Thèse de doctorat en sciences de gestion : Responsabilité sociale des entreprises et ONG: une approche critique des dimensions politiques de la gestion des ONG PDF

Title Thèse de doctorat en sciences de gestion : Responsabilité sociale des entreprises et ONG: une approche critique des dimensions politiques de la gestion des ONG
Author Guillaume Delalieux
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Summary

UNIVERSITE DE LILLE I - IAE de Lille Ecole doctorale Sésam (Sciences économiques, sociales, de l’aménagement et du management) Thèse préparée au sein du laboratoire Lille Economie et Management (LEM) UMR CNRS 8179 Responsabilité Sociale des Entreprises et ONG : UNE APPROCHE CRITIQUE DES DIMENSIONS P...


Description

UNIVERSITE DE LILLE I - IAE de Lille Ecole doctorale Sésam (Sciences économiques, sociales, de l’aménagement et du management)

Thèse préparée au sein du laboratoire Lille Economie et Management (LEM) UMR CNRS 8179

Responsabilité Sociale des Entreprises et ONG : UNE APPROCHE CRITIQUE DES DIMENSIONS POLITIQUES DE LA GESTION DES ONG TOME I

Thèse pour l’obtention du doctorat en Sciences de gestion présentée et soutenue publiquement à Lille Le 17 Décembre 2007 par

Guillaume DELALIEUX

Jury

M. Pierre LOUART, Professeur, IAE de Lille, Directeur de recherche M. Jacques IGALENS, Professeur, IAE de Toulouse, Rapporteur M. Yvon PESQUEUX, Professeur, CNAM, Paris, Rapporteur M. Alain DESREUMAUX, Professeur, IAE de Lille, Suffragant M. Roland PEREZ, Professeur Emérite, Université de Montpellier I, Suffragant M. Geert DEMUIJNCK, Philosophe, Institut Catholique de Lille, Suffragant

RESUME DE LA THESE

Cette thèse propose une approche compréhensive de l’émergence et du développement d’un processus de responsabilisation des pratiques de la filière textile, à travers l’étude de cas de l’ONG de développement Yamana. Elle est fondée sur une analyse critique des phénomènes de Responsabilité Sociale de l’Entreprise, dont nous questionnons la nouveauté. Celle-ci provient essentiellement des effets d’analyse induits par la multiplication des analyses réseaux, centrées autour de l’entreprise et de ses parties prenantes. Pratiques d’entreprises et même partenariats ONG-Entreprises ne sont que les manifestations contemporaines de pratiques plus anciennes auxquelles la Théorie des Parties Prenantes (TPP) fournit un nouvel emballage. Elle permet le passage d’un usage intuitif de la notion de partie prenante à un usage systématisé (la TPP) qui légitime une conception spécifique du changement social. Elle met en scène une société civile réduite à l’environnement immédiat des entreprises où des managers effectuent un arbitrage technique entre les intérêts des parties prenantes devenus convergents. Cette vision se substitue à celle d’une société plus large où le dépassement des conflits s’effectuait par un processus politique démocratique. L’étude de cas présente de manière contextuelle, processuelle et longitudinale la création et le développement de l’ONG Yamana et de son label Fibre Citoyenne visant à responsabiliser les pratiques de la filière textile, du producteur de coton au consommateur final. L’analyse qui suit replace ce cas au sein du processus plus large de responsabilisation de la filière textile initié en 1995 par le Collectif de l’Ethique sur Etiquette. Nous le comparons à l’interprétation faite par Bartley (2003) de l’émergence de mécanismes de certification privés (industrie forestière et textile) aux Etats-Unis. Les pressions institutionnelles (administration) qui s’exercent sur Yamana influencent considérablement sa démarche. Des tensions apparaissent entre une commercialisation de la démarche pour compenser la baisse des financements publics et l’impératif d’intégrité constitutif du statut de l’ONG. L’action des ONG est ainsi paradoxale : elle se fonde sur une critique de la mondialisation économique, mais en favorisant les régulations de marché au détriment de l’intervention publique, elle renforce le cadre institutionnel néolibéral qui sous-tend la mondialisation. Les marchés n’offrent qu’une réponse partielle aux problèmes de l’injustice économique tant que d’autres formes d’actions collectives, mettant en jeu mouvements sociaux et gouvernements, ne s’organisent pas efficacement pour peser sur les institutions nationales et internationales qui orientent la compétition économique. Derrière le cas de Yamana, ce sont les débats entre frontières publics et privées du traitement des thématiques de RSE qui se lisent en filigrane. La résurgence actuelle de la société civile continue de se heurter à l’aporie du couple EtatMarché. Mots clés : Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE), Organisation Non Gouvernementale (ONG), Approche critique, Néoinstitutionnalisme

