Fiche Cécile Ottogalli et Philippe Liotard PDF

Title Fiche Cécile Ottogalli et Philippe Liotard
Course Préparation au CAPEPS
Institution Université de Montpellier
Pages 4
File Size 171.3 KB
File Type PDF
Total Downloads 59
Total Views 132

Summary

Fiche Cécile Ottogalli et Philippe Liotard...


Description

Ecrit 1 CAPEPS FICHE DE LECTURE Auteur : Cécile OTTOGALLI-MAZZACAVALLO et Item : L'EDUCATION DES CORPS, DE LA PERSONNE ET LA FORMATION DU CITOYEN Philippe LIOTARD Texte : « L'apprentissage du genre en éducation physique. Devenir homme ou femme par l'exercice » Idée principale : « l'éducation physique scolaire contribue à la construction du masculin et du féminin ainsi qu'à la diffusion de modèles identitaires dominants en matière de féminité et de masculinité. » (p. 91)

IDEES FORTES

PREUVES / EXPLICATIONS

On ne naît pas homme, on ne Les théories du genre montrent qu'« un homme a appris à devenir homme, à réguler ses naît pas femme … on le comportements selon les codes de la virilité de son époque, alors qu'une femme en a fait de devient. même pour agir, sentir et penser selon les normes de la féminité dans lesquelles elle a été éduqué ». Ce conditionnement précoce et patient se traduit dans les postures, les gestes, les propos. Voici ainsi posé « la question de l'éducation comprise comme un double processus de transmission et d'intériorisation des éléments d'une culture, notamment des normes, des valeurs, des idéaux ». De 1880 jusqu'au premier conflit mondial, les contenus prescrits par l'école préfigurent la destinée sociale des jeunes filles et des jeunes garçons.

L'école et les instructions Le programme du travail manuel dans les Instructions officielles du 2 août 1882 est très explicite. Filles et garçons sont amenés à apprendre des techniques ordinaires du corps bien distinctes : « le travail de fer et de bois par le rabot et la scie aux garçons, le travail du tissu et et du papier par l'aiguille et les ciseaux pour les filles ». Ici, il ne s'agit pas seulement « d'apprendre à faire, mais bien d'apprendre à se comporter en femme ou en homme ». L'organisation de l'enseignement secondaire féminin contribue également à dessiner le destin social des femmes. En effet, leurs programmes « allégés et adaptés … donnent une grande place à la psychologie appliquée à l'éducation, l'économie domestique ou encore la couture […] leur but est alors de donner aux filles le goût des travaux de (leur) sexe » (Françoise MAYEUR, « L'enseignement secondaire des jeunes filles sous la 3ème République », 1977). Jacques GLEYSE (« L'image de la femme dans les discours sur l'EP et le sport de 1870 à 1930. Un « fait sociale total ? », 1996) constate alors que « le corps des filles, comme celui des garçons, est, avec l'éducation physique, soumis à une volonté de rationalisation instrumentale ». Ainsi, « les hommes, robustes et volontaires, assument le développement » du pays, « les femmes, sérieuses et appliquées, sont les éducatrices des générations futures ». Le cadre de référence est clairement posé. « L'école est en effet l'un des lieux essentiels de cette fabrique des sexes » (Thierry TERRET, « La natation et l'émancipation féminine au début du siècle », 1991). Les médecins Et si tant est que tous les médecins sont « convaincus de la nécessité d'une éducation physique féminine pour devenir femme », ce n'est que pour mieux mettre en avant « la figure de la mère, belle et fragile », la différence biologique servant d'argument et se muant en hiérarchie sociale qui finalise le destin des femmes à la maternité. Concrètement, pour Philippe TISSIE et Georges DEMENY, « l'exercice physique est un outil de renforcement, d'amélioration de la santé de celles que la société veut belles et saines pour redresser la race » (Anaïs BOHUON, « Entre santé et pathologie : discours médical et pratiques sportives féminines (1880-1922) », 2008). Dès lors, le Manuel des exercices gymnastiques et des jeux scolaires en 1891 normalise les représentations du corps féminin en estimant que « tout excès est condamné au profit d'une pratique modérée […] les exercices jugés trop violents … sont systématiquement exclus pour vanter les exercices doux et gracieux ». Plus précisément, le manuel interdit « les exercices de torsion et de flexion de tronc … les courses et les sauts … pour les remplacer par de la danse et des jeux spéciaux ».

