TD N°3 - Dissertation droit et morale PDF

Preview

Summary

Dissertation droit et morale...

Description

L1 DROIT Droit civil TD N°3 Le droit et la morale

" Pouvoir juridique, pouvoir moral, ces deux notions sonnent comme des fanfares, mais dont l'expérience indique qu'elles ne jouent pas forcément le même air, ni au même moment, ni dans le même registre. Pourtant on ne se lasse pas de les évoquer ensemble, ce qui parait être le signe d'une relative harmonie dans la dissonance. " Philippe Jestaz, Docteur en droit et professeur à l'université de Paris XII, démontre à travers cette citation que le pouvoir juridique et le pouvoir moral sont deux notions distinctes, mais que l'on associe cependant volontiers quand cela est nécessaire. Dans son ouvrage " Pouvoir juridique et pouvoir moral ", Philippe Jestaz élucide les rapports du Droit et de la morale. Mais avant de comprendre l'enjeu des rapports de ces deux notions, il s'agit d'abord de les définir. Gérard Cornu définit le Droit dans le " Vocabulaire Juridique ", comme " l'ensemble des règles de conduite socialement édictées et sanctionnées, qui s'imposent aux membres de la société ". Quant à la morale, elle correspond à ce qui est conforme aux bonnes moeurs. C'est " l'ensemble des règles de conduite considérées comme bonnes de façon absolue ou découlant d'une certaine conception de la vie. " selon le dictionnaire Laroussse. Ces deux notions que sont le Droit et la morale sont au coeur de tous les manuels de droit civil. En effet, c'est une question relativement importante de savoir quels liens ont ces deux notions, puisqu'on les associe toujours au sein de ces manuels. Cependant, si certains auteurs comme George Ripert, les associent, d'autres auteurs pensent que ces deux notions sont totalement distinctes. Il est donc intéressant de comprendre quels liens ces deux notions ont entre elles, si ces deux notions sont distinctes, ou si au contraire, il existe une corrélation entre elles deux. Le Droit et la morale ne relèvent pas seulement du domaine juridique. Elle peuvent aussi découler, par exemple, de la philosophie. Sommes nous régis par le Droit ou par la morale ? Respectons nous les lois parce qu'elles sont obligatoires, ou parce que notre morale nous

l'ordonne ? Autant de questions que l'on peut se poser pour comprendre l'enjeu du Droit et de la morale, qui est généralement source de débat, et que l'on évoque habituellement ensemble. Il est donc intéressant de se demander si ces deux notions que sont le Droit et la morale sont intégralement opposées, distinctes, ou si au contraire, elles peuvent se rejoindre sur certains points ou certains domaines, de savoir comment l'on peut concevoir les rapports du Droit et de la morale. Pour tenter de répondre à cette problématique, il conviendra de démontrer que ces deux notions sont souvent opposées (I), mais qu'elles restent néanmoins très liées dans certains domaines (II).

I) Notion de Droit et morale : deux conceptions distinctes, opposées. Le Droit et la morale s'opposent sur plusieurs points. Elles n'ont ni la même source, ni la même finalité, ni le même objet. Ces notions sont distinctes. A) Divergence d'après l'objet et la source du Droit et de la morale. Le Droit et la morale n'ont pas les mêmes sources. La première source du Droit, c'est la loi. Ce sont des sources extérieurs à l'individu. Ainsi l'on parle d'opposition entre le Droit et la morale, car les sources de la morale, elles, sont intérieures à l'individu. C'est la conscience. Sa source est individuelle. Le Droit et la morale se distinguent aussi de part leur objet. Le Droit a pour objet de régir nos relations avec les autres, avec autrui. Cependant, dans certains cas, il existe des exceptions. Le Droit peut aussi s'occuper des comportements d'un individu qui agit seul, sans que son comportement puisse entraver le bien être d'une autre personne. Par exemple, un individu ne peut consommer des stupéfiants, même s'il est seul chez lui. La loi le lui interdit. Mais dans la plupart des cas, le Droit s'occupe des relations avec autrui. Quant à la morale, elle dispose d'un autre objet qui s'ajoute à ce premier : régir les relations avec nous même. L'on parle alors de la conscience. Le Droit a donc un seul objet lorsque la morale en a deux. Si l'on devait représenter le Droit et la morale par deux cercles, l'on s'apercevrait donc que celui du Droit est plus petit que celui de la morale. En effet la morale dispose de deux objets, mais la morale aussi, s'occupe de tout. Elle est très large, elle

