Tremblay c Martel - 2009 QCCQ 2465 PDF

Title Tremblay c Martel - 2009 QCCQ 2465
Course Biens et prescription
Institution Université de Sherbrooke
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Résumé juris...


Description

2009 QCCQ 2465

COUR DU QUÉBEC CANADA PROVINCE DE QUÉBEC DISTRICT DE SAINT-HYACINTHE LOCALITÉ DE SAINT-HYACINTHE « Chambre civile » Nº :

750-22-003391-061

DATE : 19 MARS 2009 ______________________________________________________________________ SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE DENIS ROBERT, J.C.Q. ______________________________________________________________________ YVON TREMBLAY Demandeur c. JEAN MARTEL Défendeur ______________________________________________________________________ JUGEMENT ______________________________________________________________________ [1] Le demandeur réclame au défendeur une somme amendée à 54 517 $ soit 39 517 $ pour perte monétaire et 15 000 $ à titre de dommages et intérêts.

LES FAITS [2] Le 17 février 1987, le demandeur et son frère ont vendu à monsieur Arthur Charest et madame Lise Cardinal un fonds de commerce de camping avec les immeubles.

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Tremblay c. Martel

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Parcelle 2: Partie à être réservée par M. Yvon Tremblay: « Une parcelle de terrain de figure irrégulière, située dans la Municipalité de la Paroisse de Ste-Marie de Monnoir, étant une PARTIE du lot originaire numéro TROIS CENT CINQUANTE-TROIS (P.353) une PARTIE du lot originaire numéro TROIS CENT CINQUANTE-QUATRE (P.354) et une PARTIE du lot originaire numéro TROIS CENT CINQUANTE-SIX (P.356) des plan et livre de renvoi officiels du cadastre de la Paroisse de Ste-Marie de Monnoir, division d'enregistrement de Rouville et indiquée par les lettres "D-C-E-F-G-H-J-K-L-M-NP-Q-D" au plan ci-après mentionné. »

[4] Les parties 353, 354 et 356 sont spécifiquement identifiées au contrat par une description précise et détaillée. [5] Le plan mentionné est celui préparé par Daniel Bérard, a.g. en date du 16 février 1987 sous le numéro 625 de ses minutes. [6] Par le même contrat, les acheteurs ont consenti une servitude personnelle en faveur du demandeur, sa famille et ses proches amis, pourvu qu'ils le fassent dans des endroits voués à cet usage sur le camping pour pratiquer le sport de la motoneige et ceci, tant et aussi longtemps que ledit Yvon Tremblay habitera dans la résidence cidevant réservée par lui ou dans une résidence qui serait encore contiguë à l'immeuble présentement vendu, à savoir le camping. [7] Le 12 mai 1987, les acheteurs ont accepté, en relation avec la vente intervenue le 17 février 1987 et rétroactivement à cette dite vente, d'établir sur leur propriété une servitude de non-construction en faveur du demandeur. [8]

Les limites de la servitude sont ainsi identifiées : SERVITUDE: « Il est de plus pourvu et entendu que les acquéreurs ou représentants, successeurs et ayant droits ne pourront aménager de site de camping ou construire quelque bâtiment que ce soit à moins de cent pieds ou plus près du fossé soit: vis-à vis les limites sud-ouest du terrain d'Yvon Tremblay identifiées par les lettres K J H G E sur le plan préparé par Daniel Bérard Arpenteur géomètre en date du 16-02-1987, minute 625, les acquéreurs ne pourront bâtir ou aménager à moins de cent pieds en moyenne de ces lignes limitatives; vis-à-vis les limites identifiées sur ledit plan "N M L K", les acquéreurs ne pourront bâtir ou aménager à une distance moindre de quarante pieds (40'0) de cette limite ainsi identifiée; »

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[3] Lors de ladite vente, le demandeur s'est réservé une portion ci-après décrite à distraire des immeubles vendus :

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[10] La servitude était donc établie pour une période temporaire, en fonction de la résidence construite sur la parcelle du terrain du lot réservé. [11] Entre 1987 et 2003, d'autres transactions sont survenues en rapport avec le terrain de camping et les immeubles vendus. [12] Au cours du mois de novembre 2003, le demandeur a appris que le nouvel acquéreur des lieux planifiait de construire des immeubles résidentiels sur les lots sur lesquels le demandeur croyait avoir une servitude dûment publiée. [13] Après avoir été informé de l'acte de servitude du 12 mai 1987, le nouvel acquéreur a négocié de bonne foi avec le demandeur pour obtenir la radiation de ladite servitude en échange d'une indemnité compensatoire. [14] Le nouvel acquéreur a accepté de céder un terrain d'une superficie de 7 106,33 pieds carrés au demandeur en contrepartie de l'annulation de la servitude. [15] Au début de l'année 2004, le nouvel acquéreur a entrepris des démarches pour faire préparer l'acte de cession de son immeuble au demandeur; après vérifications, le notaire intervenu au dossier a informé ce dernier que la servitude n'a jamais été publiée de sorte qu'il n'avait pas à indemniser le demandeur parce que la servitude ne lui était pas opposable. [16] Le demandeur a alors rencontré le défendeur pour l'informer de la situation et ce dernier a tenté en vain d'inscrire la servitude sur les lots concernés. [17] La preuve a démontré que le défendeur a agi comme notaire au contrat le 12 mai 1987 et a fait défaut de publier ledit acte notarié. [18] Le défendeur avait également agi comme notaire lors du contrat de vente du 17 février 1987. [19] Le défendeur refuse d'assumer aucune responsabilité et refuse d'indemniser le demandeur. QUESTIONNEMENT [20] Pour résoudre le présent litige, il faut déterminer quelle est la nature de la servitude qui a été convenue le 12 mai 1987 et qui a été inscrite à l'acte notarié préparé par le défendeur, lequel acte notarié n'a pas été publié et examiner les conséquences de la non-publication.