Après la Première Guerre mondiale, les médecins contribuent à la construction d'une identité féminine n proposant une EP féminine distincte de celle des garçons.

Un corps procréateur et gracieux est le focus sur lequel tous s'accordent pour adapter l'EP féminine aux représentations qu'ils ont des femmes. En 1919, dans son ouvrage « L’Éducation physique et la race », Philippe TISSIE écrit que « l'éducation physique doit tout d'abord être appliquée à la femme … cellule mère de l'humanité […] pour permettre de plus saines et fécondes maternités ». Georges HEBERT (« Muscle et beauté plastique féminine », 1919) estime que le travail corporel par l'exercice doit « contribuer à la vraie beauté et impose un devoir envers soi que chaque femme devra exercer pour répondre aux codes de la féminité ». Il s'agit alors d'« Etre belle pour être utile » (Philippe LIOTARD, 1995). Robert JEUDON (Marcel LABBE, « Traité d'éducation physique, 1930) écrit que « nous nous soucions moins chez la femme de l'érudition que de la beauté ». Ainsi, la beauté devient même un critère de santé, une cause et une conséquence de l'éducation physique féminine. Philippe LIOTARD (« L'impossible spécificité de l'Education physique féminine », 1996) met en avant que « la recherche de la grâce féminine, c'est-à-dire la féminisation de la gestualité devient le point essentiel de la spécificité de l'éducation physique féminine ». En 1927, Bellin du Coteau (« La femme et l'éducation physique ») écrit qu'« il faut à la femme sa méthode … Se dépensant moins que l'homme, elle ne saurait présenter les mêmes besoins ». La construction du genre s'établit dans « une différence radicale entre les hommes et les femmes mais aussi dans leur hiérarchie » . « Contrôle, modération et adaptation à l'aune des référents masculins sont donc les maîtres-mots de l'EP pour les femmes ».

Cette EP féminine perdure « C'est parce que les femmes devront accoucher, porter leur enfant mais aussi le nourrir au sein pendant au moins les deux et le tenir aux bras que « tout naturellement », les exercices devront développer le dos, les hanches, les abdominaux et la poitrine, lieux de fragilité potentielle ». Voici à quoi sert tiers u vingtième siècle. l'éducation physique féminine et celle-ci est justifiée par la différenciation des qualités nécessaires de développer pour chaque sexe. Mais ce qui est notable, c'est bien que ces conceptions perdurent malgré les conquêtes progressives des femmes sur les terrains de sport (Thierry TERRET, Philippe LIOTARD, Anne ROGER, Jean-Philippe SAINT-MARTIN, « Sport et genre » en 4 tomes, 2005) et une école faisant de l'initiation sportive le couronnement de l'EP (Pierre ARNAUD, « Les rapports du Sport et de l'Education Physique en France depuis la fin du XIXème siècle », 1995). Dans les faits, nous constatons que l'Education Générale et Sportive s'adresse prioritairement à l'homme fort, courageux et viril tandis que l'éducation féminine vise la préparation des « femmes et des mères, gardiennes des foyers et de la race » (Instructions officielles du 1er juin 1941). De plus, les Instructions officielles du 1er octobre 1945 répartissent les activités en fonction « des saisons, de l'âge, du sexe et du degré d'entraînement des élèves ». Ainsi, si l'exercice devient sportif pour les garçons, il devient rythmique pour les filles : pendant la « période pubertaire de 12-13 ans à 15-16 ans », nous trouvons une « Éducation sportive (assouplissement du geste) et rythmique pour les jeunes filles. » Dès lors, la gymnastique harmonique et rythmique devient un outil d'une véritable culture corporelle féminine qui est notamment diffusée au sein de l'ENSEPS des jeunes filles de Chantenay-Malabry (Bernard LEBRUN et Yvon LEZIART, « La formation des professeurs d’Éducation Physique féminins à l'ENSEP, 1943-1950 », 2005). Par la suite, les Instructions officielles du 20 juin 1959 confirment l'existence d'exercices avec des « proportions variables dictés … par le sexe […] la gymnastique rythmique doit demeurer une préoccupation permanente de l'éducation physique de la jeune fille ». Les critères d'évaluation définis par Jean et Pierre Letessier (tables de Letessier) couronnent cette prise en compte différenciée des corps. La table de Letessier alimente ainsi les perceptions sociales des corps, Jean-Paul CLEMENT (« Pratiques corporelles féminines, différenciation sexuelle et gestion de la mixité en EPS (1945-1980), 1996) écrivant alors que « le modèle dominant demeure celui du « modèle procréateur ». Malgré le fait que la circulaire du 21 août 1962 oblige l'intégration des sports à l'école, certains médecins comme le Docteur Philippe d'Encausse (« Le sport et la santé », 1962) écrit que « l'adresse, la grâce et la souplesse, qualités féminines par excellence devront être les buts

