processus social (mauvaise gestion des ressources) ? Le danger qu’observent les philosophes c’est que si on ne nomme pas les maux par leur nom on risque de tout ranger sous une vaste étiquette qui est celle du Mal et qui regroupe des réalités qui ne sont pas du même ordre. La distinction entre le mal subi (avoir mal) et le mal commis (faire le mal). Le mal se vit souvent comme une tentation, une lutte intérieure, une transgression. Il n’y a pas de liberté dans le mal subi. En revanche il y a une grande liberté dans le mal commis. Le mal subi, Leibniz l’appelle le « mal physique » et le mal commis il le nomme le « mal moral ». Certains philosophes comme Paul Ricoeur pensent que ces maux sont enchevêtrés. En effet, le mal physique découle du mal moral. Cette conception du mal subi et du mal commis remonte au mythe de la faute adamique (la souffrance s’est introduite dans le monde à la suite de la transgression de la loi divine par l’homme). L’idée c’est qu’il y a toujours un mal moral qui engendre un mal physique. Il y a un déséquilibre entre celui qui fait le mal et celui qui le subit. Apparaît alors le mal de scandale (Kant). C’est le fait que celui qui souffre d’un mal ne l’a pas commis. Ce qui provoque le scandale c’est le fait que celui qui commet le mal n’est pas celui qui subit le mal. Le premier mal c’est la souffrance mais le vrai mal selon Kant c’est l’injustice.

B – Les deux voies. La voie qui se situe en deçà de l’expérience du mal (Qu’est-ce que le mal au niveau de l’être humain ?) et celle qui se situe au delà de l’expérience du mal (Comment expliquer le mal quand j’explique le monde en partant du postulat qu’il y a un créateur qui veut mon bien ?). On peut se placer du point de vue du relativisme : les expériences du mal sont diverses, il n’y pas de point de vue supérieur d’un homme ou d’un dieu, il n’y a que la réalité du mal. On ne peut donc pas créer de concept. Ce que nous appelons mauvais c’est lorsque nous avons une aversion pour quelque chose. Là encore on est confrontés au même problème : chaque individu n’a pas les mêmes aversions, il y a des aversions différentes selon les individus. On a donc inventé le concept de mal physique en généralisant les choses mauvaises. On aurait inventé le mal moral en se basant sur la crainte de ce mal physique. C’est parce qu’on a peur d’être victime de ce mal physique que l’on va créer une loi qui distingue ce qui est bon de ce qui est mauvais. On peut penser que la loi interdit le mal. En fait, c’est le mal qui est le nom donné à ce que la loi empêche. On peut dire qu’il n’y de mal que pour celui qui éprouve de l’aversion et que pour celui qui compare ce qui est à ce qu’il souhaite. La deuxième voie est au delà de l’expérience du mal. Elle a été développée par les philosophes dès l’Antiquité. C’est l’idée que le mal existe donc le monde est injuste. C’est donc le constat que le monde n’est pas tel qu’il aurait du être. Cette conception va conduire un certain nombre de philosophes a envisagé la représentation d’un dieu créateur, d’un

Introduction Générale dieu tout puissant et d’un dieu bon. Cela leur évite de tomber dans le désespoir. Si on pense que le mal n’a pas de solution alors rien n’a de sens. La deuxième voie consiste donc à dire qu’il y a un autre monde avec un auteur moral du monde. Cette conception redonne de l’espoir et du sens à l’action humaine. Cela signifie aussi que la bonne action n’a de sens que parce qu’il y a un monde bon (si le mal n’est jamais puni alors à quoi bon faire le mal). L’action morale a un sens s’il existe un dieu juste qui accorde hors de ce monde le bonheur aux justes. Se pose alors le problème classique du mal : comment ce dieu bon peut-il être l’auteur de ce monde où il y a du mal ?