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[9] L'acte notarié précise que cette servitude « vaudra tant et aussi longtemps que ledit Yvon Tremblay ou sa famille (enfants au premier degré et épouse) sera propriétaire de la résidence du […] à Marieville ».

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ANALYSE DES FAITS [22] Le demandeur soutient que la servitude de non-construction constitue une servitude réelle et que le défendeur avait l'obligation de la rédiger adéquatement et de publier l'acte notarié conformément au mandat qui lui avait été confié pour protéger le demandeur. [23] Le défendeur explique que la servitude est purement personnelle comme dans l'acte de vente précédent et qu'il n'a pas commis de faute en ne publiant pas ledit acte parce que la servitude n'était pas rattachée à aucun immeuble. [24] Les prétentions du défendeur ne sont pas conformes à la preuve qui a été présentée. [25] Il est manifeste que le demandeur désirait obtenir une protection réelle pour obtenir sa tranquillité; à cette fin, une restriction de construction et d'utilisation attachée aux immeubles vendus a été consentie par les acquéreurs pour protéger le demandeur qui s'était réservé la propriété d'une parcelle de terrain contigu. [26] Les immeubles vendus étaient donc affectés d'une restriction de construction et d'utilisation et constituaient le fonds servant qui était clairement identifié par les références au plan préparé par l'arpenteur-géomètre. [27] Ces restrictions liaient les acquéreurs, leurs représentants ou leurs successeurs ou leurs ayants droit; cet élément était important pour le demandeur qui voulait s'assurer que toute personne qui pourrait faire l'acquisition durant le temps prévu serait liée par cette clause restrictive, d'où la nécessité de publier l'acte notarié. [28] La référence au plan de l'arpenteur-géomètre et la rétroactivité de l'acte de servitude à la date de la vente constituent des liens suffisants de rattachement aux immeubles vendus sur lesquels les acquéreurs ont accepté de restreindre leur droit de construire dans les limites prévues. [29] La servitude inscrite au contrat du 12 mai 1987 est de la nature d'une servitude personnelle constituant une charge imposée à l'immeuble des acquéreurs en faveur du demandeur pour une période déterminée, soit aussi longtemps que le demandeur serait propriétaire de sa résidence construite sur la parcelle de terrain distraite. [30] Lorsque l'article 1119 C.c.Q. stipule que la servitude constitue un droit réel, ce vocable réfère à la servitude réelle proprement dite établie de fonds en fonds

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[21] Les règles pertinentes du droit sont inscrites à l'article 1119 et aux articles 1177 et suivants du Code civil du Québec de même qu'aux articles 2938 et 2941.

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[31] La servitude personnelle constitue une charge imposée sur un immeuble, soit l'immeuble des acquéreurs en faveur du demandeur. [32] Il y a alors un fonds servant, soit le fonds des acquéreurs, mais pas de fonds dominant. [33]

La charge est alors réelle par son objet et personnelle par son sujet.

[34] Contrairement à la servitude réelle, la servitude personnelle est essentiellement temporaire. [35] L'acte notarié devait être rédigé pour permettre d'identifier l'immeuble servant à la servitude et devait être publié conformément à l'article 2938 C.c.Q. [36] La servitude non publiée a effet seulement entre les parties contractantes; mais vis-à-vis les tiers, la publication est requise aux fins d'opposabilité comme le prévoit l'article 2941 C.c.Q. [37] L'omission de publier au registre foncier l'acte de servitude empêche l'opposabilité de telle servitude à tout tiers acquéreur des immeubles vendus. [38] Le défendeur avait une obligation de résultat et devait s'assurer de respecter les formalités requises pour la publication de la servitude dont bénéficiait le demandeur. [39] La faute du défendeur résulte du fait qu'il n'a pas publié au registre foncier l'acte constitutif de la servitude alors qu'il était de son devoir de le faire en référence aux immeubles vendus le 17 février 1987. DOMMAGES [40] La preuve a démontré que le nouvel acquéreur a convenu avec le demandeur de lui transférer la propriété d'un terrain pour valoir compensation de sa renonciation à la servitude dont il croyait bénéficier. [41] La valeur marchande du terrain, en cette année 2004, était de 4,50 $ le pied carré pour une superficie totale de 7 106,33 pieds carrés, ce qui constitue une valeur globale de 39 517 $.