recherchés dans uns juste mesure par le sport féminin ». Et si la réforme Berthoin autorise en 1959 les classes mixtes (bien que certaines existaient déjà au XIXème siècle selon Françoise THEBAUD et Michelle FOURNEL-ZANCARINI, « Coéducation et mixité », 2003), les perceptions sexuées des rôles ne change guère. Si ces visions seront fortement remis en cause à partir des années 1970, « l'organisation non mixte (voulue) de l'éducation physique et sportive révèle les résistances scolaires » à l'égard de mutations sociales en cours. C'est seulement à partir des années 1970 que des revendications féministes se font véritablement entendre, et malgré des divisions, le volonté de se battre pour la mixité et de lutter contre les préjugés sexistes est commune (Loïc SZERDAHEYLI, « L’Éducation Physique et Sportive entre sport et mixité durant les années 68 », 2009)

Déjà en mai 1967, lors d'une réunion du centre d'études et de recherches marxistes, une dizaine d'enseignantes, dont Annick DAVISSE, s'interrogent sur la mixité en EPS. Pour elles, les principes d'une éducation physique spécifiquement féminine est obsolète.

Si les programmes officiels incitent à la prise en compte de la mixité, les pratiques enseignantes, elles, s'en soucient bien peu, voire pas du tout.

Si les Programmes de 1985 et 1986 sont les premiers à prendre en compte la mixité : → les termes « fille » et « garçon » disparaissent pour laisser place à « l'élève » ou « l'enfant » → la variable du sexe n'est plus de mise → rappel des finalités sociales de la pratique sportive : entretien, loisir, expression et pas seulement la performance …

A la rentrée 1977, la loi Haby (1975) entre en vigueur mais la vision liée à la distinction des sexes persiste et ne change pas immédiatement. En EPS, nous voyons alors progressivement se développer certaines revendications. Certaines s'inscrivent dans une opte dite « universaliste », considérant que les filles et les garçons peuvent pratiquer les mêmes activités. Ces jeunes filles imprégnées d'une idéologie égalitaire, notamment à l'ENSEP, passent parfois pour des « garçons manqués » (Frédéric BAILETTE et Philippe LIOTARD, « Sport et virilisme », 1999) à tel point de « discréditer les filles qui ne leur ressemblent pas » (Loïc SZERDAHEYLI, « La mixité en EPS. Regards de professeurs d'EPS sur les années 60 et 70 », 2007). D'autres s'inscrivent dans une logique dite « différentialiste ». Souhaitant s'émanciper du modèle sportif masculin basé sur la performance, elles valorisent une nouvelle pratique corporelle expressive conduisant à l'exploration du corps et de la créativité (Catherine LOUVEAU, « Talons aiguilles et crampons alu. Les femmes dans les sports de tradition masculine », 1986).