C – Les problématiques liées au mal. La question de l’excès du mal. L’expérience du mal semble toujours excéder les mots dont on dispose pour en rendre compte. Il est difficile de mettre des mots sur ses souffrances. Certains ont pensé que les images étaient plus aptes à traiter du mal que les mots. Le mal est à la fois une aporie et un défi pour la pensée. Les discours sur le mal. On remarque que l’on a tendance à contourner le mal dans les discours qui en traite. On emploie des mots métaphoriques au lieu de désigner le mal. Le discours sur le mal est donc souvent un discours métaphorique. Les discours sur le mal c’est aussi le discours sur la justification du mal. Comment justifier le mal ? Renvoie à l’épisode, dans la Bible, de Jobbe qui a tout perdu et qui endure les souffrances sans se plaindre parce qu’il est éprouvé par Dieu contre le Diable. L’idée c’est de prouver au Diable que la foi de Jobbe est désintéressée et que malgré tout ce qui peut lui arriver, il garde foi en Dieu, il ne le maudit pas. Accepter le mal par sagesse puisqu’on ne peut rien faire il faut vivre avec. C’est l’expérience du sage stoïcien qui accepte de vivre dans un monde où il y a le mal moral, le mal physique, le mal métaphysique. Le discours de la compassion. Compatir aux souffrances d’autrui, faire preuve d’empathie. Première approche : se dire que le mal touche tout le monde on ne peut rien y faire et compatir en sachant qu’il n’y a pas de solution. Deuxième approche : considérer la souffrance d’autrui comme un scandale. Le mal comme embarras de la philosophie. Le mal est vraiment un défi pour la philosophie. Le mal fait problème pour le croyant lui-même. La foi ne résout pas le problème du mal. Aucun raisonnement ne peut annuler la souffrance éprouvée. Penser le mal ne le résout pas. La question de l’obscénité du projet de comprendre. Il y aurait une forme d’obscénité à comprendre le mal car si je pose le mal comme étant quelque chose qui existe au sein de la nature humaine, ça veut dire que j’admets la proximité du mal et que je reconnais que le mal est présent dans tous les êtres humains. Essayer de comprendre ce n’est pas forcément le justifier. Selon Levinas ou Arendt, les crimes commis pendant la Seconde Guerre Mondiale doivent nous conduire à prendre en compte de nouvelles formes de mal vis-à-vis desquelles il faut forger de nouveaux concepts. Même si j’essaye de comprendre et

Introduction Générale d’expliquer la Seconde Guerre Mondiale, je ne trouve pas forcément de raisons compréhensibles dans les crimes nazis. Le danger d’essayer de comprendre le mal c’est de le justifier, de le rationaliser. Arendt et plus tard Claude Lanzman ont tenté de rendre compte des crimes commis pendant la Seconde Guerre Mondiale et ils ont insisté sur leur refus de donner à leur propos le statut d’énoncé théorique sur la nature du mal. Les différents niveaux de discours sur le mal. La littérature nous permet d’appréhender le mal dans sa radicalité. La littérature n’a cessé de se confronter au mal sur le mode d’une relation ambivalente faite de fascination et de répulsion pour le mal et pour l’horreur. Le discours littéraire cherche moins à rendre compte du mal qu’à exprimer la fascination que nous éprouvons tous pour le mal. Le discours littéraire sur le mal permet de sonder les abymes du mal. Les écrivains comme Céline donnent à voir l’absurdité et le chaos du mal. Jusqu’où est-il possible de vouloir le mal ? Peut-on commettre le mal pour le mal ? Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de théorisation du mal par les écrivains qu’il n’y a pas de pensée du mal. Le discours psychanalytique. Pour Freud, la culture repose sur un compromis entre nos instincts (qui nous poussent souvent à faire des actions mauvaises) et la renonciation à ces instincts pour que la vie en société soit possible. Il y a beaucoup d’autres discours sur le mal : les discours juridiques (crime), médicaux (maladie), politiques (corruption). Dans tous ces discours on essaye de trouver le moyen de mettre fin au mal. Le mal est à la fois une catégorie de pensée et une catégorie d’action. C’est le cas chez Machiavel. Le mal peut devenir un moyen d’action s’il est utilisé à bon escient et au bon moment. Pour Machiavel, l’usage de la cruauté est autorisé pour conquérir et conserver le pouvoir (corruption, mensonge). On a la justification d’action condamnable d’un point de vue moral mais justifiée dans la perspective de maintenir en place le pouvoir. La possibilité du mal en politique ressurgit toujours avec le danger de l’abus de pouvoir. L’autre dimension du mal politique c’est celui qui vient des citoyens. Le plus grand des maux qui menace la démocratie selon Tocqueville c’est l’individualisme. Question de la punition infligée à celui qui a commit un crime : peut-on répondre au mal par le mal ? Comment agir contre le mal ? L’idée de contourner le problème et de refuser de voir le mal. C’est l’idée du divertissement chez Pascal : les hommes sont incapables de regarder le spectacle de leur propre misère, d’accepter leur finitude. Ils vont donc se divertir plutôt que d’accepter leur condition misérable. La psychanalyse a aussi parlé de ces processus que l’on met en place contre la pensée du mal. L’art ou l’activité intellectuelle sont parfois considérés comme des techniques de défense contre la souffrance. Accepter la part irréductible de douleur c’est-à-dire se mettre dans une position où l’on accepte tout ce qui arrive à notre corps. La révolte, la résistance, l’engagement : violence de l’esclave qui se révolte à la résistance armée.