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PHD SUMMARY

This PhD proposes to understand the emergence and the development of a process of corporate responsibility in the textile industry. We study the building of an integrative private mechanism of certification of the whole textile field (“Fibre Citoyenne”) created by Yamana, a French developmental NGO. We offer a critical analysis of CSR practices: their supposed novelty is in fact, more than the innovations of these practices, created by effects of analyses arising from numerous network analyses centred on firms and their stakeholder. Old partnerships between firms and their strategic coalition are nowadays depicted as new stakeholder. The evolution from an intuitive use of the stakeholder notion into a systematic use through the stakeholder theory is in fact legitimizing a neoliberal conception of social change: market regulations are encouraging in place of state regulations. Based on the new institutionnalist theory (Di Maggio, Powell, 1983; 1991) we propose an analysis of the main institutional pressures applying on Yamana replaced within its organizational field. These main contradictory pressures arise from the public administration, the field of the developmental NGO and the economic actors. They influence the structuration of Yamana and the implementation of the label “Fibre Citoyenne” that is trying to empower the practices of the textile industry: from the cotton producer until the final consumer. The decrease of public financing for NGO combined with pressures from economic actors requiring “professionalization” from NGOs are pushing Yamana to adopt practices deriving from the field of economic actors. This race to consumers from the NGO is threatening the integrity of their label and their objectives as a developmental NGO. The action of NGOs is paradoxical: they are criticizing the globalization of trade, but their action at the same time is conforming to the neoliberal institutional context encouraging market regulations in place of state regulations. The case study of Yamana is revaling the limits of market regulations. They are failing to tackle economic injustice that can only be adressed by other forms of collective actions involving social movements and governments, putting pressure on the national and international institutions that control economic competition. Behind the case of Yamana is at stake the debate of the privatization of state regulations. Keywords : Corporate Social Responsibility (CSR), Non Gouvernmental Organization (NGO), Critical Management Studies, Neoinstitutionalism.

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REMERCIEMENTS

Mes remerciements vont tout d’abord à mon directeur de thèse, Pierre Louart. Au-delà des conseils dispensés tout au long de ce travail de thèse, il a su trouver les mots justes, au moment où j’en avais besoin, pour m’encourager à persévérer dans un chemin de recherche périlleux mais tellement passionnant. Sa façon d’envisager la recherche en sciences de gestion est pour beaucoup dans l’orientation du présent travail de thèse. Je remercie le Conseil Régional du Nord Pas de Calais pour la bourse de recherche triennale qui m’a été accordée. Cette bourse m’a permis de bénéficier d’un soutien financier dont malheureusement trop peu de doctorants bénéficient aujourd’hui. Je remercie Dominique Greiner et Geert Demuijnck, Co-Directeurs du CREE (Centre de Recherche en Ethique Economique) pour les conditions favorables dans lesquelles mes travaux se sont déroulés ainsi que tous ses membres pour le soutien qu’ils m’ont apporté au cours de ce travail de thèse. Je remercie Benoît Dervaux et Alain Desreumaux (Co-Directeurs du LEM) pour le financement qu’ils m’ont accordé pour participer aux colloques 2006 et 2007 de l’Academy of Management à Atlanta et Philadelphie. Ma participation aux séminaires doctoraux (SIM et CMS) et la présentation de mes travaux de recherche m’ont permis de me familiariser avec les spécificités d’une recherche sur des ONG américaines bien plus nombreuses qu’en France. Plus largement, les tendances que j’ai cru percevoir à l’œuvre dans l’univers académique américain m’ont paru préfigurer sur bien des points l’orientation que prend la recherche en France actuellement. Les professeurs Yvon Pesqueux et Jacques Igalens ont accepté la tâche difficile de rapporteur. Leur présence dans mon jury de thèse m’honore d’autant plus que leurs travaux respectifs, qui ont constitué pour moi une source d’inspiration féconde, me font mesurer tout le chemin qui me reste à parcourir. Le professeur Roland Pérez a également accepté d’évaluer ce travail en qualité de suffragant, après que j’ai pu apprécier à l’Université d’Eté Européenne 2007 de Montpellier toute la passion qui anime son engagement dans la recherche et l’enseignement universitaire. Je suis reconnaissant à Alain Desreumaux d’avoir accepté de participer à l’évaluation de mon travail de thèse. Après trois années de collaboration au CREE, Geert Demuijnck a gentiment accepté de sortir du champ de la philosophie analytique pour venir évaluer des travaux en sciences de gestion. Je remercie l’ensemble du jury pour l’évaluation de ce travail de thèse et pour les remarques critiques 4