… pour autant, « les injonctions officielles à la mixité ne suffisent pas pour changer radicalement de longues habitudes de séparation des sexes » : → maintien de la non mixité du recrutement au CAPEPS jusqu'en 1988 (Jacques GLEYSE, « Le verbe et la chair. Un siècle de bréviaires de la République. Une archéologie du corps dans les manuels scolaires français de morale et d'hygiène (1880-1974) », 2010) → mixité vécue négativement par certains professeurs attachés aux acquisitions techniques (Michel VOLONDAT, « Mixité et EPS », 1986) → maintien des stéréotypes de genre et une différenciation sexuée bien visible dans les groupes (Annick DAVISSE, « Sur l'EPS des filles », 1986) Pierre ARNAUD (« Le genre ou le sexe ? », 1996) développe l'idée selon laquelle l'unification de la classe en EPS s'est opérée comme si les pratiques, les valeurs, les attitudes sportives étaient asexuées, neutres. Or, ce n'est pas du tout le cas, c'est un référent masculin qui s'installe avec la sportivisation de la leçon en 1962. Ainsi, « la mixité d'aujourd'hui … renvoie les filles à une contrainte de féminité … comme les garçons sont renvoyés à une contrainte de virilité » (Nicole MOSCONI, « Effets de limites de la mixité scolaire, 2004) si bien que les attitudes du « masculin » en EPS deviennent les signes du progrès et implicitement de la supériorité tandis que les jeunes filles doivent incorporer des habitus sexués qui les renvoient au travail de l'apparence maîtrisée (Philippe LIOTARD et Sandrine JAMAIN-SAMSON, « La « lolita » et la « sex-bomb », figures de socialisation des jeunes filles. L'hypersexualisation en question », 2011). Les pratiques enseignantes dans les années 2000 continuent, parfois inconsciemment, de perpétuer les différences.

Cécile VIGNERON (« La construction des inégalités de réussite en EPS au Baccalauréat entre filles et garçons », 2004) montre au travers des modalités d'évaluation que les normes masculines prévalent face aux attentes amoindries des enseignants des deux sexes envers les filles. De plus, Benoîte TROTTIN et Vanessa LENTILLON (2005) montrent que les interactions sont largement favorables aux garçons, ces derniers allant jusqu'à mettre en place des « stratégies d'accaparement de l'attention enseignante » (Sylvie AYRAL, « Sanctions et genre en collège », 2010). Ainsi, nous serions face à un « échec organisé » (Cécile VIGNERON, « Les inégalités de

réussite en EPS entre filles et garçons : déterminisme biologique ou fabrication scolaire ? », 2006) en EPS renforçant le sentiment d'incompétence des filles. Un faisceau de variables plus sociales et scolaires que biologiques viendrait expliquer cette différence de résultats entre les filles et les garçons ; cette idée étant remise en cause par les enseignants aux convictions naturalistes (c'est-à-dire que ces différences seraient biologiques) qui préfèrent nier la question. CONCLUSION : Une persistance de stéréotypes d'une essence féminine ou masculine demeurent une évidence malgré des remises en cause qui parfois dérangent Si les dernières programmations invitent à instaurer un équilibre, pour preuve les « Activités Scolaire de Développement et d'Entretien de la Personne (ASDEP) » ou l'injonction « égalitaire » des programmes de collège en 2009 selon laquelle « l'EPS a le devoir d'aider tous les collégiens, filles et garçons », la perspective d'une égalité de droits et de devoirs en EPS bute toujours sur le maintien de préjugés et stéréotypes sexués....


Similar Free PDFs