englobe un domaine plus vaste que le domaine juridique. B) Différences entre la finalité du Droit et celle de la morale. Le Droit ne cherche pas à faire de nous des êtres parfaits, contrairement à la morale. Il cherche à faire de nous des êtres sociables. Le Droit s'occupe de l'essentiel tandis que la morale s'occupe de tout. " Le pouvoir juridique vise à l'efficacité globale, et de là vient son imperfection éthique. " Philippe Jestaz démontre ainsi que le Droit ne cherche pas à faire de l'individu un être parfait, il ne cherche pas à le perfectionner. Il vise simplement à régir et organiser les rapports dans la société. " Le droit se proposant l'ordre et ne s'occupant que des actions, la morale s'occupant des intentions et se proposant le perfectionnement interne individuel. " Ici, George Ripert rejoint la conception de Philippe Jestaz, il insiste sur le fait que le Droit et la morale n'ont pas le même but, la même finalité. L'un s'occupe de l'ordre, des actions, et l'autre se charge du perfectionnement humain. L'on remarque aussi que le Droit autorise certains comportements que la morale réprouve. La morale est propre à chacun tandis que le Droit est le même pour tous. La règle de droit est générale et impersonnelle. Par exemple, la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe relève bien du Droit, mais la morale réprouve parfois cette loi. Certains mouvements sont alors mis en place pour dénoncer cette loi en affirmant que le mariage pour les personnes de même sexe est contre nature. Cette idée ne relève que de la morale, des moeurs. La finalité du Droit et de la morale n'est donc pas la même au sein de ces deux notions. Le Droit et la morale se distinguent aussi de part leur sanction. Lorsque l'on viole une règle de droit, une sanction s'applique ( hormis les lex imperfectif ). La sanction peut être de différente nature comme la prison par exemple, une amende, etc. Mais lorsque l'on viole une règle de morale, la sanction est différente. Elle a deux origines. L'origine interne, c'est le remord, la culpabilité, l'auto-sanction. Puis une origine externe, quand autrui nous rabaisse. Le regard des autres, la honte. Droit et morale se distinguent donc en plusieurs points, mais on s'aperçoit qu'ils peuvent aussi se recouvrir, se compléter, qu'ils ont des liens. Par exemple, la sanction constitue une différence entre ces deux notions, mais elle peut aussi montrer un point commun car elle est présente dans l'une, et dans l'autre notion.

II) Le droit et la morale : une corrélation entre ces deux notions Si le droit et la morale sont deux notions distinctes, elles peuvent en réalité se rejoindre sur certains points. Il existe une corrélation entre les deux. A) Droit et morale : entre points communs et idée de " chevauchement " entre les deux. Même si la sanction du droit et de la morale sont distinctes et ne se ressemblent en rien, elles sont néanmoins présentes au sein de ces deux notions, ce qui leur constitue un point commun. De plus, si l'on reprend l'exemple des cercles évoqués ci-dessus, on remarque que si l'on traçait ces deux cercles, ils se chevaucheraient, mais partiellement. La morale recouvre certains domaines du Droit. " Droit et morale auraient d'abord des domaines communs : les deux ordres normatif prescriraient la même règle. Il y aurait ainsi chevauchement. " Dominique Fenouillet explique alors que Droit et morale peuvent se chevaucher dans certains domaines. Comme exemple de domaine que le Droit et la morale recouvrent tous les deux, l'on peut citer le mariage, ou bien même le droit de la famille. " Cour de Nancy, 29 novembre 1982, affaire Dame Morel c/ Soc. Siteco ", dans cet arrêt, Une femme, Madame Morel se rend sur son lieu de travail vêtue d'une blouse transparente laissant apparaître la totalité de son buste dénudé. Suite à plusieurs avertissements de sa hiérarchie, elle se fait licencier. Elle interjette appel et s'appuie sur le fait que sa tenue était conforme à celles des usages vestimentaires en vigueur, et que lui reprocher portait atteinte à sa vie privée. Dans cet arrêt, le Droit et la morale s'entrecroisent puisque la vêture relève d'une question de gout, de la vie privée, donc de morale. Or, en contre partie, l'exhibition est juridiquement condamnable. Dans le milieu professionnel il faut adopter une tenue en accord avec cette profession. C'est un fait qui s'inscrit dans les normes de chaque individu. Il n'est pas interdit de se présenter à un entretient d'embauche en survêtement, ce n'est pas juridiquement condamnable, mais on ne le fait pas pour une question qui relève de la morale. Le Droit et la morale sont donc très liés mais tous les individus n'ont pas les mêmes normes, les mêmes valeurs, la même morale. C'est pour cela que le Droit vient organiser, dans certains domaines, la vie en société pour organiser les rapports des individus. A contrario, la morale vient à son tour, dans certains domaines, influencer

le Droit. B) L'inspiration du Droit et de la morale. Cette thèse de l'inspiration est attachée à George Ripert. Il affirme à travers ses textes que le Droit s'inspire de la morale : " Le droit dans sa partie la plus technique est dominé par la loi morale. " Ripert indique donc clairement que d'un certain point de vue, le Droit est dominé par la morale. Or, ce n'est pas la conception de tout le monde. " Le droit est la semence des moeurs. " Portalis, quant à lui, affirme que c'est le Droit qui inspire la morale. L'on remarque donc que ces deux notions s'inspirent l'une et l'autre, et qu'elles se recouvrent en parti. Le Droit et la morale sont donc deux notions qui sont liées. Le Droit et la morale sont deux notions qui évoluent ensemble. Les moeurs des individus changent, évoluent avec le temps. Il en est de même pour les normes et les valeurs. La morale n'est donc pas fixe si on l'associe à la notion de conscience. Et si cette dernière n'est pas fixe, la règle de droit ne l'est pas non plus, puisque l'on vient de voir que le Droit et la morale s'inspiraient. Les lois sont modifiées, abrogées, d'autres sont créées, en fonction de l'évolution de la morale, des moeurs dans la société. C'est en cela que l'on peut affirmer que si l'on parle souvent de Droit et morale ensemble, c'est parce que ce sont deux notions que l'on peut associer....