qu’ils sauront m’adresser et qui constitueront des jalons précieux pour la suite de mes travaux. J’adresse mes remerciements sincères à celles et ceux à l’IAE de Lille qui m’ont soutenu, doctorants, enseignants-chercheurs, personnel, avec une pensée particulière pour Fabrice Caudron, le temps qu’il m’a accordé et ses encouragements précieux. J’espère qu’il aura rapidement l’occasion d’aider d’autres doctorants dans leur parcours de recherche. Bernard Joly et Frédéric Worms, Professeurs de Philosophie à l’Université de Lille 3 m’ont accepté, au cours de mon travail de thèse, au sein de leur Master 2 « Ethique, Politique et Société » qu’ils co-dirigent, et je leur exprime ma gratitude. Leur ouverture d’esprit m’a permis d’aiguiser mes positions épistémologiques et plus largement mon sens critique. Je remercie mes étudiants pour l’aide qu’ils ont pu m’apporter en réagissant aux raisonnements issus de mes travaux de recherche. La simplicité parfois déconcertante avec laquelle ils ont réduit à néant certains de mes propos m’a permis de garder à l’esprit l’importance de préserver des passerelles entre la recherche et l’enseignement. Enfin cette recherche sur la gestion des ONG n’aurait tout simplement pas pu avoir lieu sans la confiance que m’ont accordée indistinctement tous les acteurs de terrain, au premier rang desquels figurent les membres de Yamana. J’espère sincèrement qu’à défaut d’une aide directe, le présent travail aura apporté un regard utile dans leur démarche, suite aux nombreuses conversations et échanges que nous avons eus. Le sens de leur engagement et la sagesse pratique dont leur action est emplie me feront toujours éprouver un sentiment de respect à leur égard. Je remercie Emile Brun et Christian Brodhag, pour m’avoir intégré au sein de la délégation française pour la 3ème réunion internationale ISO 26000 de Lisbonne en Mai 2006. Les nombreux échanges que j’ai eus avec les membres de cette délégation et ceux des autres pays représentés m’ont permis de prendre conscience des dynamiques institutionnelles essentielles à l’œuvre derrière le mouvement de la RSE. Enfin, je n’oublie pas toutes les personnes qui ont participé de près ou de loin à cette recherche. A Aurélie, mon épouse, pour sa patience et son soutien. A ma fille, Maria.

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SOMMAIRE Introduction générale ...................................................................................................... 11 Plan de la recherche ......................................................................................................... 25 1ère Partie : Responsabilité et entreprise ............................................................... 31 1 Chapitre 1 : Au centre de la démarche des ONG : La notion de RSE... 33 Introduction du chapitre 1 : les origines de la notion de RSE......................... 35 1.1 La RSE : une notion à la fois attirante et ambigüe............................ 38 1.1.1 Définir la RSE ?........................................................................................... 38 1.1.2

La notion de RSE : une notion valise de plus ? ............................. 49

1.2 La nouveauté de la RSE ? Fondements et émergence des pratiques contemporaines...................................................................................... 54 1.2.1

La recherche de fondements en question ? .................................... 54

1.2.2 Les thématiques de RSE portées par une multiplicité d’acteurs et d’institutions ....................................................................................... 56 1.2.3 Les pratiques contemporaines de RSE révélatrices du « moment libéral ».................................................................................................... 59 1.2.4 Critiques des fondements de la RSE : sortir des pratiques micros de RSE pour atteindre le cadre macro politique de la RSE ........ 61 1.3 Une ambigüité au service des débats et conflits entre acteurs 64 1.3.1 L’apparition de la RSE sur l’agenda politique de la Commission Européenne ........................................................................................ 65 1.3.2 Le Forum Multistakeholder .................................................................... 67 1.3.3 Le mouvement de la RSE : objet de lobbying................................ 76 1.3.4

Le marché de la RSE : objet de convoitises ................................... 77

Conclusion : un mouvement de la RSE porté par une dialectique état/marché ......................................................................................................................... 82 2 Chapitre 2 : Les approches théoriques de la RSE ........................................ 84 2. 1. Le courant des Parties Prenantes ............................................................... 87 2.1.1. Le contexte d’émergence de la TPP ................................................... 87 2.1.2. La définition des Parties Prenantes .................................................... 88 2.1.3. L’identification des parties prenantes................................................ 89 2.1.4. La hiérarchisation des parties prenantes ......................................... 90 2.1.5. Les différentes versions de la TPP ...................................................... 91 2.1.6. Des idées anciennes issues du management stratégique ......... 93 2.2. 2.2.1. 2.2.2. 2.3.