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Autorités consultées citées en annexe

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conformément à l'article 1177 C.c.Q. et à la servitude personnelle établie sur un fonds en faveur d'une personne conformément à la doctrine et à la jurisprudence1 qui en ont consacré l'existence.

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[43] Lorsque le nouvel acquéreur a appris que la servitude ne lui était pas opposable, il s'est désisté n'ayant plus aucune obligation de négocier avec le demandeur dont les droits n'avaient pas été protégés par le défendeur. [44] Le demandeur a donc perdu 39 517 $ soit la valeur monétaire dudit terrain parce que la servitude dont il bénéficiait par contrat notarié, le 12 mai 1987, n'a pas été publiée pour faire opposition au nouvel acquéreur et cela contrairement aux intentions manifestes du demandeur qui avait confié le mandat au défendeur de le protéger à cet effet. [45] Le demandeur réclame également à titre de dommages et intérêts pour troubles et inconvénients et perte de jouissance, une somme de 15 000 $. [46] Le demandeur a témoigné que ses dommages résultent du bris des ses arbres, de sa haie et d'autres végétaux, le tout ayant été causé par l'entrepreneur en construction. [47] Le demandeur déclare avoir subi des ennuis considérables à cause du bruit et de la poussière qu'il a dû supporter et de la terre d'excavation qui a été transportée sur son terrain. [48] Le demandeur soutient que si la servitude avait été publiée, le nouvel acquéreur ou son entrepreneur n'aurait pu exercer ses travaux à proximité de son domicile et il n'aurait pas eu à subir les dommages. [49] La preuve présentée par le demandeur ne permet pas de conclure que les dommages et intérêts réclamés résultent de la faute du défendeur. [50] Ces dommages sont plutôt des dommages indirects qui ne peuvent être à la charge du défendeur parce qu'ils ont été causés par de tiers intervenants. [51] Le défendeur, qui n'a pas publié l'acte de servitude, est responsable des dommages directs et immédiats résultant de sa faute, lesquels dommages ont été prouvés jusqu'à concurrence de 39 517 $. [52]

Cette faute du défendeur constitue la « causa causans » des dommages prouvés.

[53]

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

[54] CONDAMNE le défendeur à payer au demandeur la somme de 39 517 $ plus les intérêts au taux légal majoré de l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code

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[42] Cette preuve résultant du témoignage du demandeur n'a pas été contredite; les précisions et les explications fournies sont suffisamment crédibles pour constituer une preuve recevable.

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__________________________________ DENIS ROBERT, J.C.Q.

CAYER OUELLETTE, avocats Me Éric Allaire Avocat du demandeur ROBINSON SHEPPARD SHAPIRO S.E.N.C.R.L. avocats Me D. Andrew Penhale Avocat du défendeur Date d’audience :

23 février 2009

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civil du Québec à compter de la date de la signification de la requête introductive d'instance et les dépens.

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AUTORITÉS CITÉES PAR LE DEMANDEUR ET LE DÉFENDEUR Épiciers unis Métro-Richelieu c. The Standard Life Assurance Company et als.,REJB 2001-23288 (C.A.) Pierre-Claude Lafond, Précis du droit des biens, 2ième éd., Les Éditions Thémis, 2007 AUTORITÉS CITÉES PAR LE DEMANDEUR Loi sur le notariat, LRQ, chapitre N-3 Lamy c. Fadous et als, EYB 2005-87374 (C.S.) Elias Benhamou, La validité des servitudes réelles de restriction à l'usage en droit civil québécois, Développement récents en droit immobilier et commercial (2006), Service de la formation continue du Barreau du Québec EYB2006DEV1222 Patrice Deslauriers, La responsabilité des notaires, Responsabilité, Collection de droit 2008-2009, École du Barreau du Québec vol. 4, EYB2008CDD94 Wilfrid Noël et fils Ltée c. Me Sylvie Bouchard et al, AZ-97035045 (C.Q.) Me Sylvie Bouchard c. Wilfrid Noël et fils Ltée, REJB 2000-16650 (C.A.) Solomon Biergrier c. Chang Woo Lee et al., REJB 1998-09623 (C.A.) Crépeau, P.-A. et al, Dictionnaire de droit privé et Lexiques bilingues, 2e éd., Éditions Yvon Blais AUTORITÉS CITÉES PAR LE DÉFENDEUR LAMONTAGNE, Denys-Claude, Biens et propriété, 5ième édition, Éditions Yvon Blais, pages 57 à 68 BEAUDOIN, Jean-Louis et JODIN, Pierre-Gabriel, Les obligations, 6ième édition, Édition Yvon Blais, paragraphes 1 à 7 et paragraphes 472 à 482 Pétro-Canada c. Société immobilière Boulevard Bromont enr., Hon. J. Léo Daigle, J.C.S. 460-17-000259-036, 28 septembre 2004 (C.S.)

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AUTORITÉS CONSULTÉES...


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