II – Kafka (1883-1924). A – Kafka et la problématique du mal.

Introduction Générale On estime que Kafka illustre, dans ses récits, ce que plusieurs philosophes ont expliqué. On essaye de comprendre la terreur nazie en voyant comment Kafka en a posé les prémisses, comment certains de ses textes peuvent être analysés du point de vue de l’excès du mal et du mal incompréhensible. Le mal est un thème central des œuvres de Kafka, de ses roman : Le Château et Le Procès mais aussi de ses nouvelles : La Colonie pénitentiaire et La Métamorphose. Kafka interroge surtout le mal subi. Il interroge l’esclavage et la torture. C’est le cas dans La Colonie pénitentiaire qui est un texte publié en 1919. Il interroge la tyrannie et la persécution dans Le Château (publié à titre posthume en 1926) et dans Le Procès (publié à titre posthume en 1925). Il interroge également la souffrance dans La Métamorphose qui est publiée en 1915. Ce qui intéresse Kafka dans ses œuvres ce sont les maux humains et non pas les maux naturels. Il se place directement du côté des souffrants, des lésés, des persécutés. Souvent il n’y a pas d’issu à ces maux chez Kafka. On a l’idée d’une répétition et d’un labyrinthe : chez Kafka, on ne sort pas de la situation maléfique (littérature assez désespérée). Chez Kafka, on a un acharnement des bourreaux sur les souffrants. C’est le cas dans Le Procès où Joseph K est inlassablement accusé d’avoir commis une faute. Il n’y a pas de compensation chez Kafka, pas de révolte des personnages souffrants : on peut voir cela comme une forme de soumission au mal. Dans La Colonie Pénitentiaire ni les officiels, ni le voyageur n’interviennent pour que l’exécution n’ait pas lieu alors même que le voyageur ne semble pas favorable à la machine de torture. Ce n’est pas une littérature politique au sens où Kafka ne proposent pas un changement de la société oppressive : il y une forme d’acceptation, de passivité, il n’y pas d’usage de la violence en retour. Dans Le Château, il y a une obstination du personnage de K à être reçu et reconnu comme arpenteur mais il n’y a pas d’usage de moyen violent. Dans La Métamorphose c’est la même chose : la transformation en cafard a lieu dans l’incipit et dans le reste du récit, il s’agit juste de faire avec. Chez Kafka, le mal est subi et accepté. Du coup, en tant que lecteur, on est spectateur de ces maux d’où une forme de malaise. Dans ces quatre œuvres principales, on a des expériences du mal, pas de rédemption, pas de secours religieux. Certaines interprétations proposent une lecture métaphysique du Château qui serait la recherche d’un absolu, d’une transcendance. Mais Le Château est aussi une quête bien réelle qui donne lieu à des affrontements humains. Chez Kafka, le mal est une aporie : les romans de Kafka ne donnent pas de solution, ils n’expliquent pas la causalité de la situation douloureuse. Un mal est instauré et le personnage doit faire avec. Du coup, on peut se demander s’il y a une forme de sagesse chez le personnage Kafkaïen qui accepte tout le temps ce qui lui arrive. En tout cas il y a une forme de patience et une répétition du même pour arriver à ses fins. Dans l’œuvre de Kafka, il y a très peu de compassion chez les personnages rencontrés par les héros. Dans La Métamorphose, Grégoire fait peur membres de sa famille mais il n’est