Critiques de la Théorie des Parties Prenantes................................ 94 Des racines culturalistes marquées.................................................... 94 Les impacts institutionnels..................................................................... 96 Responsabilité Sociale et gouvernance............................................. 96

2.3.1. Gouvernance et gouvernement ........................................................... 97 2.3.2. Gouvernance et éthique de la discussion....................................... 102 6

2.3.3. Les principales théories de la corporate governance ................ 105 2.4. Les conceptions morales et politiques de la TPP et de la corporate gouvernance ......................................................................................... 111 2.4.1. La colonisation idéologique du management ............................... 112 2.4.2. Le poids de l’homo oeconomicus dans les représentations dominantes en management .............................................................................. 113 2.4.3. Homo oeconomicus ou idiot rationnel ?.......................................... 114 2.4.4. L’argument méthodologique ............................................................... 116 2.4.5. Les conceptions anthropologiques de philosophie politique et morale incluses dans le courant des PP.................................. 117 Conclusion : délaisser la TPP pour l’analyse des pressions institutionnelles encourageant le mouvement de la RSE ................................................................. 125 PARTIE 2 : ABORDER LE FONCTIONNEMENT DES ONG EN GESTION........ 127 3 Chapitre 3 : ONG ET TIERS SECTEUR : LES DIFFERENTES APPROCHES ....................................................................................................................... 129 Introduction : permettre une approche en gestion du fonctionnement des ONG....................................................................................................................................... 131 3.1 ONG et Tiers Secteur : les principales approches ............................ 134 3.1.1 Les sources documentaires ................................................................... 134 3.1.2 Caractéristiques, statuts juridiques et financement des ONG . 140 3.1.3

ONG et histoire ........................................................................................... 146

3.1.4 Les approches « sociologiques » : les ONG comme Social Movement Organizations et la Social Movement Theory........................... 152 3.1.5 Les mouvements sociaux ....................................................................... 154 3.1.6 3.1.7 3.2

Approches économiques ......................................................................... 158 Les enjeux politiques................................................................................ 162 La tension entre ONG - gestion ............................................................... 165

3.2.1 La construction historique des sciences de gestion, à l’origine de la tension avec les ONG ? ................................................................................ 167 3.2.2 Une opposition ONG – gestion à ne pas éxagérer........................ 171 3.3 Réconcilier ONG et gestion : médiation et déconstruction des outils de gestion traditionnels .............................................................................. 176 3.3.1 Comment aborder les ONG en gestion dans le cadre de notre travail de thèse ? ....................................................................................................... 176 3.3.2 Une approche multidisciplinaire à double entrée pour l’étude des ONG en gestion .................................................................................................. 177 Conclusion : les ONG, de la critique à la reconstruction des outils traditionnels de gestion ? ............................................................................................. 179 4 Chapitre 4 : Postionnement épistémologique et méthodologie de la recherche - pluralisme méthodologique et paradigme constructiviste modéré................................................................................................................................. 181 7

Introduction : episteme, techne ou phronesis ? ................................................. 182 Section 1 : Epistémologie et sciences de gestion............................................... 184 4.1 Les principales questions épistémologiques ....................................... 185 4.1.1 Episteme, techne et phronesis ............................................................. 185 4.1.2 4.1.3 4.1.4

Le double niveau des discours scientifiques : les Themata ...... 187 Expliquer ou comprendre ?.................................................................... 189 Histoire de la gestion ou gestion de l’histoire ?............................. 191

4.1.5 Les différents positionnements épistémologiques en gestion : le positivisme ................................................................................................................... 192 4.1.6

Le(s) constructivisme(s) en sciences de gestion .......................... 195

4.2 Un positionnement constructiviste modéré pour prendre en compte les questions de sens............................................................................... 200 4.2.1 Une posture articulée autour de 4 pôles ...............


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