Le cas de l\'amiante - Cégep du Vieux-Montréal - Philosophie - dissertation PDF

Title Le cas de l\'amiante - Cégep du Vieux-Montréal - Philosophie - dissertation
Author Pablo One
Course Sciences Humaines
Institution Diplôme d'études collégiales (DEC)
Pages 3
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Cégep du Vieux-Montréal - Philosophie - dissertation...


Description

SOPHIE LEBLANC

L’industrie de l’amiante au Québec est tristement connue pour ses conflits entre travailleurs et compagnies exploitantes. Voici les faits : les compagnies d’exploitation minières ont gardé secret les risques pour la santé liés à l’exposition à l’amiante en affirmant à leurs employés qu’ils étaient inexistants en disposant d’informations contraires, elles ont donc menti. De plus, elles ont mises sur pied une clinique dont les médecins donnaient de faux diagnostics aux travailleurs afin de les rassurer. Lorsque cela s’est su, le directeur de la clinique a invoqué des raisons humanitaires pour expliquer son geste. Ces actions ont été motivées par des raisons économiques. De nos jours, nous savons que l’amiante est responsable d’une maladie cancéreuse qui affecte les poumons et le système digestif et pouvant causer la mort, l’amiantose. La question qui se pose est la suivante : les actions des compagnies d’exploitation minières sontelles justifiables? Les vies humaines passent-elles après le bien de l’économie?

Examinons la situation de plus près. Les compagnies exploitantes cherchent à augmenter le profit et à diminuer les dépenses. Regardons à présent les facteurs qui entrent en jeu dans ce cas-ci. Le premier facteur est économique : en gardant cacher les dangers de l’amiante, le nombre de travailleurs disponibles reste supérieur à la demande et permet aux employeurs de garder l’avantage. Un facteur social dont il faut tenir compte est la création d’emplois. Un facteur historique et juridique est le manque de réglementations dans le domaine des droits des travailleurs et dans le domaine de la santé au travail au Québec avant la création de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) en 1979. Il y a aussi des facteurs politiques et juridiques : le gouvernement du Québec ainsi que les compagnies refusaient aux travailleurs l’accès aux recherches liées au domaine minier.

Ce cas fait l’objet d’un important conflit moral : entre les normes universelles (ne pas mentir) et les normes de l’État (interdiction d’accès aux études sur les effets de l’amiante sur la santé), d’une part, et les droits fondamentaux de l’individu (article 25 de la déclaration universelle des droits de l’homme qui mentionne : «droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être […]»). Le contexte est public et social puisqu’il touche l’ensemble de la population québécoise de l’époque. Un autre contexte à prendre en compte est intra personnel et interpersonnel : les dirigeants de ces grosses compagnies n’avaient-ils pas sur la conscience (valeur : intégrité) ces mensonges et comment se sentaient-ils par rapport à leurs employés ?

Comment décider de la moralité des compagnies du cas présent? Quelques philosophes pourraient bien éclairer notre jugement… Selon Hans Jonas, il est essentiel de prendre la responsabilité de nos actes (principe de responsabilité rétrospective) lorsqu’une personne ou un groupe, ici les travailleurs, se trouve en position de vulnérabilité et que l’autre partie, ici le gouvernement, les compagnies exploitantes et les médecins, dispose d’un pouvoir d’intervention. Hans condamnerait immédiatement l’ensemble des décisions prises par la partie qui sait (tous savaient pour les conséquences néfastes sauf les travailleurs), qui est responsable ! Il était de leur devoir de révéler au grand jour les informations dont elles disposaient non seulement envers les travailleurs, mais aussi pour les générations futures. L’impératif catégorique de la survie de l’humanité n’a pas été respecté puisque des actions qui affectent la santé d’un groupe de personnes sont incompatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre. De plus, l’État est aussi dans le tort de par son manque d’implication afin de garantir le droit à la sécurité aux citoyens québécois en choisissant de soutenir ces entreprises. Emmanuel Kant aurait aussi son mot à dire là-dessus. Les compagnies exploitantes ne peuvent écouter leurs intérêts et désirs personnels car ceux-ci ne peuvent être universalisables. Elles ont plutôt fait preuve de mauvaise foi en refusant de se plier à leur raison en choisissant l’action morale. Le principe d’universalisation ainsi que celui du respect de la personne ont été bafoués. Le désir du gain facile a été plus fort que celui de respecter les travailleurs. Kant désapprouve l’utilisation d’autres personnes pour arriver à ses fins. Aussi, selon lui, l’intention de l’acte rend ce dernier immoral puisqu’il est entaché d’intérêts personnels. L’intention seule est jugée. Robert Nozick serait d’un avis plus nuancé. En effet, il est totalement pour le droit à la propriété privée et dans ce cas-ci, les compagnies sont privées et devraient bénéficier du droit de faire du profit de la manière qui lui plaît. Les entreprises minières ont agi pour leurs intérêts propres et cela devrait être considéré comme éthique. Le gouvernement a aussi agi dans le sens de la conception philosophique du libertarisme en n’intervenant pas (opposition au devoir d’assistance et à l’imposition d’un code de sécurité au travail). Pourtant, il est aussi d’avis que l’État doit intervenir pour garantir les droits fondamentaux de sa population. La sécurité en fait partie.

Pour ma part, je ne trouve pas la décision quant à la moralité des gestes posés difficile à prendre. Je tiens à cœur les valeurs d’honnêteté et d’entraide. De plus, l’impératif catégorique négatif de ne pas mentir est très important. Je trouve flagrant l’immoralité des trois entités en position de supériorité. D’un autre côté, je dois mettre mes sentiments de côté et me fier uniquement à ma raison pour juger les faits. J’arrive à la même conclusion puisque les intentions n’étaient pas nobles et dénués d’intérêts en plus d’utiliser de vrais humains comme moyen de gagner de l’argent et comme cobayes. Il ne faut pas oublier que mentir est universellement immoral.

Bien sûr, les intérêts des compagnies minières et de l’économie en général doivent être tenus en compte. Mais comment justifier le mal engendré par ses actions ? Bentham pourrait m’aider en calculant le bonheur : les plaisirs et les déplaisirs qui en découlent. Malheureusement, je ne crois pas que le plaisir du plus grand nombre, ici la population québécoise, qui bénéficie d’une partie des impôts que les compagnies paient pour exploiter les ressources minières, les entreprises elles-mêmes et j’irais jusqu’à dire les employés dans la mesure où ils sont payés peut contrebalancer la mort de centaines d’innocents.

En conclusion, en tant qu’humaniste, je ne peux que constater l’immoralité absolue de toutes les compagnies d’exploitation minière des années 1920 à 1980 qui ont volontairement caché des informations de la plus grande importance au public et aux travailleurs miniers de l’époque. Le gouvernement a trahi la confiance du peuple québécois en faisant passer des intérêts économiques avant le bien-être, la sécurité des siens. Comment s’assurer que ces droits soient respectés à l’avenir? Plusieurs recours collectifs semblent avoir porté fruit. Le bonheur du plus grand nombre peut finalement inspirer certains comportements à adopter!...


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