Introduction Générale pas plaint. Les gardes du château dans Le Château ne font preuve d’aucune empathie. Il y a une forme de froideur chez les êtres et dans les relations entre les personnages. La littérature de Kafka sur le mal a inspiré beaucoup de philosophes. Beaucoup de textes ont interrogé philosophiquement les textes de Kafka. Ce dernier a été vu comme un auteur visionnaire. On voit chez lui une prophétie du régime nazi (La Colonie Pénitentiaire). On voit surtout dans ses œuvres la description du régime bureaucratique, des excès, de la société impersonnelle (Le Château et Le Procès). Kafka aurait décrit la perte d’identité et l’animalisation dans les régimes politiques oppressifs (La Métamorphose). Il est constamment relié au mal des années 1940-1950. Kafka est donc un romancier éclairant pour son époque et pour l’époque postérieure et il est très lu pendant la Seconde Guerre mondiale en France grâce à la traduction française d’Alexandre Viala.

B – La vie de Kafka. Il est né à Prague (capitale de la Bohème), il fait partie de l’Empire austro-hongrois. Il a deux frères qui sont morts en bas âge et trois sœurs plus jeunes qui vont être déportées lors de la Seconde Guerre mondiale. La dernière de ses sœurs est morte à Auschwitz en septembre 1943. Kafka est un personnage singulier, il a une enfance solitaire. Sa langue maternelle est l’allemand donc il va écrire ses textes en allemand. La famille Kafka est juive. Kafka a des relations compliquées avec son père qu’il considère comme dominant et prétentieux (La Lettre au père). Il n’a pas un rapport intense avec sa mère mais s’identifie fortement avec la famille de celle ci qui est réputée intellectuelle et spirituelle alors que la famille de son père est plutôt du côté du commerce. Très tôt il s’intéresse à la littérature. Il décide d’étudier le droit après son baccalauréat qu’il passe en 1901. En 1902, il fait la connaissance du poète Max Brod qui sera son ami le plus influent et qui publiera la plus grande partie de son œuvre après sa mort. En 1906, il est reçu docteur en droit. A partir de 1907, il va entrer au service d’une compagnie d’assurance qu’il quitte en 1922. Du côté de sa vie privée, Kafka est un des écrivains à avoir eu le plus de fiancées sans jamais se marier dont une de ses traductrices : Milena Jesenska. La dernière femme de Kafka s’appelle Dora Diamant et sera sa compagne à Berlin. Il meurt de tuberculose (il souffrait également d’hypocondrie, de phobie sociale, de dépression) à l’âge de 40 ans. Il est enterré à Prague dans le nouveau cimetière juif.

III – Explication des six premières lignes du texte de Nietzsche. Cette première partie correspond à une seule phrase. Nietzsche ouvre son texte en nous faisant une sorte de confidence : il éprouve des « scrupules » à parler de l’origine du bien et

Introduction Générale du mal mais c’est néanmoins le sujet qu’il s’est choisi. Il énonce son scrupule ancien de s’en prendre à l’ordre établit et de questionner l’origine de la morale. Nietzsche s’attaque à un fait établit de longue date : « tout ce qui a été jusqu’à présent sur Terre célébré sous ce nom ». Il prend pour sujet philosophique une chose communément admise et qu’a priori on ne peut discuter, interroger sans remettre en question toute une norme, un équilibre qui fonde une société. Nietzsche se place d’emblée en « contradiction avec son entourage, son âge, ses modèles, ses origines ». Il faut rappeler que Nietzsche est issu d’une famille pastorale luthérienne : son père est pasteur et avec son grand-père ils vont enseigner la théologie. Enfant, Nietzsche lui-même a voulu être pasteur mais à partir de 17 ans sa foi s’est affaiblie et il a commencé à questionner la religion et son rapport à la religion. Il mentionne également ses modèles : Schopenhauer, Paul Rée (vision naturalisée de la morale). Nietzsche distingue d’emblée deux façons de faire : se plier à la norme ou oser l’interroger. Lui il ose l’interroger : il veut explorer la morale pour comprendre l’origine de la morale qui régit nos rapports humains. Nietzsche s’engage sur la voie de l’éthique descriptive, il est à la recherche d’une généalogie de la morale. Il insiste sur le terme de « scrupule » : il pose le doute comme première attitude face à son sujet : la morale ne va pas de soi, il y a donc une nécessité philosophique à s’interroger sur son fondement. C’est ici qu’il introduit pour la première fois le terme d’a priori qu’il place entre guillemets et qui réfèrent directement à la philosophie de Kant. L’a priori dans la pensée de Kant c’est une c...


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